04-05-2024 03:36 PM Jerusalem Timing

Comment les européens maltraitent leurs personnes âgées

Comment les européens maltraitent leurs personnes âgées

Un sujet tabou mais bien réel.

Les européens maltraitent leurs ainésLe corps d'un homme âgé de 73 ans, décédé depuis un an, a été découvert momifié dans son lit. Après sa mort son épouse de 68 ans a continué de dormir aux côtés du cadavre sans que personne ne s'en  aperçoive.

Ceci n'est pas un conte mais une vraie histoire qui a été dévoilée le mois dernier et qui s'est bien déroulée à Bruxelles, la capitale de l'Europe.

Plus étonnant encore, aux Pays-Bas, la police a retrouvé, il y a quelques semaines, le corps d'une vieille dame morte naturellement dans son appartement depuis 10 ans déjà. La fille, qui s'est présentée à la police après cette découverte macabre, a affirmé qu'elle avait plus contacté sa mère depuis une vingtaine d'années. Ces faits ne constituent qu'un exemple parmi tant d'autres  de la souffrance et la maltraitance des personnes âgées en Europe.

Un problème ignoré

Les européens maltraitent leurs ainésBien qu'elle soit un véritable fléau de sociétés européennes, la maltraitance à l'égard de personnes âgées reste un sujet sous-estimé et rarement abordé par les medias. En effet, les européens, privés de repères permettant de transcender la mort, ont du mal à parler de la vieillesse qui leur renvoie une image qu'ils ne veulent pas regarder.

Dans une société qui dénit  la mort et qui accorde peu de valeurs au quatrième âge, les personnes âgées sont humiliées, négligées, maltraitées et beaucoup d'entre elles sont abandonnées par leurs propres enfants.

Les témoignages reçus par les associations humanitaires lèvent un coin du voile sur cette souffrance cachée : personnes âgées privées de toilette pendant plusieurs jours, malmenées lors d'un soin, laissées à demi-nues dans un couloir, exposées aux menaces et insultes, laissées assises sur une chaise sans être changées et sans être amenées aux toilettes ou même nourries jusqu'au soir.

Un sujet tabou mais bien réel

D'après un rapport du bureau régional de l'Europe pour l'organisation mondiale de la santé (OMS), une personne de 65 ans sur cinq serait victime d'une forme ou l'autre de mauvais traitement en Europe. Au cours d'une année, au moins 4 millions de personnes âgées de la région européenne de l'OMS subiraient des sévices physiques (gifles, coups, brulures, blessures, sous-nutrition ou confinement dans leur chambre).

Elles sont 2500 à en mourir de la main de membres de leur famille. La recherche indique également que 29 millions de personnes âgées sont soumises à des violences physiques (insultes, injures, menaces ou chantages), 6 millions d'entre elles sont victimes d'exploitation financière (vol d'argent, escroqueries, détournement de fonds) et 1 million sont exposées à des abus sexuels (harcèlement sexuel, attentat à la pudeur ou viol).

Des études récentes, en France et en Belgique, affirment qu'une personne âgée sur cinq est victime de maltraitance, que ce soit en institution ou à domicile. Les victimes désignées sont les personnes les plus fragiles, en majorité des femmes (75%), plutôt âgées ( en moyenne 79 ans), vulnérables, incapables de se défendre ou de réagir. Selon les associations d'écoute pour les personnes âgées maltraitées (ALMA-SEPAM), 71% des auteurs d'actes de maltraitance sont les membres de la famille notamment les enfants de la personne maltraitée (64%) en particulier ceux qui ont des problèmes avec la drogue, l'alcool ou le jeu.

Ce n'est que la partie visible de l'iceberg !

D'après les spécialistes, ces chiffres ne représentent qu'un vingtième de la réalité car ils  reposent sur les plaintes adressées aux services d'écoute et ne peuvent inclure les mauvais traitements qui ne sont pas signalés.

En réalité, la plupart des cas de maltraitance sont celles qui se produisent à domicile, et qui sont donc difficiles à estimer puisque la famille les cache ou les personnes âgées maltraitées n'osent rien dire de la situation qu'elles subissent. Selon ALMA-ALLO (maltraitance personnes âgées) les ainés craignent souvent de signaler la maltraitance par peur des représailles, par culpabilité ou par honte. Certains ont du mal à en parler, d'autres parlent et demandent de ne rien dire et acceptent de peur d'être abandonnés. Ils choisissent de souffrir en silence plutôt que de dénoncer les comportements de leurs propres enfants.

Vers le suicide...

Le sentiment d'abandon, le rejet de son entourage, et la sensation d'inutilité entrainent la honte, la perte d'identité et la dépression de la personne âgée, et peuvent mener jusqu'au suicide.

Tous les ans, 3.000 personnes âgées en France mettent terme à leur vie, soit près d'un tiers de l'ensemble des suicides. Un chiffre en constante hausse mais qui reste peu médiatisé et méconnu par le public malgré que le nombre de suicides chez les personnes agées est 7 fois plus important que dans le reste de la population. La dépression en est la principale cause et les méthodes utilisées pour en finir sont souvent radicales : armes à feu ou pendaison. En outre, d'après le ministre chargé de personnes âgées, un grand nombre de suicide n'est pas pris en compte. Le suicide peut se cacher : la personne âgée peut arrêter volontairement son traitement médical, peut simplement traverser la route sans regarder, refuser de s'alimenter ou rester alitée toute la journée ... elle se laisse glisser vers la mort.

Compte tenu du vieillissement rapide de la population européenne, le nombre de personnes âgées exposées aux maltraitances continuera de croître dans les années à venir. D'ici 2050 le nombre de plus de 60 ans en Europe atteindra la barre des 37%. Cela requerra davantage de moyens pour assurer les pensions, les soins médicaux et les aides sociales et aggravera encore les structures économiques et sociales, surtout en ces temps de crise, conduisant à une hausse du nombre de personnes âgées victimes de violence. 

Jihane Hindi