08-05-2024 07:57 PM Jerusalem Timing

Un rapport inédit met à nu les manœuvres de l’Occident en Libye

Un rapport inédit met à nu les manœuvres de l’Occident en Libye

Propagande, mensonges, jeu trouble des chaînes satellitaires, élimination de Kadhafi…

A l'initiative du Centre international de recherche et d'études sur le terrorisme et d'aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT1) et du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R2), et avec le soutien du Forum pour la paix en Méditerranée, une délégation internationale d'experts s'est rendue en Libye (Tripoli) du 31 mars au 6 avril, puis à Benghazi et en Cyrénaïque du 19 au 25 avril afin d'évaluer la situation libyenne en toute indépendance et neutralité et rencontrer les représentants des deux parties. Cette démarche demeure, à ce jour, unique.



Le compte rendu de cette mission d'évaluation auprès des belligérants libyens livre des vérités troublantes sur cette «guerre civile» qui a été déclenchée, selon les missionnaires, par des personnes voulant à tout prix mettre à feu et à sang un peuple «paisible» et «riche».

La guerre civile en Libye est considérée comme une «cerise sur le gâteau» aussi bien pour la France, la Grande-Bretagne que les Etats-Unis d'Amérique.

La délégation de journalistes et de militants des droits de l'homme qui a séjourné pendant plus d'un mois en Libye comprenait les personnalités suivantes, à savoir Saïda Benhabylès (Algérie), ancienne ministre de la Solidarité, ancien Sénateur, membre fondateur du CIRET-AVT, Prix des Nations unies pour la société civile, Roumiana Ougartchinska (France/Bulgarie), essayiste, journaliste d'investigation, Yves Bonnet (France), préfet honoraire, ancien député, ancien patron de la Direction de la surveillance du territoire (DST), président du CIRET-AVT, Dirk Borgers (Belgique), expert indépendant, Eric Denécé (France), directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), ainsi que André Le Meignen (France), expert indépendant, vice-président du CIRET-AVT.


Pour pouvoir se rendre en Libye, cette délégation a eu «l'autorisation» du philosophe français Bernard Henri Lévy, devenu, selon Saïda Benhabylès, le premier responsable du Conseil de transition libyen (CNT). «Bernard Henri Lévy se rend régulièrement à Benghazi avec un jet privé. Il est considéré comme le véritable coordinateur de la rébellion», a-t-elle ajouté.



«Kadhafi pris de vitesse et piégé par ses proches collaborateurs»

Les missionnaires n'ont pas manqué de rappeler dans leur rapport les efforts entrepris par le guide libyen pour le développement de son pays. Si le leader libyen est «un dictateur et si la situation de la population n'est guère enviable en ce qui concerne l'exercice des libertés démocratiques, la situation socio-économique du pays est exceptionnelle à l'échelle africaine et arabe». Il a réellement développé son pays. La redistribution de la rente, même inégalitaire, a permis d'assurer la paix sociale. En 1969, lorsque le colonel Kadhafi accède au pouvoir par un coup d'Etat qui renverse la monarchie, le peuple libyen est un des plus pauvres au monde avec un revenu annuel par habitant de moins de 60 dollars.


La Libye a connu un des plus hauts niveaux de vie du monde arabe et le plus élevé en Afrique.
La Libye a été également un acteur majeur du développement et de l'indépendance du continent africain. Kadhafi a permis à l'Afrique de connaître une véritable révolution technologique, grâce au financement du premier satellite africain de communication. Cet outil a permis de relier l'ensemble du continent par téléphone, d'assurer la diffusion des programmes de télévision et de radiodiffusion, ainsi que plusieurs autres applications technologiques comme la télémédecine et l'enseignement à distance. Grâce aux transmissions radio WMAX, une connexion à faible coût a été mise à disposition à travers le continent, y compris dans les zones rurales.


Après 14 ans de tentatives infructueuses des Etats africains afin d'obtenir un prêt (auprès de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international, des Etats-Unis et de l'Europe), le leader libyen a pris ce projet à sa charge et a mis 300 millions de dollars sur la table, pour débloquer le projet. La Banque africaine de développement a ajouté 50 millions de dollars et la Banque de développement d'Afrique de l'Ouest 27 millions. C'est ainsi que l'Afrique a obtenu son premier satellite de télécommunication le 26 décembre 2007. La Chine et la Russie ont alors accepté de partager leur technologie, ce qui a permis de lancer des satellites pour l'Afrique du Sud, le Nigeria, l'Angola, l'Algérie. Un second satellite de communication africain a été mis sur orbite en juillet 2010.


Sur le plan institutionnel, le budget de l'Union africaine (UA) est financé à hauteur de 15% par la Libye.

Sur le plan interne, la Libye voulait amorcer un changement de son système de gouvernance. Le rapport a souligné qu'une campagne de communication est confiée, entre 2006 et 2008, au Monitor Group, une société américaine, pour faire connaître la volonté d'évolution du régime.


La Libye a alors besoin d'aide afin de développer ses institutions dans un environnement démocratique et de moderniser son économie. Après des décennies d'isolement, les milieux d'affaires, les citoyens, le gouvernement et les élites intellectuelles cherchent à approfondir leur compréhension des idées et des pratiques du monde. En 2009, près de 2000 islamistes, prisonniers politiques, ont été libérés.

Parallèlement, le régime donne de nombreuses preuves de sa volonté d'établir de nouvelles relations de partenariat avec les pays occidentaux. Malgré son lourd passif, le régime est en pleine évolution. Kadhafi s'apprête même à annoncer de nouvelles réformes quand la «révolution libyenne» vient tout interrompre.

En février 2011, le gouvernement a annoncé diverses dispositions d'apaisement, par exemple en offrant des primes. Le 2 mars, Kadhafi en personne annonce des réformes qui doivent accorder une plus grande place à la société civile, il assouplit le régime législatif et la Cour suprême publie une déclaration de principes. Mais la contestation ne cesse de prendre de l'ampleur.


Selon le document en notre possession, le Guide a été mal conseillé par son entourage qui l'a incité à recourir à la force. «L'interrogation subsiste de savoir quels sont précisément les personnages de l'entourage de Kadhafi qui avaient intérêt au pourrissement de la situation», s'interrogent les missionnaires laissant comprendre que le régime a été entraîné à desseins dans cette «guerre civile».


«Les mercenaires», une arme pour faire reconnaître le CNT


Les informations en provenance des «forces rebelles» sur l'implication de mercenaires dans le conflit libyen a été une arme à double tranchant. Pour gagner en crédibilité et s'arracher une place diplomatique, les «rebelles» ont eu à lancer de fausses informations, notamment à l'encontre de l'Algérie.


Ils ont indiqué avoir capturé des mercenaires algériens à Ajdabiya et en avoir tué trois lors des combats livrés dans cette ville. Le porte-parole des rebelles a aussitôt accusé l'Algérie de soutenir Mouammar Kadhafi, affirmant que ce pays «fermait les yeux» sur la venue de mercenaires. La vérité, selon le rapport de la mission, est qu'il n'y a pas de mercenaires algériens et d'aide militaire. Les membres du CNT sont «racistes» et «prêts à reconsidérer leurs relations avec les Etats africains». Selon le document du centre français, «tous les Noirs présents en Libye orientale sont traités comme des mercenaires au service de Kadhafi».


Dès que l'Etat nouveau sera créé, il durcira, selon plusieurs membres du CNT, sa politique contre les Africains coupables d'avoir aidé Kadhafi. Les missionnaires ont relevé «l'acharnement des insurgés à tous les niveaux et souvent excessif». Parmi les exemples de manipulation cités, «l'intervention de Sarkozy a sauvé plus d'un million de vies humaines, soit la totalité de la population de Benghazi»,

«A Tripoli, on ne peut même pas sortir dans la rue. Il n'y a pas de vie. La population a peur et ne sort que subrepticement acheter de la nourriture», «Kadhafi a recruté des agents qui ont à leur tour recruté des individus chargés d'organiser des provocations»,

«A Misrata et Ajdabiya, Kadhafi a donné du Viagra et des préservatifs à ses troupes. Il y a eu de nombreux viols et des disparitions de femmes», «Kadhafi souhaite l'intervention terrestre de l'Otan. Il ne veut pas la paix ni le cessez-le-feu. Il veut que les troupes étrangères viennent ; il veut davantage de victimes», «Une voiture de l'armée algérienne aurait été aperçue à Brega», ainsi que «L'armée algérienne ravitaille les mercenaires de Kadhafi par hélicoptères».


Mais d'autres membres du CNT ont nié ces accusations, note le rapport. Le Dr Salah Ed-Din El Bechiri, membre du comité des Affaires étrangères au sein du CNT et ancien ambassadeur en Malaisie, a affirmé à la mission qu'il n'y a pas eu de déclaration officielle du CNT concernant les «mercenaires algériens. Cela est évidemment faux».
 

Révolte à Benghazi : Le poids du trafic humain


Selon le rapport du centre, Benghazi est devenue, au cours des quinze dernières années, l'épicentre de la migration africaine vers l'Europe. Ce trafic humain s'est transformé en une véritable industrie, brassant des milliards de dollars. Ce n'est que depuis un an que le gouvernement libyen, avec l'aide de l'Italie, a réussi à contrôler ce cancer.

Avec la disparition de son fonds de commerce et l'arrestation de nombre de ses chefs, la mafia locale a été en pointe dans le financement et le soutien à la rébellion libyenne. De nombreux gangs et membres de la pègre issus des bas-fonds de la ville sont connus pour avoir mené des expéditions punitives contre les travailleurs immigrés africains à Benghazi même et dans les banlieues. Depuis le début de la rébellion, plusieurs centaines de travailleurs immigrés, Soudanais, Somaliens, Ethiopiens et Erythréens ont été détroussés ou assassinés par les milices rebelles. «Ce fait est soigneusement caché par les médias internationaux», note le document.



Le «machin» et la désinformation : Une intervention de l'Otan basée sur le mensonge



Le rôle des médias et la mise en scène du conflit ont été les causes directes du déclenchement de la guerre. En Libye, les chaînes Al Jazeera et Al Arabia sont beaucoup plus regardées que les chaînes nationales.


Les missionnaires ont souligné que la couverture des événements de Libye par les chaînes satellitaires n'a pas été d'ordre «professionnel», mais «elle a servi aux actions des forces militaires occidentales». Jusqu'à fin février, les villes de l'ouest libyen ont connu de fortes tensions et des affrontements, lesquels ont été moindres.
Cependant, «les médias cités ont exagéré dans la couverture, voire joué le rôle de désinformation pure et simple».
A titre d'exemple, l'information reprise par les médias occidentaux selon laquelle le régime a utilisé l'aviation était totalement fausse. «La conséquence de cette désinformation est claire : la résolution de l'ONU a été votée à partir des informations de cette presse et sans qu'aucune commission d'enquête préalable ne se soit rendue sur place. Il n'est pas exagéré de dire qu'Al Jazeera a créé l'évènement, certainement sur commande, et influencé l'ONU.


La guerre médiatique autour de cette affaire rappelle étonnamment ce qui s'est passé dans les Balkans», ont rapporté les experts du centre français. L'autre fait plus étonnant encore, le mouvement de révolte est mené par d'anciens dignitaires du régime (Mustapha Abdu Jalil et Abdul Fatah Younis), dont le passé atteste du mépris des droits de l'homme et qui sont essentiellement guidés par le désir de prendre le pouvoir. Mais contrairement à ce qu'ont annoncé les médias, la mission n’a constaté lors de sa visite des villes libyennes aucun signe d'intenses combats, «illustration probable d'une certaine retenue dans l'intervention de l'armée ou de la faiblesse des opposants armés».


L'enlisement et des armes chimiques


«Le conflit terrestre s'enlise, malgré le soutien de la communauté internationale. Les bombardements de l'Otan ont manifestement dépassé le cadre imparti par l'ONU : la détérioration de la situation humanitaire qui en découle dans ces villes est très préoccupante, en dépit de l'aide internationale qui y parvient».


Courant avril, l'ONG Human Rights Watch a publié des données chiffrées concernant Misrata, révélant, contrairement aux affirmations des médias internationaux, que les forces libyennes n'en ont pas massacré les résidents. Misrata compte une population d'environ 400 000 habitants. En près de deux mois d'affrontements, seulement 257 personnes – dont des combattants – y sont mortes. Parmi les 949 blessés, seulement 22 – soit moins de 3% – sont des femmes. Il est ainsi maintenant évident que les dirigeants occidentaux – au premier rang desquels le président Obama – ont grossièrement exagéré la menace humanitaire pour justifier leur action militaire en Libye.


Le véritable intérêt de Misrata est donc ailleurs. Il est à la fois symbolique et stratégique : le fait que cette ville reste aux mains des insurgés permet de dire que la résistance contre Kadhafi n'est pas limitée à l'est de la Libye et donc la rébellion n'est pas de nature sécessionniste. Par ailleurs, le contrôle de ce port en ferait une base de départ idéale, à 220 km seulement de Tripoli, dans l'hypothèse d'une offensive terrestre contre Kadhafi. Les forces de l'Otan ont eu recours aux armes chimiques, selon les experts indépendants.



Le CNT ne représente que lui-même



Le Conseil national de transition (CNT), créé le 27 février 2011, qui tient lieu de «gouvernement» depuis le début du soulèvement est une pure création qui n’a aucune représentativité au sein de la Libye. «Il ne s'agit pas d'un gouvernement mais d'un comité de gestion de crise», a tenu à souligner le rapport de la mission.


Officiellement, le CNT est composé de 31 représentants des principales villes libyennes. Mais seuls les noms de 13 de ses 31 membres ont été rendus publics. Le CNT est donc dominé par les Libyens du nord-est et ne comprend pas de représentants du centre et du sud du pays, ni de Tripoli, ce qui illustre le caractère régional de l'insurrection. Il ne comprend qu'une femme, le Dr Salwa Digheli, présidente du comité juridique. Il représente différents groupes d'intérêts et des ONG occidentales. Il s'agit de la Ligue libyenne des droits de l'homme dont le siège se trouve à Londres, le Front national pour la sauvegarde de la Libye (siège à Riyadh), les monarchistes sénoussis (également basés à Riyadh), des libéraux de Human Rights Watch, et d'Amnesty International. Pour obtenir le soutien des pays occidentaux, les membres du CNT séduisent par un discours rassurant, basé sur l'organisation d’élections, le multipartisme, les droits des femmes, la fin du tribalisme et la reconnaissance d'Israël.


Les bombardements ciblent des résidences et des zones paisibles : L'Otan veut assassiner Kadhafi pour crier victoire



L'une des solutions les plus rapides afin de mettre un terme à la crise libyenne serait la disparition du guide libyen. Ainsi, les services de la coalition, en coordination avec les forces aériennes, ont tenté d'éliminer à plusieurs reprises le guide libyen d'où les bombardements massifs de Tripoli, une capitale plutôt paisible qui n'a pas connu de tensions et de manifestations. L'Otan veut à tout prix éliminer le guide de la révolution libyenne, afin de déclarer la fin de la guerre. Les membres de la coalition craignent le maintien de cette guerre, ce qui va aggraver leur situation financière et peut-être même l'avenir politique des hommes politiques, à l'instar du Premier ministre italien, Silvio Berlusconi, qui connaît une situation difficile en raison de procès personnels et d'alliances politiques très fragiles qui pourraient entraîner son départ à court terme.


L'assassinat de l'un des fils de Mouammar Kadhafi – Seïf Al Arab, âgé de 29 ans – qui n'occupait pas de fonctions officielles au sein du régime, avec trois de ses enfants, renseigne sur la volonté de l'Otan d'en finir avec le guide libyen. La résidence du colonel Kadhafi à Bab Al Azizia, au centre de Tripoli, avait déjà été prise également pour cible lors de la première vague de bombardements.


A la lumière de ces données, il apparaît selon les missionnaires que «la révolution libyenne» n'a aucun rapport direct avec le «printemps arabe», mais elle a été une «occasion inespérée pour éliminer le guide de la révolution libyenne, lui qui a ouvert son pays à la Chine, à la Russie et à l'Allemagne, pour investir et exploiter ses richesses naturelles». Avec une population de 6 millions, les Libyens pouvaient devenir les plus riches au monde. Mais avec cette guerre qui dure depuis presque 5 mois, l'avenir est incertain.



Opérations militaires en Libye ; Les «erreurs» calculées de la coalition


Les «erreurs» de bombardement des objectifs civils qui n’ont rien à voir ni avec les objectifs fixés par la résolution 1973 du Conseil de sécurité sur la Libye, ni avec les partisans du colonel Kadhafi, se multiplient, faisant de plus en plus de victimes innocentes. Ce fut le cas ce week-end à Tripoli avec le massacre d’une famille au complet avec femmes, hommes et enfants.
L’Otan qui ne pouvait pas ne pas reconnaître ce «dommage collatéral» constaté par tous les journalistes occidentaux sur place dans la capitale libyenne n’en est pas à sa première bavure. Ses avions ont déjà frappé, toujours «par erreur», non seulement les quartiers résidentiels de Tripoli mais y compris dans les rangs de ses propres alliés, les insurgés dont des positions ont été ciblées plus d’une fois.

En se multipliant, ces erreurs augmentent les possibilités de doutes qui planent depuis le début sur les objectifs réels de la coalition militaire occidentale.


Il n’est plus seulement question de protéger les populations civiles hostiles au régime libyen mais de chasser du pouvoir le «dictateur», ce que ne prévoit pas la Résolution 1973. D’erreur en erreur puis de dérive en dérive, on s’est aperçu du côté de l’Otan que la tâche n’est pas si aisée, et que plusieurs mois après le début des opérations militaires, et non plus des semaines comme promis par Alain Juppé, si l’aviation de Kadhafi est certes à plat, ses troupes conservent la même capacité d’action.


Il n’est pas exclu alors que le bombardement nocturne, en mai dernier, du secteur de Bab El Azizia où se trouvent les bureaux du leader libyen, son lieu de résidence et celui de ses proches, ne soit pas tout à fait une erreur. Cette opération sur laquelle, d’ailleurs, le commandement allié n’a pas fait de commentaires ni apporté de démenti, visait à éliminer le dirigeant libyen, serait classée ensuite dans la rubrique des «dommages collatéraux».


Ces erreurs peuvent traduire l’état d’esprit dans lequel les pilotes des bombardiers des hélicoptères de combat se rendent sur le front. Beaucoup moins motivés que leurs dirigeants, les soldats français et britanniques ne s’expliquent toujours pas la cause pour laquelle ils massacrent des civils et mettent en péril leurs propres vies. Ce doute a déjà gagné les gouvernements qui étaient convaincus que leurs armées viendraient à bout de son régime en des délais assez courts, avant de se rendre à une évidence de taille : on ne gagne pas une guerre déclarée sur la fausse cause de défense des droits de l’homme même si l’ennemi n’est pas à l’abri de tout soupçon dans ce domaine.


Maintenant, les alliés explorent la voie politique qu’ils avaient rejetée. La Ligue arabe qui a été manipulée adroitement par les pays occidentaux tente de revenir à la solution que l’Algérie et l’Union africaine avaient privilégiée dès le début, avant que cette guerre ne fasse les dégâts que l’on sait et creuse un large fossé de sang et de haine entre populations d’un même pays. Les insurgés aussi qui ont trop cru en la solution militaire de l’Otan semblent revenir à plus de réalisme politique en reconnaissant, implicitement certes, qu’ils ne seront jamais les uniques représentent du peuple libyen. Des contacts ont lieu entre les deux camps opposés de Tripoli et de Benghazi.


Ce fut donc une grave erreur d’avoir misé sur la force et l’intervention destructrice étrangère pour obtenir un changement de système politique qui est toujours possible, même dans les situations les plus délicates. Bashar El Assad vient de recourir à la solution négociée, mais au président syrien, les coalisés n’avaient d’autre choix que de réfléchir par deux fois avant d’aller vers la solution de guerre en Syrie.


L’Otan ne peut plus supporter cette guerre de Libye qui menace de durer plus de temps que prévu. Elle se trouve devant ce double choix. Le plus probable c’est, bien sûr, d’éliminer physiquement Kadhafi en multipliant les erreurs calculées de bombardements de quartiers résidentiels dans les alentours de Bab El Azizia. Ce qui ne conduira pas outre mesure Nicolas Sarkozy ou David Cameron devant le Tribunal pénal international, institution faite pour les autres. Sinon d’aller vers une solution négociée sans Kadhafi. Mais a-t-on laissé une porte de sortie au colonel libyen qui a derrière lui plus que des membres de sa tribu ?


Farouk Belhabib
Alter info