02-05-2024 01:16 PM Jerusalem Timing

L’Ukraine renoue avec ses vieux démons : les guerres entre oligarques

L’Ukraine renoue avec ses vieux démons : les guerres entre oligarques

L’un d’entre eux, Igor Kolomoïski, -de nationalité israélienne aussi-, dispose d’un Etat au sein de l’Etat!

Un gouverneur de région, milliardaire et sulfureux, le président Petro Porochenko, des hommes armés qui investissent le siège de sociétés publiques : l'Ukraine, affaiblie par le conflit dans l'Est et la crise économique, renoue avec ses vieux démons, la menace d'une guerre des oligarques au sein du pouvoir.
   
Après plus d'un an d'une crise qui s'est propagée par une série de secousses, du mouvement de contestation pro-occidental de Maïdan ayant entraîné la chute du président prorusse Viktor Ianoukovitch à la guerre dans l'Est séparatiste en passant par le retour de la Crimée à la Russie, l'Ukraine renoue avec des pratiques qu'elle croyait révolues.
   
Les craintes d'une nouvelle guerre des oligarques se sont matérialisées quand des hommes armés et encagoulés se sont introduits en fin de semaine dernière dans les locaux à Kiev de deux sociétés publiques, dont le contrôle était jusqu'à présent assuré par des proches du milliardaire et gouverneur, depuis mars 2014, de la région de Dnipropetrovsk, frontalière de la zone de guerre dans l'est de l'Ukraine, Igor Kolomoïski (ayant la nationalité israélienne aussi, NdT).
   
Mais l'origine de cette confrontation au sein du pouvoir remonte au 19 mars, quand le Parlement vote dans la douleur une loi qui visait à modifier la composition des conseils d'administration des entreprises publiques afin d'y réduire le contrôle exercé par les actionnaires minoritaires.
   
Dès le lendemain, Igor Kolomoïski se rend au siège d'une des sociétés concernées par la nouvelle loi, UkrTransNafta, qui gère le réseau d'oléoducs de l'Ukraine et est détenue à 100% par l'Etat.
Son but : empêcher le remplacement annoncé par les autorités de son directeur de longue date, Olexandre Lazorko.
   
Le milliardaire, gouverneur d'une région qui échappe aux sirènes du séparatisme prorusse, explique alors devant les médias s'être rendu sur place de crainte d'un "raid" contre la société....
   
Lui-même a été accusé à de nombreuses reprises d'avoir eu recours à cette "méthode" pour bâtir son empire, qui aujourd'hui s'étend du secteur bancaire à la métallurgie en passant par l'aviation et les médias.
   
Dimanche, alors que les hommes armés ont quitté les locaux d'UkrTransNafta malgré la confirmation du départ de son directeur, des personnes armées et encagoulées s'introduisent dans les locaux d'une autre société : UkrNafta, la compagnie nationale du pétrole, détenue à 50% plus une action par l'Etat.
 Des grilles métalliques y sont alors installées en guise de barricades.
Selon des médias ukrainiens, Igor Kolomoïski est à l'intérieur.
   
Le président Petro Porochenko, lui-même considéré comme un oligarque avec une fortune évaluée à 1,3 milliard de dollars par Forbes en 2014, hausse le ton.
"Chez nous, aucun gouverneur ne peut disposer de forces armées", s'exclame-t-il lundi. Le lendemain, les hommes armés quittent le siège d'UkrNafta, selon le service de presse de la société joint par l'AFP.
   
  

 'S'il veut la guerre, il y aura la guerre'

Même si les circonstances entourant cette crise restent encore floues, des experts estiment qu'elle a montré la montée en puissance d'Igor Kolomoïski, dont la fortune est évaluée à 1,3 milliards de dollars dans un classement Forbes de 2015.
   
L'oligarque, qui est une des figures de proue de la communauté juive en Ukraine, a renforcé son pouvoir dans sa région natale de Dnipropetrovsk, mais aussi dans l'ouest de l'Ukraine pour son opposition affichée au président russe Vladimir Poutine et son soutien aux forces loyalistes dans le conflit contre les rebelles prorusses, qui a fait plus de 6.000 morts en onze mois.
   
Beaucoup considèrent même que c'est grâce à lui que la rébellion séparatiste (indépendantist NdT)  ne s'est pas davantage propagée.
   
L'homme d'affaires finance en effet plusieurs bataillons de volontaires et a annoncé l'an dernier une prime de 10.000 dollars pour chaque rebelle arrêté et remis aux autorités dans sa région. ( Il est soupçonné par les  indépendantistes pro russes de financer aussi les groupuscules ukrainiens de l'extrême droite, NdT)

Il a aussi proposé d'ériger un mur de 2.000 km avec des barbelés à la frontière avec la Russie.
   
Le conflit avec Igor Kolomoïski intervient dans un contexte de grave crise économique. Le Fonds monétaire international a approuvé en mars un programme d'aide de 17,5 milliards de dollars à l'Ukraine, mais seulement en échange de réformes, qui visent à terme à lutter contre la corruption et à restructurer les entreprises publiques.
   
"Porochenko comprend la nécessité de ces changements. Mais Kolomoïski pas encore", estime l'analyste Volodymir Fessenko, interrogé par l'AFP.
"C'est un conflit entre un oligarque et le gouvernement dont la suite dépendra uniquement de ce que voudra Kolomoïski. S'il veut la guerre, il y aura la guerre", conclut-il.

 

Avec AFP