30-04-2024 04:55 AM Jerusalem Timing

La NSA écoutait Merkel sur la dette grecque

La NSA écoutait Merkel sur la dette grecque

Tout cela n’est pas sans rappeler la situation actuelle: Berlin ne sait pas non plus que faire et attend tout simplement les résultats du référendum grec.

Le scandale suscité par l'affaire d'espionnage des présidents français par la National Security Agency des Etats-Unis a franchi le Rhin: WikiLeaks a publié de nouveaux documents secrets indiquant que le renseignement US vouait un intérêt particulier à la politique monétaire et commerciale de Berlin.


Certains textes confirment l'espionnage de la chancelière Angela Merkel et de son entourage, alors que d'autres attestent la curiosité démesurée des services américains pour le sommet du pouvoir allemand, écrit vendredi le quotidien Nezavissimaïa gazeta. La liste des écoutes contient des ministres fédéraux, leurs adjoints et d'autres hauts fonctionnaires: il s'agit au total de 69 "sélecteurs", comme les agents appellent les personnes et objets d'intérêt. Le Service fédéral de renseignement (BND) est également impliqué: il aurait pu espionner des hommes politiques et des entreprises européens pour le compte de la NSA.

Ces documents couvrent notamment la période du 2010 au 2012, durant laquelle la crise de la dette grecque s'aggravait rapidement. Les révélations de WikiLeaks, vérifiées avant leur publication par les chaînes NDR et WDR et le quotidien Sueddeutsche Zeitung, indiquent que la NSA ne ménageait pas ses efforts pour découvrir les plans de Berlin.

Les médias allemands ont notamment publié les extraits de déclarations enregistrées d'Angela Merkel du 11 octobre 2011. La chancelière y reconnaît son indécision totale. Une note secrète décrit ses préoccupations: selon elle, même une réduction supplémentaire de la dette ne serait pas en mesure de résoudre le problème, car Athènes serait incapable de rembourser le reste.

Tout cela n'est pas sans rappeler la situation actuelle: Berlin ne sait pas non plus que faire et attend tout simplement les résultats du référendum grec. Qui plus est, ces écoutes de la NSA remettent en question la décision récente du procureur général concernant la suspension de l'enquête — faute de preuves — sur l'espionnage du téléphone de Mme Merkel.

L'espionnage mené par les USA agite les milieux politiques et l'opinion publique en Allemagne depuis plus de deux ans. Les sondages indiquent que cela nourrit une attitude négative des Allemands envers les Etats-Unis. Toutes les tentatives du gouvernement Merkel de tourner cette page, en soulignant sa confiance envers son allié et partenaire d'outre-Atlantique, n'ont pour le moment porté aucun fruit.

Les nouveaux textes publiés contiennent beaucoup de détails surprenants qui laissent penser que les écoutes touchaient non seulement le portable d'Angela Merkel, mais aussi d'autres téléphones de la chancelière. Parmi 69 numéros concernés, près de la moitié appartient au ministère de l'Economie.

La liste comprend également des numéros du ministère des Finances et de la Banque centrale européenne. Par ailleurs, l'ancien numéro de l'ex-ministre des Finances Oskar Lafontaine reste toujours actif et permet désormais de joindre la permanence du ministre des Finances Wolfgang Schäeuble.

Patrick Sensburg, président du comité parlementaire allemand chargé de l'enquête sur les activités de la NSA, a souligné hier que les révélations de WikiLeaks exigeaient des explications de la part des USA. Mais c'est ici que se trouve le talon d'Achille de toutes les enquêtes allemandes: Washington et ses services de renseignement refusent catégoriquement d'en parler. Et la liste des "sélecteurs" sur la base de laquelle la BND rendait des services d'espionnage aux collègues américains, reste toujours inaccessible aux députés allemands.