Les sales besognes des Américains ne sont plus un secret pour personne
Une épidémie de cancers et autres maladies foudroyantes atteignent les chefs d'Etat anti-impérialistes en Amérique Latine, et ailleurs. Hasard ou assassinats politiques camouflés?
Il n'y a pas si longtemps, à Amman en Jordanie, le dirigeant palestinien Khaled Mechaal avait échappé à la mort, suite à un attentat israélien sous forme d'une attaque insolite à l'arme biologique
Des laboratoires sophistiqués s'attèlent en ce moment pour vérifier au sujet du président Yasser Arafat s'il s'agit d'une mort provoquée.
D'autres exemples, en particulier en Amérique Centrale et du Sud, relèveraient de l'assassinat politique camouflé. La mort du président Hugo Chavez s'inscrit dans le même ordre de soupçon. De tels actes chercheraient à faire créditer l'assassinat parfait ou crime insoupçonné.
A notre connaissance, jusqu'ici trois Etats, les USA, la Russie et Israël disposent de telles armes biologiques sophistiquées à usage d'armes de guerre contre des cibles humaines bien individualisées.
Selon les révélations de Wikileaks, deux ans auparavant, Hilary Clinton avait expédié un message top secret à l'ambassadeur des USA à Buenos Aires lui enjoignant d'entreprendre d'urgence des recherches au sujet de la santé de la présidente Cristina Fernández de Kirchner. Il s'agissait d'information pointue sur ses habitudes, ses goûts, sa capacité à faire face au stress et surtout une question bien précise: prend-t-elle un médicament et lequel?
Il est tout de même bizarre, dans des conditions de paix, que le chef du Département d'Etat à Washington se préoccupe à ce point pour fureter en secret dans la vie intime et pour chercher à connaitre autant de détails au sujet de la santé d'un chef d'Etat.
On relève jusqu'ici, comme par étrange coïncidence, un nombre appréciable d'accidents graves de santé quasi sans prodrome, de nature cancéreuse maligne le plus souvent ou à évolution rapide (infarctus) suivis de décès ou parfois de rémission dont la cible en fut des chefs d'Etat ou des personnalités politiques gênantes selon l'optique de certains pouvoirs dominants.
Exemples en série troublants
Pour ce qui est de la présidente de l'Argentine, Cristina Fernández de Kirchner, qui avait joui jusque-là d'une excellente santé, une tumeur de la glande tyroïde lui fut soudainement diagnostiquée. Elle fut opérée et, fort heureusement, les médecins ont extirpé une tumeur de nature bénigne.
Auparavant, son époux, l'ancien président Nestor Kirchner qui partait favori pour une nouvelle candidature présidentielle, avait pris son café habituel à un hôtel de la Patagonie.
Quelques heures plus tard, dans la nuit, il fut pris d'un étrange malaise et mourut terrassé par un infarctus fulminant.
La même situation s'est produite chez Handal, chef guerrillero, éminent leader de la gauche du Salvador, membre du Frente Farabundo Martí para la Liberación Nacional, candidat à la présidentielle de 2004; et de façon identique pour la bouillonnante militante chavista, Lina Ron à Caracas, au Vénézuela.
Au cours de cette même période, à la manière d'un château de cartes, toujours dans les milieux de la gauche révolutionnaire, le président du Paraguay, Fernando Lugo, fut atteint d'un cancer lymphatique malin.
Il fut traité pendant une longue période au Brésil et tout semble indiquer pour l'instant une évolution favorable.
La liste fatidique s'allonge lorsque l'actuelle présidente du Brésil, Dilma Rousseff, fut à son tour atteinte d'un cancer durant sa campagne électorale. Dilma fut d'abord membre éminent de la guérilla urbaine de libération nationale durant les années sanglantes de la dictature militaire fortement appuyée par le gouvernement des USA. Elle fut arrêtée, torturée et emprisonnée dans des conditions cauchemardesques.
A son tour, juste à la suite de la passation de pouvoir entre Dilma et le président sortant Lula da Silva – chaleureusement acclamé et futur candidat présumé en fin de mandat de Dilma –, ce dernier fut atteint de cancer actuellement en voie de rémission.
C'est dans ce même contexte que le président du Venezuela, Hugo Chavez, fut soudain pris par des douleurs au niveau du bassin.
Le diagnostic médical tomba encore une fois avec la même tonalité dramatique amplifiant de façon incongrue et apparemment insolite l'attaque camouflée contre le camp des novateurs du changement social en Amérique du Sud qui contrarie fortement l'administration à Washington laquelle ne s'en cache pas, loin de là. De plus, Washington ne fait pas cavalier seul, le gouvernement d'Israël a vite fait de lui emboiter le pas, déployant par ses proxys une campagne hargneuse contre Chavez, même au lendemain de sa mort.
Chavez était à deux années de la fin de son mandat et allait se présenter à nouveau, plébiscité par une large majorité du peuple en vue des élections présidentielles d'octobre 2012. Ce furent deux longues années d'une lutte éprouvante contre une tumeur maligne avec non moins de quatre rechutes, dont la dernière lui fut fatale.
Hasard ou attentat?
Un observateur aussi naïf soit-il ne peut s'empêcher de relever d'étranges coïncidences dans cette série d'accidents graves de santé qui atteint de façon spécifique, presque caricaturale, des chefs d'Etat issus de mouvements politiques de la nouvelle gauche révolutionnaire de l'hémisphère sud américain, agents historiques d'une nouvelle culture de l'ESPOIR. De fait, ils antagonisent nécessairement la mainmise de ce qui fut pendant des décennies l'arrière-boutique du puissant voisin du nord.
D'une manière ou d'une autre, ces dirigeants ont subi des pressions allant au coup d'Etat plus ou moins masqué (Chavez, Fernando Lugo, Evo Morales, Rafael Correa – ces deux derniers ont jusqu'ici échappé à «l'épidémie cancéreuse»!). Suivant son sens piquant de l'humour, Chavez avait même invité ses malheureux collègues à former un «club» des chefs d'Etat atteints de cancer... A plusieurs reprises, il avait dénoncé ses ennemis, leurs tentatives avortées d'attentats ouverts et d'autres ainsi camouflés sous l'apparence de maladies cancéreuses et de crises cardiaques fatales.
L'opinion publique des pays d'Amérique du Sud, Centrale et des Caraïbes ne font aucun mystère de la thèse des attentats bizarres dont la cible systématique vise ces chefs d'Etat. Plusieurs travaux** sont du domaine public qui étayent une information copieuse au sujet des recherches biologiques et l'usage secret d'un armement sophistiqué létal par les services de la CIA et du Pentagone, ayant pour objectif l'assassinat sélectif «parfait» sans trace évidente du crime.
Quelques années auparavant, Fidel Castro, de retour d'un voyage en Argentine, fut soudain pris par un malaise en plein vol, suivi d'une hémorragie intestinale qui aurait bien pu lui être fatale. Il raconte lui-même ce transit par le couloir de la mort et se déclare ressuscité par miracle et grâce à la grande expertise des médecins cubains.
Rappelons ici l'odyssée fatale du président Yasser Arafat pris en otage à Ramallah sous le feu nourri à l'arme lourde de l'armée israélienne contre sa résidence pendant deux longes années sans qu'il se rende. Rappelons tout aussi bien le mot lancé alors sous forme insidieuse par Sharon qui s'était promis de le «déloger» à sa manière. Arafat fut empoisonné et actuellement des experts internationaux sont en train de rechercher sur des échantillons recueillis sur son cadavre la trace du produit létal du crime.
Quant à Fidel, les multiples tentatives d'assassinat contre sa personne toutes reconnues officiellement par ses ennemis du nord, dépassent les 600 au point d'être dûment consignées dans les annales de Guinness! Parmi les moyens les plus sophistiqués, là aussi on compte également l'arme biologique. Il avait même mis en garde Chavez à ce sujet.
A propos de l'élimination dans l'impunité de chefs d'Etat jugés indésirables par Washington, plusieurs moyens ont été utilisés. Sans remonter aussi loin avec le renversement du président Arbens au Guatemala, rappelons les moyens brutaux de l'attentat ou du coup d'Etat, comme le renversement sanglant au Chili du président Salvador Allende; celui à peine voilé au Honduras contre le président Manuel Zelaya, sans oublier les coups manqués contre Evo Morales en Bolivie et Rafael Correa en Equateur.
A moins qu'il ne s'agisse d'un autre camouflage comme les accidents d'avion où périrent le président du Panama Omar Torrijos –à la suite de la nationalisation du Canal – et le président progressiste et anti-apartheid du Mozambique, Samora Machel. En fait, rien de fortuit. D'autres forfaits ont eu pour décor le village de La Higuera, en Bolivie, où le Che Guevara blessé, une fois fait prisonnier, fut assassiné de sang froid à bout portant; et jusqu'à nos frontières l'horrible lynchage de Mouammar Kadhafi traqué par les forces de l'Otan.
Au cours des années, les secrets qui entourent l'élimination physique de tant de chefs d'Etats et de leaders de peuples du Grand Sud – y compris Lumumba et Félix Moumié ¬–, ceux-là même qui ont osé lutter au risque de leur vie contre les forces impériales et pour atteindre une véritable indépendance et une souveraineté nationale, ces secrets tôt ou tard ont fini par être ventilés par Wikileaks ou simplement par le biais d'une loi fédérale qui oblige aux USA à déclassifier des secrets d'Etat. Il s'agit alors de l'histoire des peuples et non plus celle des vainqueurs du jour.
Pour la grande majorité du peuple vénézuélien et d'autres peuples encore dans le monde, la disparition tragique du président Hugo Chavez à la suite d'une maladie cancéreuse suspecte d'induction criminelle, est un véritable tsunami dévastateur.
D'une part, il continuera tout comme le Che à hanter ses ennemis dans la stricte mesure où il avait réussi à véritablement incarner les objectifs sociaux du changement, ses idées étant reprises et projetées aux quatre coins du continent sinon au-delà. D'autre part, le voile de martyr qui entoure sa mort transforme déjà sa vie en destin. En cela, il aura vaincu une bataille de plus et non des moindres contre ses ennemis par-delà sa mort.
Par Rashid Sherif : Médecin psychiatre systémicien.