Et le peuple se prépare pour les décevoir lors des élections présidentielles du 14 avril prochain.
Peu de temps après la mort du leader de la Révolution bolivarienne, le président du Venezuela, Hugo Chávez, certains medias américains ont lancé une campagne de calomnie contre lui, le décrivant comme « un diviseur » et «un autoritaire». Certains ont même ouvertement manifesté leur souhait de voir s’effondrer bientôt le projet politique de Chavez.
Cependant, comme tout le monde pouvait le voir, ce sont les gouvernements américain et canadien, et non Chavez, qui sont isolés sur le continent. Tous les présidents des Etats américains se sont rendus à Caracas pour assister aux funérailles de Chavez et lui rendre un dernier hommage. Beaucoup d'entre eux ont réaffirmé leur soutien aux idéaux de justice sociale et de développement régional ainsi qu’au principe de l'indépendance que le leader vénézuélien a soutenus pendant toute sa vie. D’innombrables messages de sympathie et de solidarité sont arrivés à Caracas en provenance des différents pays latino-américains, depuis Mexique jusque de l'Argentine.
Les USA à part
Plusieurs dirigeants latino-américains ont déclaré que même en l'absence du chef de la révolution bolivarienne, ils continueront à travailler ensemble pour développer ses idéaux sur l'indépendance latino-américaine et de l'intégration, qui ont fait leur preuve. Même le président de la Colombie, -un ancien ennemi du Venezuela pendant le mandat de l'ancien président Alvaro Uribe-, José Manuel Santos, a salué l'engagement du président Hugo Chavez et du gouvernement vénézuélien au processus de paix dans son pays.
Dans un contraste frappant avec les hommages chaleureux en provenance de de toute l'Amérique latine, les déclarations du président américain Barack Obama, tout en étant dans la ligne des positions des administrations américaines successives, elles ont été perçues comme méprisantes pour Chávez et le peuple venezuelien. Evoquant «un nouveau chapitre de l'histoire du Venezuela", et "que même si le Venezuela est un pays dictatorial les Etats-Unis restent déterminés dans leurs politiques qui favorisent les principes démocratiques, l'État de droit et le respect des droits de l'homme", son omission d’offrir au peuple vénézuélien ses condoléances étaient particulièrement offensantes.
La démocratie vénézuélienne : la mieux notée
En fait, Obama devrait savoir mieux que les Vénézuéliens, selon les sondages, ont accordé à leur propre démocratie la note de 7 sur 10, tandis que la moyenne latino-américaine est de 5,8.
Alors que 81% des électeurs vénézuéliens ont participé au dernier scrutin électoral présidentiel au Venezuela en 2012, ce sont seulement 57,5% des Américains qui ont participé au leur, la même année.
D'autre part, les propos de la porte-parole du département d'Etat, Victoria Nuland, selon laquelle son gouvernement est en attente d'une décision prise par les autorités vénézuéliennes au sujet de la «transition», veut dire pour les Vénézuéliens que Washington veut qu’ils fassent marche arrière et éliminent leur indépendance et leurs acquis sociaux. Dans un communiqué, le ministère vénézuélien des Affaires étrangères a décrit « les remarques insolentes et irrespectueuses » de Nuland comme «une nouvelle ingérence américaine dans les affaires intérieures du Venezuela."
Toutes ces remarques exprimées par de hauts responsables américains ont suscité l'indignation profonde au sein des vénézuéliens, qui ont accompagné leur président avec affection et tristesse lors des funérailles. Le dénigrement d'Obama à Chavez constitue une offense pour la majorité d’entre eux, aussi bien pour ceux qui ont voté pour sa réélection le 7 Octobre, que pour les autres.
Ce n'est pas la première fois cependant que Barack Obama se trouve isolé.
En l’an 2012, au Sommet des Amériques de l'OEA à Carthagène, les États-Unis et le Canada ont été sévèrement critiqués en particulier pour leur refus de permettre à Cuba d'y assister. C'était un contraste frappant avec le précédent sommet en 2009, lorsque les dirigeants latino-américains - y compris Chavez – avaient accueilli chaleureusement Obama parce qu'ils pensaient, à tort hélas, qu'il pourrait ouvrir une nouvelle ère dans l'histoire des relations américano-latino-américaines.
Les manigances des USA
Peu de temps après que le décès de Chavez, le gouvernement vénézuélien a expulsé l'attaché militaire de l’ambassade américaine à Caracas et son adjoint, affirmant qu'ils avaient fait des «contacts inappropriés» avec des officiers militaires vénézuéliens pour tenter de déstabiliser le pays. Les Etats-Unis ont riposté en expulsant le deuxième secrétaire à l'ambassade vénézuélienne à Washington et un autre diplomate. Enfin, le gouvernement vénézuélien a ordonné une enquête pour savoir si le cancer de Chavez a été induit par les ennemis de la révolution bolivarienne, en particulier l'administration américaine.
Pour sa part, le président par intérim Nicolas Maduro a promis de suivre le chemin de Chavez et de faire face à "l'Empire et à ses tentatives d'empêcher le Venezuela et les pays latino-américains de consolider leur indépendance".
Il a récemment indiqué que «certaines personnes dans le Pentagone et la CIA" conspirent à l'approche des élections dans le pays sud-américain. "Nous avons des témoignages et des directs, des informations de première main", a dit Maduro.
Le trio maléfique de la Maison blanche
Maduro a accusé explicitement un groupe de fonctionnaires américains, y compris Roger Noriega, Otto Reich et John Negroponte, d’œuvrer pour déstabiliser le Venezuela. Peu de temps après, Maduro a ajouté que le Venezuela avait détecté un complot tramé dans ces cercles pour tuer son adversaire aux élections Henrique Capriles. Le but étant de semer chaos dans le pays. Maduro n'a pas donné plus de détails.
Otto Reich a été ambassadeur au Venezuela de 1986 à 1989 et secrétaire d'État aux Affaires de l’hémisphère occidental dans l'administration de George W. Bush. En 2002, il a été profondément impliqué dans le coup d'Etat tenté contre Chavez au Venezuela. Il était un ami proche de l’homme d’affaire de la droite vénézuélienne, l’avocat Robert Carmona-Borjas, qui a fui le pays latino-américain peu après l'échec du coup d'Etat dans lequel il a été également fortement impliqué.
La seconde personnalité dénoncée par Maduro est Robert Noriega, le représentant permanent des États-Unis auprès de l'Organisation des États américains. En 2002, il avait également soutenu le coup d’état avorté.
Après le coup d'Etat militaire au Honduras en 2009, Noriega est devenu un lobbyiste pour le nouveau régime.
Quant à John Negroponte, qui était directeur du renseignement national, il a participé activement à la guerre contre le Nicaragua sandiniste dans les années 80.
Il est intéressant de souligner que ces trois personnes ont écrit de nombreux articles dans lesquels ils ont appelé l'administration américaine à prendre une ligne dure contre le Venezuela.
Tous ces événements montrent que l'administration Obama continue de cumuler les mêmes échecs dans sa politique de guerre froide amorcée par George W. Bush à l’encontre de l'Amérique latine.
Washington maintient la militarisation d’une grande partie du continent et dépense des sommes énormes afin de mettre en place des gouvernements dociles, d’entrainer des armées et des milices et de déployer ses troupes dans de nouvelles bases militaires, comme dans le Guatemala, le Panama, le Belize, le Honduras et la République dominicaine.
Il est intéressant de souligner que les discours d'Obama et Nuland sont en affinité avec la rhétorique politique de la droite vénézuélienne, dans sa corruption et son agressivité. Ce qui montre à nouveau les liens de subordination de celle-ci à la politique américaine.
Toujours l’oligarchie
L'oligarchie vénézuélienne a toujours aidé les Etats-Unis à assoir son agenda néolibéral au Venezuela, par le biais du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, comme dans le reste de l'Amérique latine.
En 1989, le président vénézuélien Carlos Andres Perez a été amené à mettre à exécution les politiques néolibérales du «Consensus de Washington» : dont entre autre les privatisations et coupes des allocations sociales, la suspension des subventions pour le pétrole et la hausse des prix de l'essence et des transports publics.
Les protestations ont éclaté dans les banlieues de Caracas et se sont vite répandus dans la capitale même. Carlos Andrés Perez a alors interdit le droit constitutionnel de manifester et ordonné un déploiement militaire au cours duquel 3000 personnes ont été tuées. Dans l'ensemble, sous la présidence de Perez, le niveau de vie a baissé pour tous, sauf pour les plus riches.
Le plus heureux de la planète
En revanche, le président Chávez a permis au peuple vénézuélien de sortir de la pauvreté. Il a utilisé les revenus pétroliers du pays pour fournir des fonds aux programmes d'alphabétisation. De cette façon, plus de gens ont pu aller à l'université. Le gouvernement vénézuélien a étendu l'accès aux soins dentaires et à la santé. Il a réalisé une réforme foncière et de logement, subventionné les supermarchés et des milliers de coopératives de travail. Au Venezuela, où une grande partie de la population vivait en dessous du seuil de pauvreté, ces programmes ont eu un impact énorme.
De nos jours, l'écart du Venezuela entre riches et pauvres est la moitié de ce qu'il est aux États-Unis.
Le Venezuela a été qualifié "le cinquième pays le plus heureux dans le monde" par l'institut Gallup.
Avec l’aide de son peuple, il a été aussi capable de libérer le pays de l'emprise des États-Unis et fut le promoteur d'un soulèvement latino-américain contre la domination américaine. Chavez a ouvert la voie à la création de la Banque du Sud dans le but de financer des projets dans toute l'Amérique latine et de permettre aux autres nations de se libérer du joug du FMI et de la Banque mondiale.
A travers les conseils locaux des usines, le Venezuela a réalisé l'une des expériences les plus réussies en matière de démocratie directe et de contrôle ouvrier dans le monde. Il est certes un pays beaucoup plus démocratique que les Etats-Unis eux-mêmes, où les gens pauvres et la classe moyenne sont exclus de la vie politique et de la prise de décision, et la règle très riche du pays grâce à une démocratie dirigée et formelle qui assure qu'ils bénéficieront le plus de l'économie.
« Chavez somos todos »
En ce sens, quoique Chavez ait été un personnage clé dans la création et le développement de ces programmes et initiatives, c’est le peuple vénézuélien qui est le plus apte à les maintenir vivantes après sa mort. Le slogan, «Chavez somos todos », « Nous sommes tous Chavez », n’est certes pas de simples mots, mais il exprime la conscience des gens, qui veulent que ce processus se poursuive.
Dernièrement, un Vénézuélien a dit à un média étranger: " Je dis aux Américains et à l'opposition qui croient qu’avec la disparition de Chavez, la révolution va disparaitre aussi, et l'ancien régime sera de nouveau imposé, nous allons leur montrer qu’ils ont tort ! "
Yusuf Fernandez, journaliste espagnol, et rédacteur du site hispanophone d'AlManar