Constat : l’AFP disculpe le front al-Nosra des accusations de prendre pour cible les civils en Syrie!
La déclaration d'allégeance à Al-Qaïda du Front Al-Nosra, très actif dans la rébellion contre le régime de Bachar al-Assad, pourrait nuire à ses intérêts, voire saper le soutien dont il jouit sur le terrain en Syrie, jugent des analystes.
Dans la journée de mercredi, Al-Nosra, un groupe jihadiste qui compte dans ses rangs des Syriens mais aussi de nombreux étrangers, s'est démarqué de l'annonce de parrainage faite la veille par la branche irakienne d'Al-Qaïda.
Abou Mohammed al-Joulani, chef d'Al-Nosra a dit "prêter allégeance à cheikh Ayman al-Zawahiri", le numéro un du réseau extrémiste, tout en affirmant ne pas avoir été consulté par l'Etat islamique d'Irak (ISI) pour savoir s'il acceptait de faire cause commune avec lui.
Mais son alliance avec le centre de gravité d'Al-Qaïda pourrait faire fondre le crédit dont Al-Nosra jouit au sein de la population syrienne.
"Il a récolté un soutien non négligeable parce qu'il peut se vanter d'obtenir des résultats et, surtout, il a su éviter de s'aliéner son environnement immédiat", la population civile, note Peter Harling, spécialiste de la Syrie à l'International Crisis Group.
"Sa déclaration d'allégeance (à Al-Qaïda) va se retourner contre lui, car il s'associe à une entité qui est étrangère à la culture syrienne et qui est perçue comme ayant échoué dans ses entreprises précédentes", nuance-t-il.
Cette alliance met, de plus, en évidence "qu'il fait partie d'Al-Qaïda", renchérit Cole Bunzel, doctorant à l'université de Princeton aux Etats-Unis. "Le Front Al-Nosra (...) ne peut plus dissimuler ce lien".
Et en prêtant allégeance à Ayman al-Zawahiri, Al-Nosra permet au régime de Bachar al-Assad d'affirmer encore plus résolument qu'il est en lutte contre des "terroristes" dont le but est d'instaurer un Etat islamique.
La déclaration d'Abou Mohammed al-Joulani n'est cependant pas une surprise, elle officialise un état de fait que Washington soupçonnait déjà depuis plusieurs mois.
Al-Nosra, dont la création avait été annoncée en janvier 2012, avait rejoint Al-Qaïda en Irak sur la liste américaine des organisations terroristes étrangères en décembre dernier.
Pour Mathieu Guidère, professeur d'islamologie et spécialiste des groupes jihadistes à l'université de Toulouse-Le Mirail, c'est d'ailleurs la décision américaine qui a "précipité le Front Al-Nosra dans les bras d'Al-Qaïda. A partir de ce moment-là, ils se sont dit qu'ils étaient condamnés et qu'ils ne pourraient de toute façon jamais participer au processus politique."
"C'est une erreur de stratégie qui va leur coûter très cher", estime-t-il.
Mais Peter Harling minimise l'importance des liens qui unissent Al-Nosra et Al-Qaïda en Irak par-delà la frontière irako-syrienne, tout en rappelant que de nombreux insurgés qui ont fait leurs armes en Irak ont eu un rôle essentiel dans l'avènement du Front Al-Nosra.
Les deux groupes se sont fait connaître par leur recours aux attentats suicide et aux voitures piégées. Mais, soulignent les analystes, Al-Nosra a su apprendre des erreurs d'Al-Qaïda en Irak, en assurant par exemple ne s'attaquer qu'aux soldats et responsables du régime de Bachar al-Assad.
Des civils périssent régulièrement dans ces attaques. Mais, à l'inverse, Al-Qaïda en Irak n'hésite pas à délibérément viser la population et s'est rapidement aliéné la population irakienne.
AFP