C’est sa principale préoccupation, au détriment de la cause principale de la nation arabo-islamique, celle de la lutte contre Israël et de la libération d’alQods.
Il y a neuf siècles, le célèbre commandant Salahedine elAyoubi a détruit tout le patrimoine de l’Etat Fatimide, son régime, son idéologie mais aussi sa doctrine, considérée comme une branche du chiisme.
De nos jours, « la question du chiisme » en Egypte retourne en force, grace au courant salafiste du pays qui en fait sa principale préoccupation, négligeant la cause principale de la nation arabo-islamique, celle de la lutte contre Israël et de la libération d’alQods.
A l’époque de l’Etat Fatimide (969-1171), l’Egypte n’avait fait aucune distinction entre chiites et sunnites. C’est seulement après la révolution égyptienne que des slogans anti-chiites ont été scandés dans ce pays, révélant ainsi de grandes lacunes dans la conscience collective égyptienne.
Une fois de plus, des appels au retour de Salahedine ont été lancés pour « purifier l’Egypte de la bande chiite » !
Voilà comment les foules de salafistes manifestant devant le domicile du chargé d’affaires iranien Mojtaba Amani ont exprimé clairement leurs demandes, accusant « le président barbu Mohammad Morsi, qui mémorise le Saint Coran, de permettre aux chiites d’entrer en Egypte ».
Bien que la plus grande université religieuse sunnite d’alAzhar se trouve en Egypte, les Egyptiens ne faisaient pas de distinction entre sunnisme et chiisme. Pour eux, les chiites sont des musulmans de doctrine différente. AlAzhar a joué toujours le rôle de rapprochement entre les différentes écoles islamiques. En 1947, un centre de rapprochement entre les écoles islamiques a été formé sous le parrainage d’alAzhar. Dans les années 60, le cheikh d’alAzhar Mahmoud Shaltout a publié une fatwa qui autorise le culte selon la doctrine jaafarie (confession chiite).
Donc l’Etat égyptien n’a jamais adopté un discours confessionnel dans une société tolérante, mais ce sont la politique et les conflits régionaux qui furent derrière la formation d’un nouvel état d'esprit basé sur la nette distinction entre les confessions. C’est ainsi que Jamal Abdel Nasser s’est engagé dans un conflit régional contre le Chah d’Iran, sans impliquer alAzhar dans ce conflit et sans lui conférer un caractère confessionnel entre sunnites et chiites.
Malgré tout, la victoire de la révolution islamique en Iran (1979) a soulevé une vague d’enthousiasme dans les rangs des oppositions islamiques et celle de gauche à travers le monde arabe, mais le régime de Sadate s’est opposé à cette révolution, et a continué d’accueillir son ami renversé le Chah d’Iran. Cette politique fut derrière la rupture de relations entre l’Iran et l’Egypte.
Dans la même année, les autorités égyptiennes ont fermé l’association chiite des ahl-Beit (la famille du prophète) et ont interdit toute forme de rassemblements chiites en Egypte. Par ailleurs, ce même Etat a permis au courant salafiste de s’intégrer et d’agir librement dans la société. Ceci a constitué les prémices de changements radicaux en Egypte et l’émergence de tensions confessionnelles entre musulmans et coptes.
L’esprit salafiste consiste à apostasier et à rejeter l’Autre au prétexte "de purifier la croyance des musulmans". Bien que la question chiite n’ait jamais été présente en force dans le discours salafiste, elle n’était pas mise à l’écart non plus. Par exemple, au lendemain de la victoire du Hezbollah sur Israël en 2006, alors que les Egyptiens ont salué cet exploit historique, les cheikhs salafistes se sont attelés à " mettre en garde les sunnites d’Egypte contre tout engouement pour la victoire des chiites égarés".
C’est alors que des enregistrements sonores refusant de reconnaitre cette victoire sont apparus sur internet, et des colloques mettant en garde contre « l’expansion chiite » ont été organisés. Le tout a coïncidé avec un discours officiel égyptien impliqué dans la guerre stratégique contre l’Iran et ses alliés, et allié avec les pays du Golfe, parrains du salafisme dans le monde arabe.
La polémique s’est envenimée après la révolution égyptienne, entre les partisans d’un rapprochement avec l’Iran et les salafistes qui ont mené une campagne contre les chiites, les accusant d’insulter les compagnons et les femmes du prophète et de répandre la confession chiite en Egypte.
Avec l’avènement des Frères musulmans au pouvoir, la décision de rapprochement avec l’Iran fut prise. Cette confrérie n’est pas de nature confessionnelle et reflète les caractéristiques religieuses de la société égyptienne.
Mais le conflit né avec les salafistes dans la course à la popularité dans la société depuis les années 70, a contraint les Frères musulmans à adopter de plus en plus l’esprit salafiste. Actuellement, le pouvoir des Frères musulmans dirige un conflit contre les coptes, alors que les salafistes ont pris à leur charge de préserver l’identité sunnite de l’Egypte en provoquant la population contre les chiites !
De son côté, le doyen de la faculté des études islamiques à alAzhar Mohammad Jomaa a rejeté l’ancienne fatwa du cheikh Shaltout et a prohibé de pratiquer le culte selon la doctrine « qui accepte d’insulter les compagnons du prophète, de falsifier le Coran, et de porter atteinte à Aïcha », qualifiant les adeptes de cette doctrine d’apostats » !