Vague de perquisitions et arrestations dans les milieux salafistes.
La Belgique est passée mardi à l'offensive contre les filières de recrutement de combattants pour la Syrie en procédant à plusieurs dizaines de perquisitions et à des interpellations dans les milieux salafistes, alors que les cas de jeunes Belges rejoignant les rebelles se multiplient.
Quarante-huit perquisitions ont été menées à l'aube, principalement dans les régions d'Anvers et de Bruxelles, a indiqué le parquet fédéral.
Six personnes ont été interpellées et présentées à un juge d'instruction, qui doit décider de les placer ou non en détention préventive.
Le parquet a requis leur inculpation pour "participation à un groupe terroriste", punissable de 10 années de prison, a précisé un magistrat du parquet, Eric Van der Sypt.
Les enquêteurs ont aussi saisi des ordinateurs, des téléphones portables et plus de 30.000 euros, mais n'ont découvert ni arme, ni explosif.
Une enquête centrée sur Sharia4Belgium
Ce coup de filet est le fruit de plus d'une année d'enquête visant Sharia4Belgium, un groupuscule salafiste.
Sa figure de proue, Fouad Belkacem, qui purgeait une peine à domicile avec surveillance électronique après avoir été condamné pour "incitation à la haine raciale", fait partie des six suspects interpellés, tout comme un homme rentré blessé de Syrie.
Fouad Belkacem a été mis en examen dès mardi et placé en détention provisoire.
Son avocat a affirmé que son client contestait toute implication dans des activités terroristes et avoir enrôlé des jeunes pour les envoyer en Syrie.
Les enquêteurs ont acquis la conviction que ces salafistes, qui avaient pourtant annoncé la dissolution de leur groupe en octobre, ont organisé le recrutement et l'envoi en Syrie de 33 combattants, a dit mardi un responsable de la Police judiciaire d'Anvers, Stanny De Vlieger.
"L'instruction montre que les membres de Sharia4Belgium auraient rejoint en Syrie des groupes de combattants aux idées salafistes inspirées par Al-Qaïda et qu'ils participeraient à des combats et même à l'enlèvement et à l'exécution de ce qu'ils appellent des +mécréants+", a indiqué le parquet fédéral.
Partis sans crier gare
Cette vague d'arrestations intervient alors que le départ de volontaires pour la Syrie, qui touche aussi d'autres pays comme la France et les Pays-Bas, suscite une forte émotion en Belgique.
Les médias ont largement fait écho aux parcours de deux jeunes Anversois, Brian De Mulder (19 ans) et Jejoen Bontinck (18 ans), partis à l'insu de leurs proches au début de l'année. Le père de Jejoen Bontinck s'est même rendu en Syrie la semaine dernière pour tenter de le rapatrier, en vain.
L'émotion est d'autant plus vive que des volontaires partis de Belgique ont déjà trouvé la mort en Syrie.
Le dernier en date, un Français de 38 ans proche des milieux salafistes bruxellois, Raphaël Gendron, y a perdu la vie dimanche.
Les cas les plus préoccupants concernent des mineurs. Pendant les vacances de Pâques, début avril, deux jeunes de 16 ans scolarisés à Bruxelles auraient réussi à rejoindre la Syrie en passant par l'aéroport de Bruxelles sans être inquiétés.
Ces deux jeunes avaient "une scolarité exemplaire" et "personne n'avait repéré de signe avant-coureur", a affirmé mardi la direction de leur école.
Depuis plusieurs semaines, les autorités multiplient les initiatives pour endiguer les départs. Une adresse mail a été créée pour les familles concernées, et une "task force" rassemblant les services de sécurité du pays et les autorités locales a été mise sur pied en mars.
Le gouvernement entend examiner cette semaine la possibilité de renforcer les contrôles aux frontières et il souhaite intensifier la collaboration avec la Turquie, principal pays de transit.