Signe du mépris à la lutte du peuple bahreïni : la course du GP n’a pu être suspendue dans ce pays
L'opposition a intensifié ses protestations à l'approche du Grand Prix de Formule 1 de Bahreïn mais les autorités assurent avoir pris les mesures nécessaires pour que la course se déroule dans le calme ce week-end.
Les partis de l'opposition ont appelé à un grand rassemblement vendredi, jour des essais libres, alors qu'un groupe radical clandestin, le Collectif du 14 février, a demandé à ses partisans d'organiser le même jour des protestations sous le slogan "Volcan de colère".
"Nous ne sommes pas contre le GP de Formule 1 mais nous voulons faire entendre au monde nos revendications: nous voulons la démocratie, le respect des droits de l'Homme, un gouvernement issu d'élections", a déclaré à l'AFP Khalil Marzouk, un dirigeant d'Al-Wefaq, principale formation de l'opposition chiite.
Tout en se démarquant des violences qui émaillent les rassemblements du Collectif du 14 février, il a accusé les forces de sécurité de "réprimer le peuple comme si c'était son ennemi". "La violence engendre la violence", a-t-il insisté.
Mardi soir, de jeunes manifestants sont descendus dans les rues des villages chiites entourant Manama, au son des tambours et sous le slogan "Non à la +Formule du sang+", en allusion au Grand Prix.
Les manifestants, réunis à l'appel du Collectif du 14 février qui mobilise sur les réseaux sociaux, brandissaient comme chaque soir depuis une semaine des photos du grand argentier de la Formule 1, Bernie Ecclestone, barrées d'un grand X.
Certains d'entre eux ont bloqué des routes autour de la capitale avec des pneus enflammés. Sur une vidéo publiée sur internet, on voit des dizaines de jeunes masqués utilisant des bidons d'essence pour mettre le feu à des pneus sur un axe routier de Bilad al-Qadim, aux portes de Manama.
"Pas de problème de sécurité"
Mais les autorités ont assuré avoir pris les mesures nécessaires pour que ces incidents n'atteignent pas le circuit de Sakhir, au sud de Manama.
"Bahreïn est fin prêt pour accueillir le GP, il n'y a pas de problème de sécurité", a assuré à l'AFP mercredi la ministre d'Etat à l'Information, Samira Rajab, expliquant que les troubles nocturnes quotidiens n'étaient "que des agissements d'adolescents animés par des groupes à la solde de l'Iran".
La ministre, également porte-parole du gouvernement, a assuré que les grands hôtels allaient connaître "un taux d'occupation de 100%" lors de la course.
M. Ecclestone a lui aussi affirmé ne pas s'inquiéter outre mesure pour la compétition. "Je ne vois pas pourquoi ce Grand Prix ne sera pas" un succès, a-t-il déclaré à l'AFP.
Des barrages de contrôle ont été érigés aux principaux carrefours, en particulier sur les routes menant au circuit, ainsi que sur celles menant au centre financier de Manama, où le Collectif du 14 février a revendiqué dimanche l'incendie d'une voiture à l'aide de bonbonnes de gaz.
Les forces de sécurité ont en outre multiplié les arrestations de militants de l'opposition, pendant les manifestations ou lors de perquisitions à leur domicile. Selon M. Marzouk, "plus de cent personnes ont été arrêtées depuis le début du mois".
Bahreïn, petit royaume du Golfe régi par la dynastie des Khalifa depuis plus de deux siècles, est depuis 2011 le théâtre d’un mouvement de contestation populaire exigeant des réformes politiques.
Amnesty International a appelé mercredi le gouvernement bahreïni à prouver sa volonté d'utiliser le Grand Prix comme plate-forme de progrès et de réformes en libérant "tous les prisonniers d'opinion" et en laissant entrer "sans restriction" les membres d'ONG et les journalistes qui cherchent à faire le point sur la situation dans le pays à l'occasion de la compétition.
En 2011, le GP avait été annulé en raison de l'instabilité politique et l'édition 2012 avait été émaillée de manifestations qui n'avaient cependant pas perturbé le déroulement de la course.
La terreur se poursuit
Entretemps, les forces du régimes bahreïni poursuivent en toute impunité leur politique de terreur contre la population.
Dans la nuit de lundi à mardi, les forces du régime ont attaqué 17 maisons et semé la terreur après les avoir assiégées.
Selon le site AlWefak News, porte-parole de l’opposition, ce sont les demeures de Duraz, Hamad et Karbabad, qui ont été prises pour cibles. Le but étant d’infliger une punition collective à leurs habitants par des tirs sporadiques de gaz lacrymogène toxique. De nombreux cas d'asphyxie ont été signalés parmi les habitants qui dormaient lorsque les forces du régime ont attaqué.
Les raids de maison font partie des mesures répressives adoptées en toute impunité par les forces du régime contre les citoyens bahreïnis qui participent aux manifestations. Des actes de vandalisme des biens privés sont également commis.
Ce mercredi, les forces du régime ont pris d’assaut le lycée al-Jabiriyya à coup de gaz lacrymogène et ce pour la seconde fois en moins de 48 heures. La veille, les forces du régime avaient arrêté un étudiant.
Selon le site de l’opposition alWefak News, « un tel comportement vise le processus d'apprentissage afin de politiser les écoles après que les étudiants ont maintenu un niveau élevé de prise de conscience et de maîtrise de soi ».
Avec AFP, et alWefak News.