M. Erdogan a goûté sa première défaite dans sa carrière politique.
Dans son dernier article, le chroniqueur du quotidien libanais asSafir Mohammad Noureddine, spécialiste dans les affaires turques, rapporte les commentaires de la presse turque concernant le soulèvement du 1er juin ou le soulèvement de la place Taqsim à Istanboul.
A l'exception de quelques articles, la plupart des commentaires font imputer les causes de ce soulèvement au premier ministre turc Recep Tayyeb Erdogan et à ses politiques qui ont provoquées l'explosion de la situation et ont terni l'image de la Turquie à l’extérieur.
A ce titre, l’un des plus percutants commentaires de la presse turque, est celui qui a parlé de la victoire de l'opposition et de la récupération de la place Taqsim par les laïcs.
Sous le titre « une Résistance post-moderniste », le journaliste Gengis Chandra écrit dans le journal Hurriyet: «Erdogan n'a pas changé ses habitudes de lutte contre la résistance qui a émergé à Taqsim. Mais le langage du corps a changé. Il est clair qu’il a perdu la maitrise de son ton lors de son discours », ajoutant qu’« il est évident que son charisme a subi un sacré revers ».
Et de poursuivre : « Quelque soit l’angle que nous regardons, le grand vaincu dans les événements d'Istanbul est Recep Tayyip Erdogan. Car les gens ne sont pas sortis pour protester contre le déracinement d’un arbre ou même contre le Parti de la Justice et du Développement, mais contre Erdogan, personnellement. Et du coup l’agression contre les manifestants, des artistes et des journalistes a provoqué une réaction qui s’est inscrite dans l’histoire comme étant le soulèvement historique d'Istanbul.
Pour Chandra : «La question est que les jeunes de la ville, toutes catégories confondues ont explosé à cause du mépris du gouvernement pour eux et de la pression sur leur mode de vie, ils se sont réunis et ont dit à Erdogan: Une minute (en allusion à la « une minute » d’ Erdogan balancé au visage du président israélien Shimon Peres en signe de protestation contre l'agression israélienne sur la bande de Gaza).
Selon Chandra «Erdogan a affronté pour la première fois depuis dix ans une défaite et dans le cœur de sa ville. Istanboul a senti que l'oxygène de la liberté lui manquait et donc elle s’est soulevée et lui a dit : Une minute. Telle est la question ».
Dans le journal Radikal, Ozgur Mumju a écrit qu'avant les élections de 2002, Erdogan avait conseillé son fils Bilal «Ne soit pas arrogant ». Mais après son arrivée au pouvoir il n’a pas appliqué ce conseil.
Selon l'écrivain de Radikal, « quelque soit le terme qu’on veut utiliser pour désigner le régime en Turquie, on parle du régime de Recep Tayyep Erdogan. Il porte toute la responsabilité. Alors que ceux qui l'entourent sont à la recherche d'un complot , tout ceux qui sont descendus : des joueurs de football, des artistes, des professeurs d'université, des femmes au foyer, des barman, des Kurdes et des nationalistes. Pour Erdogan, le responsable du recours à la force excessive est la police terroriste et l’autorité arrogante. Il est temps pour Erdogan de lui rappeler ses conseils à son fils: Ne soyez pas arrogant ».
Sous la rubrique «assez c'est assez», le quotidien Aqsham a dénoncé que de nombreuses allégations ont émergé au sujet de ce qui s'est passé dans la place Taqsim dans toute la Turquie. Mais les manifestants sont sortis pour dire «ça suffit» à la confiscation des droits des cinquante pour cent, qui n'ont pas donné leurs voix à Erdogan ».
«Ils ont brisé la barrière de la peur et ont crié qu’ils en avaient marre, ils sont sortis pour protéger les libertés et les valeurs de la laïcité, ils sont sortis pour protester contre la vente de l'argent public et la transformation des villes en centres commerciaux. Ils ont dit à Erdogan : ça suffit », selon les termes d’Aqsham.
Enfin, Kadri Gorsil a écrit dans le journal Melliat, un article intitulé « un message intitulé », dans lequel il affirme que « l'objectif des manifestants n’est pas de faire démissionner le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan, qui est arrivé au pouvoir avec 50 pour cent, mais le message de la rue au pouvoir, c'est qu'il ne peut pas gérer le pays en méprisant les 50 pour cent qui ne lui ont donné pas de voix mais qu’il considère comme inexistant ».
L'auteur se demande «a-t-il (ndrl :Erdogan) bien reçu le message ?». Pour avoir une réponse il fait attendre les prochains jours.
Le soulèvement de la rue turque a montré que la politique de polarisation du gouvernement a pris fin.Tout comme sa politique envers la Syrie a provoqué des tensions et une instabilité à l'intérieur, ce qui a obligé le gouvernement à changer certains aspects de cette politique. Aujourd’hui, il est impératif qu’il modifier sa politique dans les questions internes.
Bref, on peut dire que M. Erdogan a goûté sa première défaite dans sa carrière politique.