Des messages texte codés transmettent l’ordre de porter une attaque nucléaire et les coordonnées de l’objectif.
L'armée de l’air russe a lancé la mise en œuvre d’un nouveau système de contrôle et de transmissions à long rayon d'action, qui transmettra les ordres aux bombardiers stratégiques Tu-160, Tu-95 et Tu-22M3. Ces derniers peuvent atteindre une cible au sol avec un missile nucléaire, écrit le quotidien Izvestia du 14 juin 2013.
Ce système fonctionne selon le principe du télégraphe ou des SMS: des messages texte codés transmettent l’ordre de porter une attaque nucléaire et les coordonnées de l'objectif.
Une source de l'état-major de l'armée de l'air a déclaré que les modules du système seraient installés lors de la maintenance régulière que subissent plusieurs appareils chaque année en fonction de leur usure.
Avec l'ancien système les pilotes devaient entrer manuellement les coordonnées de la cible dans le système de contrôle du missile. Le nouveau permettra de les intégrer automatiquement sans intervention de l'équipage, explique la source.
"Au poste de commandement un opérateur tape le texte du message sur le clavier de l'émetteur. Le système attribue à chaque symbole un code crypté et le transmet sur les ondes. En quelques secondes le message parvient jusqu'à l'avion, où il est décrypté", décrit la source de l'armée de l'air.
Le système utilise les canaux radio classiques et le surchiffrement pour transmettre les messages. Avantage: il permet d'éviter d'utiliser les satellites pour communiquer avec l'avion et en cas d'interruption de la liaison avec l'appareil, le système pourrait reconstituer l'ensemble du message à partir de ses fragments. Le signal est envoyé uniquement du QG à l'avion.
"Les anciens systèmes de transmission tels que le R-099 Tchaïka sont très sensibles aux interférences radio, sachant que la transmission, le décryptage et l'entrée des données demandent plusieurs minutes. Le nouveau système accélère considérablement le processus de redirection de la visée des forces stratégiques aériennes et exclut le facteur "erreur humaine", explique la source.
Le nouvel algorithme de transmission des données, qui fonctionne sur le principe du surchiffrement, rend le système pratiquement invulnérable aux interférences. Ainsi l'ennemi ne pourra empêcher l'activation et la redirection de la visée des bombardiers stratégiques avant une frappe nucléaire.
L'expert militaire Anton Lavrov explique ce passage au nouveau système par l'obsolescence physique de l'ancien.
"La modernisation du système de gestion des bombardiers à long rayon d'action n’a aucune autre explication. Simplement personne ne produit aujourd'hui les composants utilisés pour les modules de liaison existants et c'est pourquoi il a été décidé d'utiliser une nouvelle base élémentaire pour les remplacer. Par ailleurs, cela rend le système plus résistant aux interférences radio", remarque Anton Lavrov.
Il ajoute que le système de réception de l'ordre de lancement fait partie des points les plus faibles des bombardiers stratégiques.
"Les bombardiers stratégiques patrouillent pendant plusieurs dizaines d'heures loin de leurs bases. Pendant ce temps la situation peut changer radicalement et il est donc primordial pour le commandement des forces nucléaires de transmettre rapidement et clairement l'ordre d'attaquer, ainsi que les coordonnées de la cible. Il est crucial pour l'équipage de recevoir cet ordre et de ne pas se tromper dans le choix de la cible. Evidemment, l'ennemi fait tout pour empêcher cet ordre d'arriver jusqu'à l'avion ou qu'il parvienne de manière altérée. Grâce au nouveau système il est pratiquement impossible d'empêcher la réception de l'ordre", explique Anton Lavrov.
L'expert ajoute qu'à l'heure actuelle, seule l'armée de l'air américaine dispose de systèmes numériques d'envoi de l'information aux bombardiers stratégiques.
Le ministère de la Défense russe a publié sur le site dédié aux achats d’Etat l’information sur la commande des éléments du nouveau système de contrôle et de transmissions pour un montant de 11 millions de roubles, soit près de 275 000 euros. Elle concerne, entre autres, les transmetteurs de messages cryptés R-097M. L'Institut de recherche de Kalouga est l'unique producteur de ces systèmes.