A deux jours de la manifestation de l’opposition le 30 juin, des affrontements ont éclaté entre pro-Morsi et anti-Morsi
Des milliers d'Egyptiens manifestaient vendredi, les uns pour soutenir Mohamed Morsi et les autres pour réclamer le départ du président des Frères musulmans, témoignant des clivages croissants dans le pays un an après son élection et faisant craindre de nouveaux troubles.
Sur le terrain, le bilan des affrontements depuis mercredi dans le delta du Nil entre partisans et opposants au président égyptien Mohamed Morsi s'élève désormais à quatre morts, ont affirmé vendredi des médecins et un responsable des services de sécurité.
"Le bilan des heurts à Mansoura est passé à trois morts, après que deux personnes ont succombé à des blessures par chevrotine", a indiqué un médecin à l'hôpital international de Mansoura, dans le Delta du Nil.
Une personne avait été tuée et 237 autres blessées mercredi soir lorsque les affrontements avaient éclaté.
Les Frères musulmans, ont affirmé que les trois victimes étaient membres de la puissante confrérie.
Un autre militant a été tué jeudi soir dans le gouvernorat d'ach-Charqiya (nord), également dans le Delta, lors d'affrontements violents devant le siège du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), vitrine politique des Frères musulmans.
Malgré le déploiement policier et de l'armée pour protéger les installations vitales, de violents heurts ont éclaté entre pro et anti-Morsi à Alexandrie, deuxième ville du pays, où une personne a été tuée et 70 blessées selon l'agence officielle Mena.
Des locaux du siège du Parti de la liberté et de la justice (PLJ), vitrine politique des Frères musulmans dont est issu M. Morsi ont été en outre incendiés à Alexandrie. A Aga, dans la province de Daqahliya (nord), des locaux du PLJ ont aussi été incendiés, selon des responsables.
Sur la place Tahrir, dans le centre du Caire, et dans d'autres quartiers de la capitale, des milliers de manifestants anti-Morsi défilaient de leur côté, arborant des drapeaux égyptiens et criant "Dégage".
Les anti-Morsi manifestaient également dans le delta du Nil (nord), à Port-Saïd sur le canal de Suez, et à Alexandrie (nord) où des heurts ont éclaté entre les deux camps faisant au moins 10 blessés selon un responsable de la Sécurité.
Il faut dire que l'Egypte est profondément divisée entre les partisans de M. Morsi, qui estiment qu'il épure les institutions après des décennies de corruption, et ses détracteurs qui l'accusent de concentrer le pouvoir entre les mains des Frères musulmans.
L'opposition a appelé à manifester en masse dimanche, date anniversaire de l'investiture de M. Morsi, pour réclamer une présidentielle anticipée.
En prévision de cette mobilisation, des entreprises ont annoncé qu'elles seraient fermées dimanche, journée qui marque le début de la semaine en Egypte.
Au Caire, certains habitants retiraient de l'argent liquide et stockaient de la nourriture, tandis que de longues files d'attente se formaient devant les stations d'essence, où il fallait parfois plusieurs heures avant de pouvoir faire le plein.
Face à ces tensions croissantes, le ministre de la Défense Abdel Fattah Al-Sissi a prévenu il y a quelques jours que les militaires interviendraient en cas de violences lors des manifestations.
La légitimité du président Morsi, qui a pris ses fonctions le 30 juin 2012, est désormais au coeur des tensions entre ses partisans et ses opposants mobilisés par le mouvement populaire Tamarrod (rébellion, en arabe).
Créé en avril pour réclamer le départ de M. Morsi, issu de la confrérie des Frères musulmans, Tamarrod affirme avoir réuni 15 millions de signatures demandant une élection présidentielle anticipée.
Les détracteurs de M. Morsi l'accusent de ne pas s'atteler aux revendications démocratiques qui avaient déclenché la révolte de 2011 et de ne pas résoudre une situation économique marquée par le chômage et l'inflation croissants.
Les pro-Morsi mettent, eux, en avant son statut de premier président élu démocratiquement en Egypte et arguent que difficultés économiques et tensions religieuses affectaient déjà l'Egypte avant son arrivée au pouvoir.
Mercredi, M. Morsi a appelé à la réforme et au dialogue, tout en prévenant que les divisions risquaient de précipiter le pays dans la "paralysie" et le "chaos".
Il a annoncé qu'un comité examinerait la possibilité d'amender la Constitution, accusée d'ouvrir la voie à une islamisation de la législation, et appelé tous les partis à proposer leurs suggestions d'amendements.
Mais l'opposition a rejeté l'offre de dialogue, voyant dans les propos du président "le contraire d'une reconnaissance claire de la situation difficile que vit l'Egypte à cause de son échec à administrer les affaires du pays".