Les employés d’alJazira sont interdits d’afficher des points de vue politiques qui divergent avec la ligne éditoriale de la chaine.
De nouveau, la lumière est braquée sur la chaine de télévision qatarie alJazira dont la direction a subi plusieurs coups durs dernièrement. A commencer par le soutien d’alJazira aux Frères musulmans en Tunisie et en Egypte, passant par la nomination du nouveau prince au Qatar Tamim ben Hamad, la fin du phénomène d’Ahmad alAssir au Liban, les exploits réalisés par l’armée syrienne sur le terrain en Syrie, et arrivant à la destitution du président Mohammad Morsi, les défaites se multiplient de jour en jour et entrainent des changements dans cet empire médiatique qatari.
Le dernier coup dur est celui des démissions en série du bureau d’alJazira en Egypte après la destitution du président Morsi. Les journalistes démissionnaires ont accusé la chaine « d’avoir perdu sa crédibilité et d’être devenue l’ennemi du peuple égyptien ». Certains avocats ont même déposé des plaintes pour obtenir la fermeture d’ « alJazira direct-Egypte ».
La question unique que se pose aujourd’hui la direction d’alJazira à Doha est : « Vers où irons-nous ? », à l’ombre d’informations faisant état d’une décision américaine de s’intéresser surtout aux deux chaines anglaise et américaine, et de calmer le jeu médiatique dans alJazira arabophone.
S’exprimant au quotidien libanais alAkhbar, une source informée à Doha a rapporté de sources proches du nouveau prince qatari que « des changements radicaux surviendront dans la chaine principale, et qu’il est temps que de grosses têtes ayant dirigé les révolutions arabes tombent.
D’autres sources rapportent que ces changements pourraient affecter le nom même d’alJazira, autrement dit une nouvelle chaine qatarie sera créée. Sachant que le directeur de l’information Ibrahim Hilal a pris un congé ouvert juste avant les derniers événements en Egypte. Assef Hamidi a été nommé à sa place.
Face à ces changements qui frappent la chaine arabophone, des préparatifs sont en cours pour lancer la nouvelle chaine « alJazira Amérique » en aout prochain mais dans le siège de la chaine à New York. Des débats houleux opposent actuellement les dirigeants de la chaine sur son identité.
Il y a deux jours, le journal britannique Guardian a publié une lettre interne envoyée par Marwan Bechara, l’un des analystes politiques de renommée à alJazira aux directeurs de la chaine. Cette lettre reflète la polémique qui a lieu dans les couloirs de « alJazira Amérique » entre deux courants :
- Le premier considère que la nouvelle chaine doit présenter au téléspectateur américain une identité différente de la chaine « mère » au sujet de « l’animosité aux Etats-Unis », du « terrorisme », et « de l’hostilité à Israël ». Ce courant prône une politique plus ouverte aux politiques américaines. Ceci permettra à ladite chaine de bénéficier des services des fournisseurs des câbles et des publicitaires aux Etats-Unis.
- Le deuxième courant auquel appartient Bechara, considère que la reformulation de l’identité de la chaine et la soumission aux critères du marché et aux sondages sous-estiment l’esprit des Américains.
Dans cette lettre, Bechara s’en est pris au directeur exécutif des opérations internationales de la chaine, Ihab Chehabi, qui s’est vanté d’avoir rencontré le doyen de Chicago, le sioniste Ram Emanuel alors qu’il prétend transmettre la voix de l’opinion publique via « alJazira Amérique ».
Citant un employé dans la chaine sous le couvert de l’anonymat, le même journal britannique a rapporté que tous les conseillers qui dirigent le réseau « appartiennent au courant dominant aux Etats-Unis, et ne sont pas de la gauche ».
Celui-ci a rappelé qu’alJazira anglophone a retiré de son site l’article de l’écrivain et académicien palestinien à l’Université de Colombie, Joseph Massaad (1963), intitulé « les derniers sémites » après de fortes pressions exercées par le lobby sioniste sur la direction de la chaine.
Et cet employé de conclure : « C‘est une question d’identité. Nous finirons par ressembler à la CNN que personne ne la regarde. Ils ont peur de provoquer la colère du lobby sioniste ».
Après la longue coopération américano-qatarie dans les affaires de la région arabe, aljazira Amérique fera-t-elle encore plus de concessions ?
Censure du net
Dans une lettre envoyée par le directeur général par procuration de la chaine alJazira Mostapha Sawwaq aux employés, celui-ci les a rappelés des conditions d’utilisation des sites de socialisation sur internet.
En effet, les employés sont interdits d’afficher des points de vue politiques qui divergent avec la ligne éditoriale de la chaine. Cet avertissement, comme le montre le texte de la lettre, ressemble aux mesures strictes des services de renseignements les plus durs du monde.
Un département est à l’intérieur de la chaine est chargé de superviser les comptes internet des employés pour savoir s’ils respectent ou non les conditions imposées par la direction de la chaine. Quant aux sanctions, elles diffèrent selon l’ampleur du « délit » de l’employé.
traduit du site al-Akhbar