C’est le plan du camp du 14-Mars, exaspéré par son incapacité à contenir le Hezbollah
Les députés du 14 mars affirment détenir des preuves de «l’implication du Hezbollah dans la bataille de Abra». Mais leurs preuves ne peuvent en aucune façon constituer un indice concluant pour la bonne raison que cette implication n’a pas eu lieu.
Ni l’armée n’a eu besoin de solliciter l’aide du Hezbollah, ni celui-ci n’a proposé son aide, sachant qu’elle est inutile. Preuve en est que malgré les préparatifs pour cette bataille par cheikh al-Assir depuis plus de deux ans, il n’a pas tenu, lui et ses hommes, avec leur arsenal et l’aide politique, financière et médiatique dont ils ont bénéficié, plus de 48 heures.
C’est dire que quand elle s’engage, l’armée libanaise est tout à fait en mesure de mettre un terme aux exactions et cheikh al-Assir a commis une erreur fatale pour lui en attaquant un de ses barrages.
L’affaire est claire et close et toutes les campagnes du Courant du Futur et de ses alliés n’y changeront rien. Mais pourquoi le Courant du Futur et ses alliés sont les seuls à ne pas comprendre cette réalité? C’est qu’en réalité, ils exécutent un plan régional qui souhaite paralyser l’armée pour provoquer le Hezbollah et l’entraîner dans une guerre interne qui le détournerait de la Syrie et le plongerait dans les méandres d’un conflit confessionnel destructeur.
Tout l’objectif de ce qui se passe actuellement se résume ainsi: il faut détruire à n’importe quel prix l’image de résistance du Hezbollah et son aura de mouvement victorieux. Et si pour cela, il faut déstabiliser le Liban et le plonger dans un nouveau bain de sang, qu’à cela ne tienne, pour ceux qui veulent la peau du Hezbollah et à travers lui, de tous les mouvements de résistance dans la région, le jeu en vaut la chandelle. Surtout si au final, une force multinationale est formée et se déploie au Liban à la place de l’armée libanaise paralysée.
Des sources bien informées considèrent ainsi que le véritable projet de certains piliers du 14 mars est d’arriver à cette situation, c’est-à-dire de provoquer des affrontements entre le Hezbollah et les groupes extrémistes de l’opposition syrienne pour pouvoir ensuite appeler à l’aide l’ONU qui soit changerait le mandat de la FINUL pour lui permettre de se déployer sur l’ensemble du territoire libanais, soit de former une nouvelle force internationale dans le genre de celle qui s’était déployée au Liban en 1982.
Ces figures du 14 mars pensent en effet que c’est le seul moyen de se débarrasser du Hezbollah et de reprendre le contrôle du pays par le biais du déploiement d’une force internationale. Qu’un tel projet soit très éloigné du concept de la souveraineté, ne les dérange nullement, leur véritable objectif étant d’éliminer ceux qui les empêchent de faire ce qu’ils veulent au Liban.
Ces figures misent actuellement sur l’immense frustration des groupes de l’opposition syrienne après la victoire du régime syrien à Qousseir, avec l’aide des combattants du Hezbollah. Comme ces groupes ne parviennent plus à marquer des points sur le terrain en Syrie, ils doivent donc se défouler au Liban en prenant pour cible le Hezbollah, ses alliés et ses institutions.
Mais pour pouvoir leur permettre d’agir efficacement, il faut d’abord neutraliser l’armée, qui pourrait entraver leur mission. C’est la principale raison non seulement de l’attaque des hommes de cheikh al-Assir contre un barrage de l’armée à Abra, mais aussi de la campagne menée actuellement par le 14 mars contre l’armée et son rôle.
Sur le papier et dans l’esprit malade de ces piliers du 14 mars, le plan paraît possible et peut-être même facile à réaliser. L’expérience al-Assir a échoué, qu’à cela ne tienne.
La campagne contre l’armée au moment où son commandement est sur le point de passer à la retraite sera de nature à empêcher la désignation d’un nouveau commandement, tout en rendant impossible la prorogation du mandat de celui qui est actuellement en place. Ce qui provoquera une vacance à la tête de l’armée et donc sa paralysie.
A partir de là, et avec les explosifs introduits au Liban et la détermination des groupes de l’opposition syrienne, il sera aisé de lancer des attaques contre le Hezbollah au point que face à la pression de son public inquiet, il sera contraint de riposter.
Comme il est le plus fort, le camp adverse se transformera en victime et sollicitera l’aide internationale qui se traduira par une force militaire envoyée sur place pour protéger les civils. Une logique imparable, pourrait-on dire.
Mais trois choses échappent à la vigilance de ceux qui croient en un tel plan:
D’abord, plusieurs forces au Liban refusent une vacance au commandement de l’armée et ont déjà préparé plusieurs scénarios pour l’éviter.
Ensuite, le Hezbollah est suffisamment vigilant et conscient des pièges pour éviter de se laisser entraîner dans un conflit avec les groupes de l’opposition syrienne ou avec tout autre groupe installé au Liban. Il a lui aussi, mis au point des scénarios pour éviter un tel cas de figure.
Enfin, la communauté internationale, Etats-Unis et Union européenne en tête, n’est absolument pas prête à envoyer une force militaire au Liban. Elle ne l’a pas fait en Syrie, alors qu’il s’agit d’un enjeu bien plus important pour elle et à plus forte raison, elle n’est pas prête à le faire au Liban. Elle a pour le moment bien d’autres soucis et n’en déplaise à ces figures du 14 mars, le monde entier ne tourne pas autour du Liban et la communauté internationale a bien d’autres priorités que celle de les ramener au pouvoir…
Un peu de bon sens, c’est donc ce qui manque le plus à ceux qui préparent des scénarios fumeux qui n’existent que dans leur imagination.
Souraya Hélou