L’assassinat vendredi d’Abdessalem al-Mesmari ainsi que de deux officiers de la police et de l’armée a provoqué l’émoi dans tout le pays.
Des milliers de manifestants ont crié leur colère samedi contre les partis politiques et les Frères musulmans en particulier, accusés d'être responsables de l'instabilité en Libye, au lendemain d'une série d'assassinats ayant visé notamment un militant anti-islamiste.
Ces manifestations ont été émaillées d'actes de vandalismes contre les locaux des deux principaux partis: le Parti pour la justice et la construction (PJC), bras politique des Frères musulmans libyens, et son rival l'Alliance des forces nationales (AFN, libérale).
A Benghazi (est), bastion de la révolte contre le régime de Mouammar Kadhafi en 2011, de jeunes manifestants ont pris d'assaut le local du PJC tôt dans la matinée et saccagé les lieux.
Dans la nuit, plusieurs centaines de personnes avaient parcouru les rues de la ville pour dénoncer l'assassinat vendredi de l'avocat et militant politique anti-islamiste Abdessalem al-Mesmari ainsi que de deux officiers de l'armée.
Les manifestants accusent les islamistes d'être derrière l'assassinat de Mesmari, comme ceux qui ont visé depuis la révolte des dizaines d'officiers, en particulier à Benghazi.
A Tripoli, des centaines de personnes se sont rassemblées tôt samedi au coeur de la capitale en "solidarité avec Benghazi" et contre les Frères musulmans.
Aux cris de "le sang des martyrs n'a pas été versé en vain", les manifestants ont convergé vers la place des Martyrs à leur sortie des mosquées après la prière de l'aube, selon un journaliste de l'AFP.
Une centaine de jeunes se sont rendus par la suite au local du PJC dans le quartier de Ben Achour où ils ont saccagé et pillé les bureaux et le mobilier et ont brisé les vitres du bâtiment.
Au départ, la manifestation visait en particulier les Frères musulmans accusés d'être derrière l'assassinat vendredi d'Abdessalem al-Mesmari. Mais des slogans ont été scandés aussi contre l'AFN, vainqueur des élections de juillet 2012.
Une centaine de manifestants se sont dirigés vers le siège de l'AFN à Hay al-Andalous, qu'ils ont saccagé, jetant des documents par les fenêtres. "Nous voulons la dissolution de tous les partis. Ils sont la cause de tous nos problèmes. On doit adopter une Constitution puis une loi organisant la vie politique avant de permettre aux partis d'exercer", affirme Ahmed Trabelsi, un manifestant.
Les protestataires estiment que les rivalités politiques empêchent la stabilisation du pays, où pullulent les armes et où le PJC et l'AFN sont accusés aussi de manipuler des milices armées qui servent leurs intérêts et d'empêcher la formation d'une armée et d'une police professionnelles.
Contrairement aux autres pays du Printemps arabe, la Tunisie et l'Egypte, les islamistes n'ont pas remporté les premières élections libres en Libye.
Vainqueur des élections législatives de juillet 2012, l'AFN de Mahmoud Jibril, une coalition de petits partis libéraux menée par des architectes de la révolte de 2011 contre le colonel Kadhafi, détient 39 sièges sur les 80 réservés à des partis politiques au Congrès général national (CGN), la plus haute autorité politique et législative du pays. Le PJC est la deuxième formation politique du Congrès avec 17 sièges. Les 120 sièges restants sont détenus par des candidats indépendants aux allégeances et convictions diverses.
Les deux formations sont accusées toutefois d'oeuvrer à élargir leur influence et à intimider leurs rivaux, en s'appuyant sur des milices armées.
L'assassinat vendredi d'Abdessalem al-Mesmari ainsi que de deux officiers de la police et de l'armée a provoqué l'émoi dans tout le pays.
L'avocat était parmi les premiers militants qui avaient participé aux manifestations contre le régime du dictateur déchu Mouammar Kadhafi en février 2011.
Après la révolution, il était connu notamment pour son opposition aux Frères musulmans et aux milices islamistes qui oeuvrent selon lui à prendre le pouvoir malgré le rejet de la population.
Depuis la chute du régime de Kadhafi, la région de l'est libyen est le théâtre d'une multiplication de violences, dont des attaques ciblant des juges, des militaires et des policiers ayant servi sous le régime déchu.