22-11-2024 04:16 PM Jerusalem Timing

Libye: évasion de plus d’un millier de prisonniers à Benghazi

Libye: évasion de plus d’un millier de prisonniers à Benghazi

Dans ce pays aussi, les relations entre partis islamistes et laïcs sont à couteaux tirés

Plus d'un millier de détenus, dont la plupart de droit commun, se sont échappés samedi d'une prison à Benghazi, chef-lieu de l'Est libyen, sur fonds de tensions et protestations au lendemain d'une série d'assassinats qui a suscité la colère de la population.
  
"Il y a eu une émeute à l'intérieur de la prison d'Al Kuifiya, ainsi qu'une attaque depuis l'extérieur. Plus de mille prisonniers ont pu s'évader", a indiqué à l'AFP un responsable des services de sécurité sous couvert de l'anonymat.
  
Selon lui, la plupart des fugitifs étaient des détenus de droit commun.
"Mais certains étaient détenus pour des affaires liées à l'ancien régime de Mouammar Kadhafi", a-t-il ajouté sans autre précision.
  

Ali ZeydaneLe Premier ministre Ali Zeidan a confirmé l'évasion. Selon lui, "ce sont les habitants du voisinage qui ont lancé l'attaque, parce qu'ils ne veulent plus de cette prison à proximité de leurs habitations".
  
Très tôt dans la matinée, des milliers de manifestants ont crié leur colère contre les partis politiques et les Frères musulmans en particulier, accusés d'être responsables de l'instabilité en Libye, au lendemain d'une série d'assassinats ayant visé notamment un militant anti-islamiste.
Ces manifestations ont été émaillées d'actes de vandalisme contre les locaux des deux principaux partis: le Parti pour la justice et la construction (PJC), bras politique des Frères musulmans libyens, et son rival l'Alliance des forces nationales (AFN, libérale).
  
Ainsi, les locaux du PJC à Tripoli et à Benghazi ont été saccagés par des dizaines de manifestants, de même que le siège de l'AFN dans la capitale.
  
Dans la nuit de vendredi  samedi, plusieurs centaines de personnes avaient parcouru les rues de Benghazi pour dénoncer l'assassinat vendredi de l'avocat et militant politique anti-islamiste Abdessalem al-Mesmari, ainsi que de deux officiers de l'armée.
  
M. Zeidan a indiqué samedi que la frontière avec l'Egypte avait été fermée aux voyageurs en vue d'empêcher les responsables de ces assassinats de quitter le territoire, sans préciser si cette décision était également motivée par l'évasion des détenus.
  
Il a annoncé par ailleurs un remaniement ministériel sous peu afin de réduire le nombre de membres de son cabinet, "en vue de plus d'efficacité", a-t-il dit.
  
Les manifestants accusent les islamistes d'être derrière l'assassinat de Mesmari et les attaques qui ont visé depuis la révolte des dizaines d'officiers, en particulier à Benghazi.
Les protestataires estiment que les rivalités politiques empêchent la stabilisation du pays, où pullulent les armes. Le PJC et l'AFN sont accusés de manipuler des milices armées qui servent leurs intérêts, empêchant la formation d'une armée et d'une police professionnelles.
 "Nous voulons la dissolution de tous les partis. Ils sont la cause de tous nos problèmes. On doit adopter une Constitution puis une loi organisant la vie politique avant de permettre aux partis d'exercer", affirme Ahmed Trabelsi, un manifestant à Tripoli.
  
Contrairement aux autres pays du Printemps arabe, la Tunisie et l'Égypte, les islamistes n'ont pas remporté les premières élections libres en Libye.
  
Mahmoud JebrilVainqueur des élections législatives de juillet 2012, l'AFN de Mahmoud Jibril, une coalition de petits partis libéraux menée par des architectes de la révolte de 2011 contre le colonel Kadhafi, détient 39 sièges sur les 80 réservés à des partis politiques au Congrès général national (CGN), la plus haute autorité politique et législative du pays. Le PJC est la deuxième formation politique du Congrès avec 17 sièges. Les 120 sièges restants sont détenus par des candidats indépendants aux allégeances et convictions diverses.
  
L'avocat Abdessalem al-Mesmari était parmi les premiers militants qui avaient participé aux manifestations contre le régime du dictateur déchu Mouammar Kadhafi en février 2011.
 Après la révolution, il était connu notamment pour son opposition aux Frères musulmans et aux milices islamistes qui œuvrent selon lui à prendre le pouvoir malgré le rejet de la population.
  
Depuis la chute du régime de Kadhafi, l'Est libyen est le théâtre d'une multiplication de violences, dont des attaques ciblant des juges, des militaires et des policiers ayant servi sous le régime déchu.