Hymne aux 50 soldats syriens massacrés à Khan al-Assal
Vous vous souvenez de nos frères sortis d’une certaine tranchée lors de la « tempête du désert » ?
Plus de 20 ans se sont écoulés à ce massacre, lorsque nos
frères suppliaient les envahisseurs Yankees de ne pas les tuer. En ce jour
arabe sombre, quelque chose s’est brisée au fond de nous. Ton sang n’a aucune
valeur, que tu sois koweitien ou irakien. Ils étaient tous arabes, des soldats,
humiliés devant les étrangers.
Il y a quelques jours, une image pareille nous a choqués,
mais cette fois à Khan al-Assal. Comme si tout le sang syrien effusé depuis
deux ans ne suffisait pas… Comme s’il nous est désormais imposé de regarder
dans les yeux de la victime avant d’être abattue !
A Khan al-Assal, la plaie s’est ouverte à nouveau. Ce
n’est pas facile de voir la mort dans les yeux de ton frère, de miser à la
dernière minute sur un reste de miséricorde chez le tueur, sur un espoir
impossible, ou encore sur des souvenirs communs entre le bourreau et la
victime, peut-être qu’ils étaient dans la même école, qu’ils avaient mangé à la
même table, ou qu’ils étaient voisins… n’importe quel souvenir avant de
diaboliser la victime et de l’abattre comme un mouton.
Ce fut cinquante dernier regards, cinquante cris, cinquante douleurs d' accouchement.. cinquante histoires. Il n'en reste que des portraits accrochés au mur, un lit dans la maison familiale, et des
jeux enfantins dans les quartiers et les rues.
Les visiteurs de la dernière nuit n’ont pas demandé à leurs victimes si elles avaient un dernier souhait à faire, ou une lettre à la famille, ou un message à adresser aux dirigeants du pays, aux commandants de l’armée, aux opposants de l’intérieur et de l’extérieur de l'exil golfique, aux dirigeants des capitales mondiales qui financent et soutiennent les groupes de la mort. ne serait-ce qu'une bague qu'on envoie à un être cher, tant que nous allons allons mourir dans un fosse de vos ordures, sous vos caméras en cérémonie!
Nous, comme tous ceux qui ont été tués en Syrie, n’avions peut-être pas vu nos
frères avant d’être abattus dans « la tempête du désert », il y a in quart de siècle de cela. Nous avons
cru alors que nos meurtriers ont pris la leçon de la « sourate
Youssef ». Mais ce ne fut pas le cas.
Nous voici, cinquante noms, ou plus, affligés avant l'affliction du grand départ. Nos frères sont certes plus durs que les étrangers, ils nous ont jetés dans le puits, sans testatment ni souhait !
Khalil Harb
Traduit d'As-Safir