Les experts sonnent la sonnette d’alarme face à la plus grave crise economique et sociale jamais connue dans l’histoire des Etats-Unis.
Les sous-traitants du secteur de la Défense s'apprêtent à mettre des milliers d'employés en congé sans solde aux Etats-Unis si la fermeture partielle du gouvernement américain se poursuit.
L'absence d'accord au Congrès entre démocrates et républicains sur le budget des Etats-Unis a considérablement perturbé les contrats militaires, car le Pentagone se retrouve sans fonds pour mener des inspections et audits obligatoires.
En l'absence de ces inspections, les sociétés de défense ne peuvent continuer à fabriquer des avions ou navires de guerre, des sous-marins et autres armes, même s'ils disposent de fonds découlant de contrats déjà approuvés.
Quatre jours après le début de la fermeture partielle du gouvernement, le "secteur fait face à un problème urgent qui doit être résolu", se sont alarmés deux lobbys de l'armement, l'Association des industries aérospatiales et l'Association nationale des industries de Défense.
Dans une lettre au ministre de la Défense Chuck Hagel , les deux groupes soulignent que "l'inquiétude la plus immédiate est l'absence d'inspecteurs de l'Agence de gestion des contrats de Défense", dont le bureau est fermé depuis le début du "shutdown".
Le géant de l'aérospatiale Lockheed Martin, principal sous-traitant du plus gros programme d'armement de l'histoire américaine -- l'avion de chasse F-35 -- a annoncé vendredi qu'environ 3.000 employés seraient mis en congés sans solde lundi, un chiffre voué à monter si le blocage à Washington dure.
Sikorsky, filiale d'United Technologies qui fabrique l'hélicoptère militaire Black Hawk, prévoit elle aussi de mettre 2.000 personnes en congés sans solde à partir de lundi, encore une fois à cause de l'absence d'inspecteurs du Pentagone.
Si la passe d'armes entre républicains et démocrates se poursuit, ce sont 2.000 personnes de plus qui seront en congés sans solde pour un total de 5.000 personnes chez United Technologies, car les divisions Pratt and Whitney (moteurs d'avions), et UTC Aerospace Systems seront à leur tour touchées.
La directrice générale du géant britannique BAE Systems, Linda Hudson, a elle aussi prévenu que 1.000 employés travaillant sur des missions de renseignement et de sûreté étaient "dispensées de venir travailler" à cause du "shutdown".
Un effet domino
Le constructeur Boeing, a pour sa part indiqué qu'il se préparait à "des mises en congés limitées d'employés dans certains domaines" de ses activités de Défense, sans avancer de chiffre.
Dans leur lettre, les deux associations du secteur s'inquiètent aussi de la suspension attendue du travail des services de finance et comptabilité de la Défense, qui supervise les versements de certains contrats d'armement.
"L'impact sur les lignes de crédit des PME (concernées) sera significatif à très court terme", avertissent-elles.
Selon Richard Aboulafia, vice-président du cabinet de conseil Teal Group, d'ici la fin de la semaine prochaine, ce sont des dizaines de milliers d'employés dans la Défense et dans des entreprises du secteur civil qui vont se retrouver en congé forcé si la paralysie partielle du gouvernement se poursuit.
"Les premiers domaines touchés seront la maintenance et les livraisons d'avions", estime-t-il.
"Il y a un effet domino: d'abord ce sont les fonctionnaires qui sont en congé sans solde, puis les gros sous-traitants, et enfin leurs fournisseurs doivent commencer à licencier des gens", a expliqué Loren Thompson, analyste du Lexington Institute, qui conseille des entreprises de la Défense.
Selon lui, si le budget n'est toujours pas approuvé par le Congrès d'ici la mi-octobre, "c'est la majeure partie de la production dans la Défense qui sera à l'arrêt".
Le secteur a pour l'instant résisté à une reprise économique lente et à des coupes budgétaires automatiques plutôt mieux que prévu, a poursuivi M. Thompson, "mais il y a comme un pressentiment dans le secteur que quelque chose va mal tourner très bientôt".