Cet anticorps retarde la sensation de satiété.
Des chercheurs français de l’Institut de la Santé et de la Recherche médicale (Inserm) viennent de découvrir comment le sentiment de satiété est retardé chez certaines personnes souffrant d'obésité.
Les personnes souffrant d'obésité sont pour la plupart victimes d’une hyperphagie, c'est-à-dire qu'ils ont une prise alimentaire trop importante. En principe, c’est l’hypothalamus qui adapte la quantité de nourriture nécessaire en fonction des réserves du corps et de ses besoins. Chez les personnes obèses, ce mécanisme est déréglé, ce qui les pousse à manger en excès par rapport à leurs besoins
Toutefois, les mécanismes impliqués dans ce dérèglement restaient relativement flous, du moins jusqu'ici. En effet, des chercheurs de l'Inserm semblent avoir trouvé le responsable de cette hyperphagie : un anticorps qui retarderait le sentiment de satiété. En s'y intéressant de près, l'unité de recherche "Nutrition, inflammation et dysfonction de l'axe intestin-cerveau" a découvert que l'immunoglobuline impliquée dans ce phénomène ralentit l'hormone de la faim : la ghréline. Chez les obèses, le taux de ghréline reste normal, voire bas.
Une faim qui dure
Dans l'étude publiée par la revue Nature Communications, les scientifiques expliquent : "les immunoglobulines, dirigées contre la ghréline, ont des propriétés particulières dans le cadre de l'obésité".
Concrètement, l'anticorps agirait en se fixant sur les molécules, ce qui aurait pour effet de bloquer la dégradation dont elle est normalement victime. Les quantités d'hormone seraient donc plus importantes.
Le professeur Pierre Déchelotte, directeur de l'unité de l'Inserm, explique : ces immunoglobulines "permettent de capter plus de molécules de ghréline et de la protéger contre la dégradation rapide qui a lieu habituellement.
De ce fait, la quantité d'hormones qui va pouvoir être libérée au niveau de son récepteur dans le cerveau va être plus importante". Comme la sensation de faim perdure, les anticorps retardent également la sensation de satiété, alors même que les besoins réels sont déjà comblés.
Les personnes continuent donc de manger, ce qui se traduit naturellement par une prise de poids. Ce mécanisme a été confirmé par une double expérience (in vitro et dans un modèle expérimental chez l'animal), précise Pourquoidocteur.com.
Néanmoins, d'autres facteurs, notamment la flore intestinale pourrait jouer un rôle. Par ailleurs, en mars 2012, des chercheurs américains avaient déjà annoncé être parvenus à identifier un gène qui pousserait à manger plus que nécessaire.
Traiter l'obésité et d'autres troubles alimentaires
Mieux comprendre les origines de l'obésité et des troubles associés pourrait fournir de nouvelles pistes pour aider les patients. Suite à leur découverte, les chercheurs espèrent pouvoir parvenir à contrôler et réguler les anticorps identifiés.
Cela permettrait d'influencer les taux de ghréline et d'aider les personnes obèses à perdre du poids en diminuant la prise alimentaire.
"Si on arrive à modifier les propriétés des immunoglobulines, on va pouvoir diminuer l'intensité de l'hormone de la faim", Alpha MSH, estime le Pr Pierre Déchelotte.
Mais ce n'est pas tout. D'autres troubles alimentaires pourraient également bénéficier de cette découverte.
En rétablissant l'équilibre entre les hormones de la faim et celles de la satiété, des maladies telles que l'anorexie ou la boulimie pourraient également êtres prise en charge. Selon le chercheur, ces pathologies n'ont pas qu'une origine psychologique. Aussi, "on pourrait essayer de restaurer l'efficacité de la ghréline au cours de l'anorexie mentale en manipulant ces immunoglobulines", estime le professeur.
Source: maxisciences.com