Sans tarder, des analystes se sont mis à répondre aux questions suscitées par la façon dont il a été liquidé et les raisons de son immersion. Questions qui contribuent à douter de la version véhiculée de sa mort.
La mort d'Oussama ben Laden permet à Washington de s'épargner un procès sous haute tension qui aurait pu donner un coup de pouce à Al-Qaïda et occasionner de sérieux maux de tête à Barack Obama, estiment des analystes interrogés par l'AFP.
Oussama ben Laden était recherché "mort ou vif" et sa tête était mise à prix pour 25 millions de dollars par les Etats-Unis.
Mais le spectacle d'un Ben Laden menotté, vêtu de la combinaison réglementaire des prisonniers, aurait ouvert une boîte de Pandore sur le cadre juridique à adopter pour l'organisation du procès du chef d'Al-Qaïda.
"La Maison Blanche a probablement poussé un +ouf!+ de soulagement lorsqu'il a été tué, et non appréhendé", réagit Andrew Exum, un ancien officier et membre d'un centre de réflexion sur la politique américaine en matière de sécurité.
"Si Ben Laden avait été capturé, le procès aurait pu se transformer en cirque, son incarcération se serait transformée en cirque", ajoute-t-il.
Car le cas Saddam Hussein a servi de leçon à l'administration Obama.
Les harangues de l'ancien homme fort de Bagdad lors de son procès, puis les images de son exécution en 2006 lui avaient attiré la sympathie de nombreux musulmans sunnites à travers le Proche et le Moyen-Orient.
Saddam Hussein est alors devenu "un martyr dans le monde arabe", souligne Andrew Exum.
Les assassinats politiques, en vogue à l'époque de la Guerre Froide, ont progressivement perdu leur légitimité dans les années 1970. Mais depuis les attentats du 11-Septembre, ils semblent sur le retour, cette fois-ci sous l'appellation "opérations ciblées", sans générer trop d'opposition dans l'opinion publique.
"Il est peu probable que les gens soient scandalisés par la décision de tuer Ben Laden plutôt que de le capturer vivant", observe à ce propos Joshua Keating, un éditorialiste, sur le site internet du magazine Foreign Policy.
Dans le cas où Ben Laden aurait été appréhendé, il y a de fortes chances qu'il eut été transféré à la prison militaire américaine située sur la base de Guantanamo, à Cuba.
Très vite, se serait posée la question de son procès: civil ou militaire? A Cuba ou aux Etats-Unis? Soit les mêmes questions auxquelles Washington a dû, et doit toujours répondre, dans le cas de Khaled Cheik Mohammed, le cerveau auto-proclamé des attentats du 11-Septembre, et ses quatre co-accusés.
Dès lors, l'administration Obama aurait dû --une fois de plus-- affronter les tirs de barrage de l'opposition républicaine qui refuse aux suspects accusés de terrorisme le droit à un procès civil et ceux de la gauche, opposée aux tribunaux militaires pour ces mêmes détenus.
"L'objectif principal, et, à vrai dire, le seul objectif de cette opération, était de tuer ou d'arrêter Oussama ben Laden. La possibilité qu'il soit pris vivant a été prise en compte, et c'est normal", commente un haut responsable du Pentagone.
La mort de Ben Laden est une chose, la façon dont l'armée américaine s'est débarrassée de son cadavre --en le jetant à la mer-- en est une autre et permet d'éviter de lui ériger une tombe qui aurait pu devenir un lieu de pèlerinage.
C'est de cette même façon qu'Israël s'était défait du corps du criminel de guerre nazi allemand Adolf Eichmann en 1962, après son exécution. Ses cendres avaient été dispersées en Méditerranée.
"Nous ne voulons pas que l'endroit où (Eichmann) aurait été enterré soit devenue un lieu de pèlerinage et nous ne pouvions pas restituer son corps à sa famille", avait alors expliqué le Premier ministre israélien de l'époque David Ben Gourion.