Selon le Wall Street Journal, le chef des renseignements saoudiens avait déclaré à des diplomates européens que Ryad réduirait sa coopération avec la CIA pour armer des rebelles syriens, et travaillerait avec la France..
Le secrétaire d\'Etat américain John Kerry était attendu dimanche à Ryad pour une difficile tentative d\'apaiser la méfiance de l\'Arabie saoudite, un allié stratégique des Etats-Unis, fortement remonté contre Washington pour son non-interventionnisme en Syrie et son ouverture sur l\'Iran, un rival régional.
La direction saoudienne, dont les griefs à l\'égard de l\'administration américaine se sont multipliés depuis le début du Printemps arabe en 2011, a laissé éclater sa colère le 18 octobre en refusant de siéger au Conseil de sécurité de l\'Onu, un acte sans précédent visant à protester contre l\'inaction du Conseil, mais aussi des Etats-Unis, en particulier face au drame syrien.
\"Nous ne sommes pas en bons termes avec les Etats-Unis\", écrit dimanche l\'éditorialiste du quotidien Al-Riyadh, qui exprime un point de vue proche de celui des autorités saoudiennes.
\"Il existe actuellement des divergences qui pourraient s\'accentuer mais sans conduire à une rupture\", ajoute le journal, soulignant que la crise syrienne était \"un point de rencontre ou de distanciation\" dans les rapports entre Ryad et Washington.
L\'Arabie saoudite soutient militairement les rebelles islamistes d\'alqaida qui se sont détachés de l\'aile militaire de la Coalition de l\'opposition syrienne ( l\'ASL), fortement divisée sur une participation à la conférence de paix sur la Syrie, dite Genève-2, initiée par les Etats-Unis et la Russie.
Les Américains, eux, ont renoncé à des frappes contre le régime syrien évoquées en représailles à une attaque chimique en août près de Damas.
\"Il y a un mécontentement en raison de l\'attitude américaine, et le message a été bien reçu\" à Washington, estime l\'analyste saoudien Abdel Aziz al-Sagr.
Le secrétaire d\'Etat est arrivé dimanche au Caire d\'où il se rendra à Ryad pour sa première visite \"officielle\" jusqu\'à lundi en Arabie saoudite, dans le cadre d\'une longue tournée régionale. Il \"va réaffirmer la nature stratégique des relations entre les Etats-Unis et l\'Arabie saoudite\", qui ont perduré en dépit des turbulences depuis leur établissement dans les années 1930, a indiqué sa porte-parole Jennifer Psaki.
Signe de son mécontentement, Ryad a refusé d\'accueillir l\'émissaire international pour la Syrie, Lakhdar Brahimi, qui vient d\'achever une tournée au Moyen-Orient, a indiqué une source proche des milieux politiques saoudiens.
M. Brahimi tente d\'organiser d\'ici fin novembre à Genève une conférence de paix internationale pour chercher une issue politique à 31 mois d\'un conflit qui a fait, selon une ONG syrienne, plus de 120.000 morts.
Or, Ryad est réservé sur une participation à Genève-2 de l\'Iran, principal soutien du régime de Damas, et qui reprend l\'initiative depuis l\'amorce en septembre d\'un dégel avec l\'administration de Barack Obama.
Pour les Saoudiens, un compromis serait \"une participation à Genève de l\'Organisation de la coopération islamique (OCI)\", dont l\'Iran est membre, selon M. Ben Sagr, président du Gulf Research Centre.
John Kerry va parler à Ryad de la manière de \"mettre fin à la guerre en Syrie, (d\')avancer en Egypte\" ainsi que des \"négociations entre le groupe 5+1 (des grandes puissances) et l\'Iran\" sur le nucléaire les 7 et 8 novembre à Genève, a souligné sa porte-parole a Washington.
La visite donnera lieu à\"des discussions au plus haut niveau au sujet de toutes les questions sur lesquelles nous travaillons avec l\'Arabie saoudite\", a déclaré un haut responsable du département d\'Etat à des journalistes, indiquant que M. Kerry devrait être reçu par le roi Abdallah.
S\'agissant de la Syrie, les entretiens doivent porter sur \"la meilleure façon d\'aider la Coalition de l\'opposition et son aile militaire afin qu\'elle prenne elle-même l\'assurance d\'aller à Genève (...) négocier avec le régime\", a-t-il ajouté.
Selon le Wall Street Journal, le chef des renseignements saoudiens avait déclaré à des diplomates européens que Ryad réduirait sa coopération avec la CIA pour armer des rebelles syriens, et travaillerait avec la France et la Jordanie.
\"Ryad, qui reproche à Washington d\'avoir renoncé à une frappe militaire (...) oeuvre, avec l\'aide de la France, pour armer l\'opposition islamiste non radicale, et renforcer sa position avant Genève-2\", a indiqué un diplomate européen dans le Golfe.
Il estime néanmoins que la tension actuelle \"n\'aura pas beaucoup d\'impact sur les relations stratégiques entre les deux pays\", soulignant qu\'\"aucun pays ne pourra se substituer aux Etats-Unis pour (assurer) la sécurité du royaume\".