Parmi les motifs d’inquiétude, figure le niveau "inacceptable" du chômage, au-dessus de 12% dans la zone euro et qui touche largement plus d’un actif sur quatre en Espagne et en Grèce.
La zone euro connaîtra une reprise un peu plus faible que prévu l'an prochain, avec de nouveaux risques de dérapages des déficits publics en France et en Espagne qui pourraient obliger ces deux pays à faire des efforts budgétaires supplémentaires.
D'après les prévisions de la Commission européenne publiées mardi à Bruxelles, la France ne parviendra pas à passer en dessous des 3% du PIB de déficit public en 2015, comme elle s'y est engagée et comme elle l'a réaffirmé dans l'après-midi. Du moins, pas sans nouveaux efforts.
"S'il est nécessaire de faire plus" d'économies, "nous le ferons", a admis le ministre français du Budget, Bernard Cazeneuve, au cours d'une conférence de presse à Paris. Ces économies se feraient via de nouvelles coupes dans les dépenses, a-t-il précisé. "Si nous maintenons le rythme d'économies que nous réalisons en 2014, nous serons dans l'objectif de 3% à l'horizon 2015", a-t-il assuré.
Le déficit public prévu par Bruxelles pour la France est de 4,1% cette année, 3,8% l'an prochain et encore de 3,7% en 2015, à politique inchangée.
L'Espagne est dans la même situation : comme la France, elle a obtenu un délai de deux ans, en ce qui la concerne jusqu'en 2016, pour ramener son déficit dans les limites fixées au niveau européen. Mais il devrait atteindre 6,8% cette année, baisser à 5,9% l'an prochain, avant de remonter à 6,6% en 2015.
"Nous avons accordé un délai de deux ans précisément pour donner un peu de répit" à ces deux pays "et pour qu'ils entreprennent de sérieuses réformes économiques", a souligné le commissaire européen chargé des Affaires économiques, Olli Rehn. Il a promis d'en dire plus la semaine prochaine au moment de l'examen des budgets 2014 des pays de la zone euro.
Bruxelles dispose depuis cette année d'un droit de regard sur les budgets des 17, et pourra exiger des modifications s'ils ne sont pas conformes aux objectifs de déficit ou aux recommandations économiques faites au printemps. Le verdict sera rendu le vendredi 15 novembre.
A cette date, la Commission fera également le point sur les déséquilibres économiques en Europe. Elle pourrait épingler l'Allemagne pour ses excédents commerciaux. La balance des comptes courants allemands est largement excédentaire depuis des années, au-dessus de 6% du PIB.
La Commission pourrait entamer un examen approfondi de la situation. Cette démarche, assez formelle, serait toutefois une première pour Berlin, peu habitué à se faire taper sur les doigts.
Reprise lente
Prenant acte du ralentissement de la croissance dans les pays émergents qui pèse sur l'économie européenne, Bruxelles a une nouvelle fois mardi abaissé ses prévisions de croissance pour 2014, année où la zone euro tournera la page de la récession.
Alors qu'elle tablait sur une progression du PIB de 1,4% il y a tout juste un an, elle prévoit désormais 1,1%, avant 1,7% en 2015.
Sans surprise, la reprise devrait être soutenue par l'Allemagne qui devrait enregistrer une croissance de 1,7% en 2014, puis de 1,9% en 2015.
La France ne devrait finalement pas être en récession cette année, la Commission tablant désormais sur une croissance de 0,2%, puis une accélération, à 0,9% et 1,7%, les deux années suivantes.
"Il y a des signaux grandissants selon lesquels l'économie européenne a atteint un tournant. La consolidation budgétaire et les réformes structurelles entreprises ont créé une base pour la reprise", a estimé M. Rehn, même s'il est "trop tôt pour crier victoire".
Parmi les motifs d'inquiétude, figure le niveau "inacceptable" du chômage, au-dessus de 12% dans la zone euro et qui touche largement plus d'un actif sur quatre en Espagne et en Grèce. Le chômage dans l'ensemble de la zone euro ne devrait pas décroître avant 2015, selon les prévisions de la Commission.
L'assainissement budgétaire -la potion préconisée à Bruxelles pour sortir de la crise- devrait lui aussi se poursuivre, avec un déficit public évalué à 3,1% du PIB cette année dans la zone euro, 2,5% l'an prochain et 2,4% en 2015, dans les limites européennes. Mais ce remède reste très critiqué.
La "politique obsessionnelle de réduction des déficits étouffe la croissance", a réagi Hannes Swoboda, le chef de file des socialistes au Parlement européen. Il a plaidé pour "une approche équilibrée, avec une stratégie de consolidation budgétaire raisonnable à long terme qui permette de libérer l'investissement et de créer des emplois".