Pour Israël, tous les accords avec l’Iran sont de mauvais accords.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a mis en garde vendredi contre un accord avec l'Iran, son ennemi juré, sur le nucléaire en rencontrant le secrétaire d'Etat américain John Kerry en route pour Genève pour négocier un compromis.
"Israël n'est pas tenu par cet accord et fera tout le nécessaire pour se défendre et défendre la sécurité de son peuple", a plaidé M. Netanyahu lors d'un tête-à-tête très tendu avec M. Kerry à l'aéroport Ben Gourion de Tel-Aviv.
Après cette rencontre, M. Kerry a pris l'avion pour Genève, où semble se profiler, après des années de blocage, un accord sur le dossier nucléaire controversé iranien, en négociation depuis jeudi entre les grandes puissances et la République islamique.
M. Kerry doit "aider à réduire les divergences dans les négociations" à Genève où il se rend à l'invitation de la chef de la diplomatie de l'Union européenne Catherine Ashton, qui préside les discussions, selon le département d'Etat. Il doit y tenir une rencontre tripartite avec Mme Ashton et le chef de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif.
Ses homologues français et britannique, Laurent Fabius et William Hague, sont aussi en route pour Genève.
M. Netanyahu a réaffirmé que son pays rejetait "complètement" le compromis discuté à Genève, y voyant "l'affaire du siècle pour l'Iran".
Il a indiqué ensuite avoir rappelé à M. Kerry qu'il avait dit que "mieux valait pas d'accord qu'un mauvais accord". "Et l'accord en discussion est un mauvais accord, un très mauvais accord. L'Iran n'est pas obligé de démanteler ne serait-ce qu'une centrifugeuse", a-t-il déploré.
M. Netanyahu a "conjuré le secrétaire d'Etat Kerry de ne pas se précipiter pour signer, d'attendre, de réviser sa position, d'obtenir un bon accord".
Les discussions entre Téhéran et le groupe des 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni, France et Allemagne) à Genève sont centrées sur une proposition de l'Iran, où le changement de ton sur le dossier est perceptible depuis la prise de fonction en août du nouveau président modéré Hassan Rohani.
Selon cette proposition, non rendue publique, l'Iran accepterait de geler une partie de son programme controversé en échange de la levée de certaines sanctions internationales qui asphyxient son économie.
'Une erreur historique'
M. Zarif, interrogé par CNN, a jugé un accord possible avant vendredi soir, mais a exclu de stopper l'enrichissement d'uranium "dans son ensemble".
L'enrichissement d'uranium par l'Iran est au cœur des inquiétudes des Occidentaux et d'Israël, qui craignent que l'uranium enrichi à 20% soit utilisé pour obtenir de l'uranium à 90% pour un usage militaire.
Israël, considéré comme la seule puissance atomique de la région, et l'Occident soupçonnent l'Iran de dissimuler un volet militaire derrière son programme civil, ce que Téhéran dément.
L'Etat hébreu voit dans le programme atomique de Téhéran une menace pour son existence. L'Iran, quant à lui, ne reconnaît pas l'existence de l'Etat hébreu.
Mercredi, avant même la réunion de Genève, M. Netanyahu avait déjà mis en garde les négociateurs occidentaux contre "une erreur d'ampleur historique", répétant qu'Israël "se réserve toujours le droit de se défendre lui-même, par ses propres moyens, contre toute menace".
M. Netanyahu, qui a qualifié le président iranien de "loup déguisé en mouton", a maintes fois agité la menace d'une attaque préventive israélienne contre les sites nucléaires iraniens.
La rencontre de M. Netanyahu avec M. Kerry était la troisième rencontre en autant de jours.
M. Kerry, venu d'Amman spécialement pour voir M. Netanyahu, a interrompu sa tournée au Proche-Orient, pour se rendre à Genève.
Cette tournée était initialement consacrée à la crise dans le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens, chaque camp s'accusant de saper le dialogue renoué en juillet après trois ans d'interruption.
Jeudi, M. Kerry a averti Israël qu'un échec des pourparlers de paix pourrait conduire à davantage de violences. "Est-ce qu'Israël veut une troisième Intifada?", a-t-il dit en allusion aux deux soulèvements palestiniens (1987-1993, 2000-2005).
Mais M. Netanyahu lui a répondu que la faute en revenait aux Palestiniens. "Il faut mettre la pression là où elle doit être, c'est-à-dire sur les Palestiniens qui refusent de bouger".