"La France domine vers le haut (en termes de taux), mais tombe vers le bas sur le montant effectif récolté car nous avons beaucoup de charges déductibles".
L'annonce d'une "remise à plat" de la fiscalité française intervient au moment où tous les pays européens comptent leurs divisions dans un climat de guerre fiscale larvée.
Sur la taxation des entreprises, la bataille sera ardue pour la France, qui affiche selon Eurostat le taux le plus élevé de l'Union européenne, à 36,1% du bénéfice contre 23% au Royaume-Uni, 29,8% en Allemagne, 27,5% en Italie, 19% en Pologne et 12,5% en Irlande.
Ce classement arrêté en mars ne prend pas en compte la mise en place d'une surtaxe temporaire sur l'impôt des plus grosses sociétés en France, ni la décision du Portugal de baisser son taux à 23% contre 25% actuellement. Londres veut pour sa part descendre à 20%.
On ne compte plus les études de cabinets de conseil épinglant la fiscalité hexagonale sur les entreprises: la dernière en date, publiée mardi par PwC, annonce un "taux d'imposition total moyen de 64,7%" sur une "société type" en France, en prenant en compte les charges sociales.
Olivier Passet, de la société d'études économiques Xerfi, appelle toutefois à ne pas se focaliser sur les taux: en France, l'assiette de l'impôt sur les sociétés serait "un gruyère", cachant des taux effectifs parfois très bas, surtout pour les multinationales pratiquant l'optimisation fiscale.
Pour lui, "le taux au Royaume-Uni est bas, mais l'assiette est large et il y a de lourds impôts sur les postes fixes" comme l'immobilier.
Philippe Durand, avocat chez Landwell & associés, et correspondant de PwC, note: "La France domine vers le haut (en termes de taux), mais tombe vers le bas sur le montant effectif récolté car nous avons beaucoup de charges déductibles".
Pour M. Passet, qui voit une "guerre fiscale" en Europe, "le vrai problème est la divergence franco-allemande", plus que la fiscalité de pays périphériques: "L'Allemagne a été la première à comprendre que la fiscalité pouvait se substituer à l'arme de la dévaluation" et pratique selon lui "une fiscalité des entreprises un peu low cost" au regard de son rang économique.
M. Passet rappelle la décision allemande de relever son taux de TVA début 2007 de 16 à 19%, un geste destiné à transférer sur la consommation des charges pesant sur les entreprises.
"Une TVA dans la moyenne"
Pour ce qui concerne les particuliers, avec un taux d'imposition du revenu de 50,2%, la France n'est pas dans le bas du tableau, occupé à nouveau par les pays de l'Est (Roumanie 16%, Hongrie 16%) mais n'atteint pas les sommets des pays du Nord (Danemark à 55,6% ou Suède à 56,6%) (Eurostat).
Là encore, le taux ne fait pas tout. Christophe Chaillet, directeur de l'ingénierie patrimoniale chez HSBC France, rappelle que "d'autres pays ont des dispositifs, que n'a pas la France, qui permettent de faire baisser l'imposition".
"Le Royaume-Uni applique un principe qui permet en faisant verser son salaire à l'étranger, de ne payer d'impôt que sur la partie que l'on rapatrie", tandis qu'en Suisse, "c'est un système de forfait négocié au cas par cas avec le fisc".
"La différence se fait vraiment en France au niveau des prélèvements sociaux, qui ajoutent 15,5%", estime M. Chaillet.
"Pour le reste, sur la fiscalité des plus-values, le système français est lourd pour les placements spéculatifs mais retombe au niveau des autres grandes économies européennes pour les actifs détenus un certain temps". Enfin "l'Impôt sur la fortune est une exception française, mais dans le sens contraire la fiscalité française est très généreuse pour ce qui concerne les conjoints survivants en cas de décès, ainsi que pour la transmission d'entreprises".
Pour la TVA, avec son taux normal à 19,6%, devant passer à 20% le 1er janvier, la France est pile dans la moyenne de la zone euro (20,4% selon Eurostat) et sous la moyenne UE (21,3%).
Enfin, il est un domaine dans lequel la France est isolée: elle est le seul grand pays développé à ne pas prélever l'impôt sur le revenu à la source.