A la tête de ses priorités géostratégiques pour 2013 : le conflit syrien..
Nul ne doute que l’année 2013 a dévoilé le machiavélisme saoudien par excellence.
Car, pour la première fois dans l’histoire de ce royaume, la monarchie des alSaoud ne s’est pas contentée de s’impliquer dans telle ou telle question régionale ou tel ou tel conflit de manière sous-jacente. Mais elle s’est engagée directement dans des conflits régionaux allant jusqu’à déclarer haut et fort son soutien inconditionnel à des groupuscules islamistes terroristes takfiris liés à alQaida dans le but d’imposer un nouvel équilibre régional.
Selon Gary Brecher, un expert dans les questions stratégiques et les conflits , les Saoudiens savent parfaitement ce qu’ils font. « Ils sont, en fait, très fort pour exporter le chaos afin de maintenir l’ordre chez eux ».
En effet, le double attentat contre la banlieue-sud de Beyrouth, en passant par l’attentat contre l’ambassade iranienne au Liban, puis récemment le double-attentat contre Volgograd en Russie, ne sont que des actes de vengeance ou de désespoir de la part de l’Arabie-saoudite pour maintenir son statut de puissance régionale. Un statut remis en question d’une part par son embourbement dans le conflit syrien notamment à cause de son soutien aux groupes salafistes takfiris et d’autre part par la montée en puissance de l’Iran tant sur le plan régional que sur le plan international lui valant une crédibilité reconnue même par ses ennemis.
A la tête de ses priorités géostratégiques pour 2013 : le conflit syrien
Pour preuve, le régime a confié le dossier au très puissant chef des services secrets Bandar ben Sultan, l'ancien ambassadeur à Washington.
Dans un article publié le 6 août dernier, le journal libanais Al-Akhbar résumait le plan du prince saoudien pour le conflit syrien.
Selon des responsables politiques du Moyen-Orient qui l'ont rencontré, Bandar ben Sultan s'était donné huit mois pour armer et renforcer les rebelles syriens dans le but d'équilibrer les forces entre les belligérants sur terrain. Cette stratégie a pour objectif d'affaiblir le régime syrien en vue de prochaines négociations politiques, a-t-il expliqué à ses interlocuteurs.
Optimisme irréel, puisque Bandar était loin de se douter de la détermination de l’Etat syrien- peuple et gouvernement- à résister, mais aussi du retour en force de la Russie au Moyen-Orient, du soutien de la Chine et de l’Iran et surtout de la participation du Hezbollah sur le terrain. Autre difficulté aussi qu’il n’a pas envisagé est la fragmentation de la rébellion. Faute de pouvoir une victoire quelconque sur le terrain, l’ASL s’est disloquée laissant place à des Brigades de takfiris liées à alQaida, dont le plus important l’EIIL .
Un article publié par le Wall Street Journal le 25 août est allé dans le même sens. Celui que le journal qualifie de « vétéran de l'intrigue diplomatique à Washington et au Moyen-Orient » a expliqué aux Américains qu'il ne s'attendait pas à une victoire des rebelles sur le terrain dans l'immédiat.
Le journal américain rapporte que le prince Bandar a confié à son demi-frère Salman de superviser l'entraînement des rebelles syriens en Jordanie.
Par ailleurs, les Saoudiens ont commencé en hiver 2013 à déployer des efforts considérables pour convaincre les Américains et les puissances occidentales que le régime de Bachar Al-Assad a franchi « la ligne rouge » en utilisant des armes chimiques. Les services secrets saoudiens affirmaient en février que le régime a utilisé des armes chimiques en faisant parvenir des « preuves » aux Américains.
Selon le Wall Street Journal, le roi Abdallah d'Arabie saoudite a transmis un message au président Barack Obama en avril lui disant que « la crédibilité » des États-Unis serait écornée si le « régime syrien et son allié iranien gagnaient la bataille ».
Parallèlement à ce message, le prince Bandar et l'ambassadeur saoudien à Washington ont travaillé intensément, selon le journal, pour convaincre la Maison-Blanche et le Sénat de la nécessité de frapper la Syrie.
Par la suite, le prince s'est entretenu à Paris avec des responsables français et en juillet, il s'est rendu à Moscou, où il a expliqué, selon des diplomates, à Vladimir Poutine, que le royaume saoudien détient de fortes sommes d'argent qu'il va utiliser pour gagner la bataille en Syrie.
Il s’agit du même Bandar qui il y a un quart de siècle, a armé les moudjahidines afghans contre les troupes soviétiques.
Et donc il n’est pas surprenant que la réunion entre Poutine et Bandar soit tournée au vinaigre, surtout que ce dernier a commis l’erreur impardonnable de menacer Poutine en brandissant la carte des salafistes tchétchènes..
L'Arabie saoudite décide de faire « cavalier seul » ..
Apostrophant ses « amis et partenaires occidentaux » dans un éditorial pour le New York Times au langage très direct, l'ambassadeur saoudien à Londres Mohammad ben Nawaf ben Abdel Aziz al-Saoud estime que les relations du royaume avec ses partenaires « ont été mises à l'épreuve principalement en raison de différends sur l'Iran et la Syrie ».
Revendiquant son statut de « cavalier seul », Riyad, explique l'ambassadeur, « n'a d'autre choix que d'agir avec davantage de détermination dans les affaires internationales ». Mettant en avant ses « responsabilités » en matières économique et politique, le royaume, écrit-il, « agira pour assumer ces responsabilités, avec ou sans le soutien de nos partenaires occidentaux ».
À ceux s'inquiétant que des islamistes liés à el-Qaëda s'arrogent trop de place au sein de la rébellion en Syrie, Mohammad ben Nawaf ben Abdel Aziz al-Saoud répond qu'il est « trop facile pour certains d'utiliser la menace des actes terroristes d'el-Qaëda comme excuse à l'hésitation et à l'inaction », assurant le soutien du royaume à l'Armée syrienne libre et à l'opposition syrienne.
Les revanches de Bandar…
Première sur la liste : le Hezbollah
De l’avis de tous les observateurs et experts, les doubles attentats terroristes de la banlieue sud de Beyrouth, et aussi celui contre lambassade de l’Iran à Beyrouth portent l'empreinte de l'alliance entre Israël, les États-Unis et les takfiristes, ainsi que le gang de criminels conduits par Bandar ben Sultan au Moyen-Orient.
L’objectif de l’attentat était d’adresser un «message» au Hezbollah selon lequel « Soit vous vous retirez immédiatement de la Syrie soit vous allez payer chère votre soutien au régime syrien ».
Selon des sources bien informées, citées par le quotidien alAkhbar il est question d’une décision internationale et arabe, ou plutôt émanant de certains milieux sécuritaires arabes actifs dans leurs pays respectifs, notamment en Arabie saoudite, d’occuper le Hezbollah et de le plonger dans la confusion. Ces mêmes sources évoquent un rôle de premier plan du chef des services de renseignements saoudiens, le prince Bandar Ben Sultan, dans l’exécution de ce plan.
Dans ce contexte, Bandar, qui ne fait pas partie des prétendants au trône, occupe la place de l’homme fort des Etats-Unis dans le royaume. Sa mission, sur le plan interne, consiste à protéger le processus du transfert de la succession de la première génération à la deuxième. Sur le plan externe, sa tâche est de mettre à exécution l’agenda saoudien qui est étroitement lié à la CIA et aux centres de décision des institutions américaines.
Selon certaines informations, lors de l’une de ses visites aux Etats-Unis, le prince Bandar aurait visité Washington, où il a rencontré de hauts responsables de la CIA et de la Maison Blanche. Il aurait aussi eu une réunion qui n’a pas été rendu publique avec le président Barack Obama. Ce dernier aurait donné son accord à une demande saoudienne de confier au royaume l’exclusivité de la gestion des dossiers libanais et syriens, à condition que le prince Bandar en ait la responsabilité.
L'Arabie saoudite se comporte aujourd'hui en tant que direction régionale de l'alliance américano-israélo-takfiriste et Bandar est le chef des opérations de cet axe en Syrie, en Irak et au Liban. Le royaume wahhabite a ainsi acheté la décision européenne de placer le Hezbollah sur la liste des organisations terroristes, participe activement au financement des campagnes politiques et médiatiques contre la Résistance et alimente les projets de discorde au Liban .
Ainsi, le dernier attentat de Startco, qui a tué cinq personnes dont l’ex ministre des Finances Mohamad Chatah a comme déclenché le mot d’ordre chez le bloc du 14 Mars pour tenter d’imposer un gouvernement de fait accompli : ce que le premier ministre désigné Tammam Salam pro 14 mars tente de réaliser depuis des mois sans succès..
Et donc l’on assiste à une campagne sans précédent contre le Hezbollah au point que des voix se sont élevées parmi le bloc du 14 Mars proposant la fédération du Liban.
Deuxième sur la liste : la Russie
Après avoir échoué à renverser le régime syrien, les groupes takfiris, d’inspiration wahhabites se retournent contre la Russie qu’ils tiennent pour responsable de leur déconfiture en Syrie. Le prince Bandar Bin Sultan, passe donc à la vitesse supérieure et utilise les groupes terroristes qu’il contrôle pour faire plier Poutine , avec la bénédiction de la CIA. Tout cela à quelques semaines des Jeux olympiques d’hiver de Sotchi que certains dirigeants occidentaux, dont François Hollande qui vient de rendre une visite en Arabie saoudite d’où il a appelé à renverser Bachar al-Assad, ont d’ores et déjà annoncé qu’ils vont les boycotter..
Selon des informations officielles russes publiées à la suite de la seconde rencontre entre Bandar et Poutine qui a eu lieu le 3 décembre 2013, « Poutine et Bandar Sultan ont longuement évoqué le dossier syrien à la lumière des pourparlers de Genève II qui devront se tenir le 22 janvier. Ils ont échangé leurs points de vue pendant de longues heures sur ce sujet. »
Mais selon des sources russes officieuses, cette réunion s’était soldée par un échec total que ce soit sur le dossier syrien ou iranien. Elle a failli même tourner en une confrontation verbale peu diplomatique.
Bandar Bin Sultan avait cru intelligent de proposer à son hôte de freiner l’ardeur des groupes terroristes tchétchènes « qu’il contrôle, afin de laisser les jeux de Sotchi se dérouler normalement » .
La réaction de Poutine était immédiate et virulente. « Si les salafistes mettent les pieds en Asie Centrale, nous leur casserons les pieds.»
En choisissant la ville de Volgograd (Stalingrad de 1925 à 1961), située au bord de la Volga dans le sud de la Russie), symbole de la résistance héroïque contre le nazisme pendant la Deuxième guerre mondiale, les terroristes avaient voulu démoraliser l’opinion publique russe.
Quelques semaines avant la deuxième rencontre Poutine-Bandar, un premier attentat a eu lieu le 21 octobre 2013 dans un bus de Volgograd, provoquant la mort de 7 personnes et 30 blessés. Le dimanche 29 et lundi 30 décembre, deux autres attentats qui semblent porter la marque du groupe jihadiste de Dokou Oumarov, ont eu lieu . Dimanche, au moins 17 personnes ont péri et une quarantaine ont été blessées lors d'une explosion à la gare de Volgograd. Lundi matin, 14 autres personnes ont été tuées et 28 blessées par un attentat-suicide qui a entièrement détruit un trolleybus au centre-ville.
Commentant ces attentats, Karim Bouali (journaliste du site algérien Algérie patriotique) écrit qu’« Il serait difficile de ne pas déceler une coïncidence entre la série d’attentats terroristes en Russie et le soutien de ce pays à la Syrie et à l’Ukraine. Cette relation entre la dégradation de la situation sécuritaire en Russie et les événements qui secouent ces deux pays est d’autant plus plausible que Moscou persiste dans sa politique de résistance aux velléités hégémoniques occidentales. .. Dans le dossier syrien, la Russie, comme la Chine, a réagi fermement aux tentatives occidentales de faire tomber le régime en place et lui substituer un pouvoir islamiste, financé par le Qatar et l’Arabie Saoudite, et armé par la France et la Grande-Bretagne. Toutes les tentatives de ce quarteron de pays de déboulonner l’inamovible Bachar Al-Assad ont été vouées à l’échec. Sur le plan diplomatique, le veto russe a rendu caducs les efforts effrénés de Paris d’imposer une résolution pour une intervention militaire de l’Otan en Syrie, comme ce fut le cas en Libye. Sur le plan militaire, l’envoi d’armes et d’agents secrets pour former la rébellion syrienne au terrorisme a été vain. L’armée syrienne continue de marquer des points grâce, entre autres, au soutien militaire de la Russie qui considère ce pays arabe comme un des derniers bastions face à l’influence de l’Ouest ».
Par conséquent, on peut s’attendre à une année 2014 où l’Arabie-saoudite serait le principal fauteur de troubles compte tenu de sa politique offensive et déstabilisatrice dans la région surtout après son rapprochement avec l’entité sioniste de l’aveu de cette dernière...