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Bachar al-Assad est aujourd’hui plus fort qu’il ne l’était il y a 15 mois.

Bachar al-Assad est aujourd’hui plus fort qu’il ne l’était il y a 15 mois.

Principal bailleur de fonds de l’opposition, l’Arabie saoudite a joué un rôle clé dans la transformation de la Syrie en refuge pour les jihadistes étrangers, ayant la même idéologie que ceux qui ont mené les attaques du 11 septembre.

«Les Français, les Britanniques et les Américains n'ont aucune compréhension de ce qui se passe ici », m'avait dit à l'été 2012 un diplomate étranger posté en Syrie. A l'époque, il était encore possible, pour un étranger comme moi, arrivé récemment en Syrie à partir de Londres, d'imaginer un départ imminent de Bachar al-Assad. Un fonctionnaire du Département d'État américain avait même qualifié son régime d'«homme mort qui marche».

Mais les Occidentaux, qui avaient passé des années en Syrie, étaient moins optimistes. Ils ont rejeté les rapports de la presse US prophétisant la chute du régime. Assad, disaient-ils, était populaire parmi les minorités. Par ailleurs, la loyauté de l'armée lui était quasi-absolue.

Aujourd'hui, Assad est plus puissant qu'il ne l'était il y a 15 mois. Car malgré toutes les prédictions sur la chute imminente de son régime, la machine baathiste reste le seul élément qui fonctionne encore en Syrie.

En dépit du carnage, la vie quotidienne à Damas, bastion d'Assad, continue en grande partie comme avant. Il n'y a eu aucune grande défection, et, surtout, l'armée arabe syrienne, malgré les 30.000 morts dans ses rangs, continue de prêter allégeance à Assad. Ces deux derniers mois, elle a récupéré des territoires autour de Damas.

Pourtant, au lieu de réajuster sa réponse, Washington reste attaché aux mêmes objectifs politiques étroits: l'élimination d'Assad du pouvoir.
C'est une attente irréaliste. Loin d'aboutir au départ d'Assad, cet objectif prolongera la violence. Les représentants du gouvernement syrien ne sont pas allés à la table des négociations pour abandonner leurs gains. Ledit communiqué de Genève 1, qui constitue la base de la demande de Kerry, n'appelle pas au départ d'Assad. Et ce dernier n'est pas prêt à partir sans une menace crédible d'utilisation de la force par les États-Unis.

Kerry a affirmé qu'une telle menace était encore «sur la table». En vérité, les options de Washington sont limitées par le fait grandement embarrassant que l'opposition qui est venue en Suisse pour arracher le pouvoir à Assad ne dispose pas d'une base importante en Syrie. Ses membres ont peu d'emprise sur les moudjahidines qui combattent les forces gouvernementales.

Une grande partie du territoire qui échappe au contrôle du gouvernement est tenu par des groupes liés à Al-Qaïda. Et ces groupes s'opposent aux pourparlers de paix. Ils sont conscients qu'ils pourraient bénéficier de toute tentative occidentale de déloger Assad. Même les éléments «modérés» de l'opposition semblent être hors du contrôle de Washington.

Pendant des semaines, John Kerry a tenté d'obtenir un siège pour Téhéran aux négociations de Montreux, parce qu'il a compris que la présence de l'Iran, en tant que puissance régionale, est indispensable pour réaliser des progrès. Cela a irrité l'Arabie saoudite, la théocratie sunnite qui est alarmée par le dégel des relations entre Téhéran et Washington.

Principal bailleur de fonds de l'opposition, l'Arabie saoudite a joué un rôle clé dans la transformation de la Syrie en refuge pour les jihadistes étrangers, ayant la même idéologie que ceux qui ont mené les attaques du 11 septembre.

Tout cela explique pourquoi Assad a ridiculisé les négociations en les qualifiant de "plaisanterie". Sa décision d'envoyer une délégation répondait aux souhaits de ses sponsors en Russie, qui ont travaillé dur pour empêcher une frappe de l'armée américaine contre leur client l'année dernière. Ces sponsors sont impatients de démontrer l'utilité de la diplomatie.

Mais le cadre des négociations semble déjà obsolète. Etablies en 2012 par Kofi Annan, alors émissaire de l'Onu en Syrie, ces dispositions -appelant à un organe transitoire par consentement mutuel, au dialogue national, à des élections libres, et à un examen complet de la Constitution- étaient intervenues alors qu'Assad semblait faible et l'opposition unifiée. Les grandes puissances, qui ont aidé à préparer la conférence de Genève, anticipant peut-être la chute d'Assad, ont refusé de la soutenir. Annan a quitté son poste dans la frustration.

Pour les Syriens ordinaires, les négociations en cours en Suisse ressemblent à un numéro de cirque. Assad, qui a le sentiment d'être triomphant, refuse de partir. L'opposition interne déchirée refuse de tempérer ses demandes. L'Occident n'a pas la volonté d'intervenir militairement, regarde avec une rage impuissante.

 

CNN.Com

Traduit par Médiarama