Moscou accuse Washington de chantage,d’intimidation, et de menaces en Ukraine.
Le Kremlin a haussé le ton ces deux derniers jours contre l’ingérence des puissances occidentales dans la crise ukrainienne.
Chantage et coup d'état
Par la voix conseiller du président Vladimir Poutine, Sergueï Glaziev, il a sommé ce jeudi les Etats-Unis de cesser de faire du chantage à l'Ukraine et de financer "les rebelles" alors que la secrétaire d'Etat adjointe Victoria Nuland est revenue jeudi à Kiev.
"L'Occident doit arrêter le chantage et l'intimidation", a déclaré un conseiller du président Vladimir Poutine, Sergueï Glaziev, dans une interview au quotidien Kommersant Ukraine jeudi en citant à titre d'exemple une rencontre de Mme Nuland en décembre avec les oligarques proches du pouvoir.
"Autant que nous sachions, elle a menacé les oligarques de les placer sur une liste noire américaine si le président Ianoukovitch ne cède pas le pouvoir à l'opposition. Cela n'a rien à voir avec le droit international", a-t-il poursuivi.
"Il semble que les Etats-Unis misent sur un coup d'Etat", a encore dit M. Glaziev en affirmant que les Américains dépensaient "20 millions de dollars par semaine pour financer l'opposition et les rebelles, y compris pour les armer".
M. Glaziev a dénoncé "une tentative de coup d'Etat en Ukraine" que le pouvoir doit, selon lui, combattre par la force pour éviter "le chaos".
Il a également rappelé que la Russie au même titre que les Etats-Unis était "garante" de la souveraineté de l'Ukraine après le renoncement de cette dernière en 1994 aux armes nucléaires et pourrait à ce titre "intervenir dans des conflits de ce type".
"Ce que font aujourd'hui les Américains de façon unilatérale est une violation grossière de cet accord", a-t-il fait valoir.
C'est Kiev qui décide
Sur la même longueur d’ondes, et face à l’intervention de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) qui a offert ses services pour le règlement de la crise, le vice-ministre russe des Affaires étrangères Alexeï Mechkov a estimé que les autorités ukrainiennes doivent décider elles-mêmes.
"C'est à l'administration ukrainienne de décider si le pays a besoin d'une médiation internationale ou non", a indiqué M.Mechkov dans une interview accordée à RIA Novosti.
Avertissement
Mercredi, le porte-parole du président Poutine, Dmitri Peskov, avait averti que Moscou ne maintiendrait son aide de 15 milliards de dollars à l'Ukraine et la baisse de 30% du prix du gaz qu’à condition que Kiev respecte de son côté ses engagements.
Nuland à Kiev
Ce jeudi, la secrétaire d'Etat américaine adjointe, Victoria Nuland, est arrivée à Kiev. Et ce au lendemain de la visite de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton.
Elle y a immédiatement rencontré les trois principaux dirigeants de l'opposition, Vitali Klitschko, Arseni Iatseniouk et Oleg Tiagnybok, et devrait rencontrer dans la journée le président Viktor Ianoukovitch, a-t-on appris auprès de l'ambassade des Etats-Unis.
Elle devra présenter les résultats de ses entretiens vendredi lors d'une conférence de presse à Kiev, a indiqué l'ambassade des Etats-Unis.
L'Ukraine est en proie depuis fin novembre à une contestation contre le pouvoir sur fond de crise économique, et ce depuis que le président ukrainien a rejeté le partenariat européen, lui préférant celui avec le voisin russe. Comme cette contestation est soutenue avec acharnement par les puissances occidentales qui s’emploient à sortir ce pays de la sphère pro russe, elle ne connait aucun répit et se trouve alimenté sans cesse.
Ashton accusée de mentir
Mercredi, la visite de Mme Ashton n'est pas passé inaperçue en raison entre autre des engagements qu'elle a données sur d'éventuelles aides économiques à l'Ukraine.
Elle a été accusée de mentir ouvertement, en promettant publiquement au pays une aide financière généreuse, a écrit mercredi le quotidien Rossiïskaïa gazeta, cité par l'agence russe Rio Novosti.
"La chef de la diplomatie européenne propose à l'opposition ce que les autorités économiques de l'UE ne sont pas capables d'offrir à l'Ukraine", se moque le journal .
Lequel constate aussi que la déclaration d'Ashton affirmant que Washington et Bruxelles travaillaient ensemble sur un plan d'aide financière au profit de l'Ukraine, a été rapidement démentie par les Américains et les Européens.
D’après la porte-parole du département d'État Jennifer Psaki toutes les discussions sur l'octroi d'une telle aide sont de "nature préliminaire" et aucune décision n'a encore été prise à ce sujet. Alors que le président de la Commission européenne José Manuel Barroso a réagi plus fermement en réitérant la position de l'UE : personne n'a l'intention de payer l’Ukraine pour qu’elle signe un accord d'association avec l'Union européenne.
Le rejet des médias russes
De plus, il semble que la visite d’Ashton a provoqué un grand scandale diplomatique, du fait que de nombreux médias russes n'ont pas été admis à la conférence qu’elle a organisée, en dépit de leurs requêtes, au motif qu’il y a "des difficultés en termes de logistique et de sécurité", selon le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères (MAE) Alexandre Loukachevitch, selon Ria Novosti.
Note de Ria
L’agence de presse russe conclut sur cette note: " les Ukrainiens devront faire un choix entre les crédits russes et la coopération entre les entreprises des deux pays, ou les promesses des politiciens européens d'examiner à terme l'adhésion de Kiev à l'UE. Après tout, les commissaires européens ne peuvent rien proposer de concret à l'Ukraine. Mais l'opposition prend pourtant ces promesses pour argent comptant dans l'espoir de convaincre les Ukrainiens avec de belles paroles sur un avenir prospère:.
Manif avec gourdins
Ceci dit, durant la visite de la diplomate américaine , indique l’AFP, une colonne de manifestants de l'opposition d'environ deux mille personnes a quitté la place de l'Indépendance, le Maïdan, pour se diriger vers le parlement, protégé par des barricades de camions des troupes de sécurité.
Scandant "Honte au président" ou "Gloire aux patriotes et aux héros du Maïdan", faisant flotter les drapeaux nationaux et ceux des partis d'opposition, les manifestants, dont beaucoup étaient casqués, armés de matraques en bois et munis de boucliers, ont défilé en bon ordre devant les forces de l'ordre.
Selon la radio Voix de la Russie, citant un communiqué du ministère ukrainien de l'Intérieur, la plupart des manifestants qui se sont dirigés vers la Rada ukrainienne (parlement) de Kiev, sont armés de gourdins et de pelles.
"L'argent promis (par Moscou) ce n'est pas la Russie qui le donne à l'Ukraine, c'est Poutine qui le donne à Ianoukovitch, ce n'est pas pour nous", ajoute une manifestante quinquagénaire, Maria.
Dans le Parlement ukrainien, les travaux portent actuellement sur la réforme constitutionnelle réclamée par l'opposition pour revenir à la Constitution de 2004 et réduire les pouvoirs présidentiels. Sans s'y opposer frontalement, M. Ianoukovitch propose de rédiger un nouveau texte, ce que l'opposition refuse, jugeant le procédé trop long.
Explosion: les enquêteurs interdits d'accès
Dans l’après-midi de ce jeudi, une explosion a eu lieu à la Maison des syndicats transformée par l’opposition pro occidentale en QG, au centre de Kiev.
Blessant un opposant, elle a été provoquée par un colis piégé, ont indiqué ses camarades, cités par l'agence Interfax-Ukraine.
L'homme était en train d'ouvrir un colis marqué "médicaments" et faisant partie des nombreux dons reçus, lorsque l'explosion s'est produite en lui arrachant la main, ont indiqué les militants, toujours selon Interfax.
La police de Kiev s'est bornée à confirmer sur son site internet l'hospitalisation d'un homme blessé à la main et au visage par une explosion, écrit l'AFP.
Alors que selon la Voix de la Russie, les manifestants ne laissent pas les enquêteurs entrer dans le bâtiment.