Depuis 2006, l’année où l’Ocha (le Bureau de la coordination des affaires humanitaires) a commencé ses statistiques, il y a eu 2.100 attaques par des colons. Les totaux annuels sont passés de 115 en 2006 à 399 en 2013.
En 8 ans, les attaques de colons israéliens contre des Palestiniens ont pratiquement été multipliées par 4, chiffre qui s’ajoute à la dénonciation des forces de sécurité israéliennes, qui ont échoué à juguler les campagnes dénommées « pricetag - le prix à payer » : celles-ci consistent à détruire des arbres fruitiers, à dégrader ou incendier des mosquées et à passer à tabac des fermiers palestiniens.
Des voix critiques disent que les gouvernements influencés par des politiciens favorables à la colonisation ont souvent hésité à se confronter aux colons, même à ceux qui sont considérés comme les ultras de la frange dure.
La semaine dernière, un incident dramatique près de ce village rural palestinien a mis en lumière le potentiel aggravant de telles attaques qui mettent en danger les fragiles efforts de paix sous parrainage étatsunien.
Les opérations " prix à payer "
« Le prix à payer » fait référence aux attaques lancées contre des Palestiniens en guise de représailles à des actions de l’armée contre l’une des dizaines de colonies en Cisjordanie.
Les événements de la semaine passée ont commencé quand l’armée a arraché des oliviers plantés par des colons de l’implantation de Esh Kodesh sur des terres palestiniennes privées.
Plus tard ce même jour, une vingtaine d’Israéliens se sont dirigés vers les villages voisins, notamment Qousra. Selon les Palestiniens, des colons qui vandalisaient des oliviers et lançaient des pierres ont été capturés par des villageois et gardés pendant deux heures, avant d’être remis à l’armée.
Des vidéos des colons cernés par une foule hostile ont fait la une de la presse israélienne du jour, certains commentateurs soulignant qu’un sérieux bain de sang avait été évité grâce à des Palestiniens qui avaient protégé les colons.
Selon la police, sept Israéliens ont été interrogés et assignés à résidence. Le ministre de la Défense, Moshe Yaalon, a prévenu qu’il ferait preuve de tolérance zéro, mais les Palestiniens restent sceptiques.
Depuis, il y a eu déjà deux incidents de vandalisme qui semblent être une réponse à l’incident de Qousra. Le mercredi, des villageois de cette zone ont trouvé la porte d’une mosquée incendiée, les tapis de prière brûlés. Des graffiti disaient : « Le sang pour le sang, Qousra ».
Lors de dizaines d’autres attaques, des colons ont arraché des centaines d’arbres à Qousra, tué 18 ovins, incendié 6 voitures et une mosquée, a dit le maire Abdel Azim Wadi. Le village a perdu la moitié de ses terres au profit des colonies.
Selon M. Wadi, les soldats israéliens soit restent en standby soit envoient du gaz lacrymogène, des balles gaînées de caoutchouc et à l’occasion des vraies balles si les attaques dégénèrent en batailles de pierres.
Un habitant de Qousra a été tué par balle et des dizaines ont déjà été blessés par les colons et les soldats.
Selon les Palestiniens, les opérations « prix à payer » font partie de la politique d’Israël pour affermir son contrôle sur la Cisjordanie, la plus grande des trois zones "trophées- de-guerre" que les Palestiniens veulent pour leur état. Ils notent qu’Israël a fourni un soutien logistique aux implantations même quand celles-ci ont été installées sans autorisation gouvernementale.
« Qui donc leur donne l’eau, l’électricité, assure leur sécurité et construit leurs routes ? » demande Abdel Hakim Odeh, habitant de Qousra à propos de la politique gouvernementale à l’égard des implantations sauvages. « Ces bandes sont utilisées par le gouvernement contre les Palestiniens ».
Le colonel Eran Makov, commandant adjoint d’une division de l’armée israélienne en Cisjordanie, dit que les soldats ont reçu des ordres clairs pour faire cesser toute violence entre civils sur le territoire.
« La politique des forces israéliennes est d’interrompre tout incident quand une personne en agresse une autre ».
Le colonel Makov dit que les soldats ne peuvent être partout à la fois pour bloquer des attaques et qu’il est parfois difficile de répondre rapidement en terrain accidenté. Pour les incidents de la semaine passée, les soldats auraient répondu dans les 15 minutes, selon lui. Il ajoute que les jeunes appelés ne sont pas nécessairement entraînés pour des opérations de police, mais que ceux qui s’abstiennent d’intervenir risquent une sanction disciplinaire.
Les militaires ont l’autorité globale en Cisjordanie et les soldats sont généralement les premiers à répondre à des troubles alors que la police israélienne s’occupe des civils israéliens, y compris des enquêtes sur les violences des colons.
Statistiques alarmants
Selon le groupe de défense des droits Yesh Din, seuls 8,5 % des 825 dossiers sur lesquels la police a enquêté ont donné lieu à des mises en examen. Dans la plupart des cas, les enquêteurs ne trouvent pas les suspects locaux ou ne réussissent pas à collecter assez de preuves.
A Qousra et dans deux villages voisins les habitants ont fait enregistrer 21 dépôts de plaintes à la police entre 2011 et 2013, mais pas un seul n’a débouché sur une inculpation jusqu’à présent. Douze dossiers ont été clos, notamment la fusillade de février où Hilmi Hassan, 28 ans, avait été grièvement blessé lors d’un affrontement avec des colons.
« Si un colon avait reçu une balle, ils auraient imposé le couvre-feu à toute la zone mais quand un Palestinien comme moi est touché, ils l’accusent d’avoir provoqué les colons ... » Hilmi Hassan.
La police a formé des unités spéciales pour gérer les attaques « prix à payer ». En Cisjordanie, une unité de 30 officiers travaille depuis un an, essentiellement sur la surveillance, la collecte de renseignements et les opérations clandestines, déclare son porte-parole Micky Rosenfeld.
Selon l’armée, les dépôts de plaintes palestiniens concernant des attaques de colons au cours de la récolte annuelle des olives aurait diminué de moitié, soit 20, entre 2012 et 2013.
Malgré ces efforts, les statistiques de l’ONU montrent une augmentation croissante du nombre d’attaques de colons.
Depuis 2006, l’année où l’Ocha (le Bureau de la coordination des affaires humanitaires) a commencé ses statistiques, il y a eu 2.100 attaques par des colons. Les totaux annuels sont passés de 115 en 2006 à 399 en 2013.
Au cours de ces huit dernières années, 10 Palestiniens ont été tués par des colons . Plus de 1.700 Palestiniens ont été blessés par des colons ou des soldats au cours d’affrontements, tandis que 324 colons et 37 soldats l’auraient été blessés par des Palestiniens au cours de telles confrontations.
Sources : Info-Palestine