Dans la guerre en Syrie, les médias utilisent une mauvaise terminologie pour relater les faits sur le terrain... Sachant que rien n’est fait gratuitement!
Alors que le conflit fait rage sur le terrain en Syrie, un autre conflit non moins dangereux se déroule dans les médias : celui des termes choisis pour définir cette guerre ou encore les belligérants qui s’y affrontent.
Ce qui est le plus attirant dans la couverture médiatique occidentale, suivie –aveuglement ou intentionnellement - par les médias arabes, est l’image présentée à l’opinion publique mondiale des groupes radicaux qui agissent sur le terrain.
Des prisonniers libérés devenus rebelles !
Des milliers d’anciens prisonniers, incarcérés pour des crimes de meurtre, de délinquance de tout genre, de corruption, de vol ou de viol, et la liste s’allonge, ont retrouvé leur liberté subitement au début du conflit syrien. Eux qui languissaient dans les prisons des pays réactionnaires, comme dans les pays du Golfe, où le citoyen purge des dizaines d’années pour avoir offensé un roi!
Mais en échange de cette liberté, les régimes précités cherchent à profiter des faveurs de ces personnes, longuement expérimentées dans le domaine du meurtre et des crimes.
Ces hommes libérés se sont vus alors transportés aux frontières avec la Syrie, telle qu’en Jordanie, en Turquie ou encore au Liban. Et les armes, de tout type, les attendaient encore. Leur mission était claire : participer à la guerre en Syrie dans le but de renverser le président Bachar el-Assad.
Voilà donc comment le « printemps » syrien a commencé il y a trois ans. Des rassemblements populaires regroupant quelques dizaines de villageois dans les localités limitrophes telles que Deraa, Deir el Zour, Raqqa et autres, ont dégénéré en quelques semaines en accrochages armés violents, auxquels ont pris part essentiellement des milliers d'hommes non Syriens, dont l’accent est conforme à celui des pays du Golfe et du Maghreb.
Dire qu’un terroriste est rebelle, qu’un meurtrier est djihadiste
Bien que cette réalité soit connue de tous, et filmée par les médias du monde entier, et que les listes des noms des hommes venus du Golfe persique en Syrie ne cessent de s’allonger, les médias occidentaux – et les arabes qui leur sont affiliés – ont défini ces groupes comme étant des rebelles !
Pourtant, une simple recherche dans le dictionnaire précise que le rebelle est « la personne qui refuse de se soumettre à une autorité ». Contre quelle autorité les miliciens du Golfe, de la Libye ou de la Tunisie et autres pays devraient-ils se révolter en principe alors ?
Pis encore, d’autres appellations inadéquates sont largement utilisées par ces médias, qui cherchent à faire d’une pierre deux coups. Comment dire par exemple que ces groupes armés sont des djihadistes ? des islamistes ? et pourquoi ne sont-ils pas considérés comme des groupes radicaux, fanatiques, voire terroristes, compte tenu des massacres horribles perpétrés tous les jours en Syrie au su et au vu du monde entier?
A cette question, le professeur en sociologie politique, Dr.Talal Atrissi, confie au site francophone d’al-Manar que « l’objectif du recours à des termes mélioratifs pour désigner des groupes qui commettent des atrocités est de présenter à l’opinion publique internationale une image positive de ces miliciens et d’encourager par la suite d’autres jeunes à venir participer à la guerre à leurs côtés ».
Pour cette raison, le nombre des Européens convertis à l’islam et venus combattre en Syrie grandit de plus en plus, convaincus - selon les propos rapportés par leurs familles – qu’ils viennent défendre un peuple opprimé par son dirigeant.
Au moment où ces médias occidentaux et arabes occultent les exactions des miliciens actifs en Syrie, ils mettent en exergue les bombardements menés par l’armée syrienne contre les repaires de ces groupes armés, pour refléter la « barbarie et la violence » des autorités syriennes.
«Sur ce point, il convient de noter qu’à la place des autorités officielles syriennes, les médias de propagande occidentale utilise le régime syrien, ou encore les forces d’Assad, pour ôter toute forme de légitimité et toute justification à la riposte officielle syrienne à cette guerre imposée par l’extérieur. De plus, le fait de qualifier les éléments armés de djihadistes vise à montrer que du point de vue islamique, il s’agit d’un combat légitime et obligatoire contre un tyran », explique-t-il.
Des groupes « djihadistes » trop loin du « Jihad » !
Mais ces mêmes médias ne font aucune allusion aux règles du jihad en Islam, des règles qui doivent être normalement strictement suivies par les véritables combattants brandissant la bannière de l’islam. Sachant qu’en Islam, il est prohibé en pratiquant le jihad de piétiner une fleur ou une fourmi passant sur la même route empruntée par les combattants.
Sachant également qu’il est détestable de tuer l’ennemi s’il est en train de prendre la fuite. Face à ces interdictions bien définies, les groupes dits faussement « djihadistes » sont en train « de massacrer des civils innocents injustement, et ces groupes appelés à tort « islamistes » ne font que déformer la véritable image de l’islam », déplore professeur Atrissi.
Entre les assaillants du Hezbollah et les combattants takfiris
Pour Atrissi, « rien n’est gratuit. Les médias occidentaux qui ont longtemps couvert le conflit libano-israélien et palestino-israélien n’ont jamais dit que le Hezbollah, le Hamas ou le jihad islamique sont des mouvements de résistance contre l’occupation sioniste. Pour ces médias, l’Etat hébreu se défend contre des assaillants extrémistes et des miliciens qui perpètrent des attentats suicides contre les Israéliens » !
« La propagande arabo-occidentale n’a jamais osé montrer comment les combattants du Hezbollah, une fois le Sud Liban libéré, ont traité humainement les collaborateurs avec l’ennemi, ou encore comment ils ont laissé la communauté chrétienne vivre en paix dans ses villages », rappelle-t-il, ajoutant que le Hezbollah était toujours présenté comme une milice soutenue par l’Iran pour ancrer dans l’inconscient collectif que ce parti possède un agenda extérieur et qu’il n’est point patriotique.
Le tollé suscité par la MTV
Il y a déjà quelques jours, une chaine de télévision libanaise – MTV – jouant le même jeu médiatique occidental, a provoqué un tollé en présentant un terroriste qui s’est fait exploser contre la population dans la banlieue Sud de Beyrouth comme étant auteur d’une opération « martyre » !
Pourtant, cette même chaine a toujours qualifié de « suicidaires » les combattants du Hezbollah et des mouvements de résistance palestinienne qui luttent contre l’occupation israélienne.
Malgré les excuses présentées par la direction de la chaine, l’opinion publique n’a point été convaincue par les alibis fournis, comme quoi, il s’agissait d’une erreur et d’une mauvaise évaluation faite par le rédacteur concerné.
Une terminologie à portée confessionnelle
La guerre médiatique n’a pas de limites. Elle dépasse les frontières géographiques des pays pour réaliser des objectifs régionaux. C’est ainsi qu’en couvrant les combats en cours en Irak, la chaine de télévision saoudienne al-Arabiya parle de l’armée de Maliki qui attaque les combattants d’al-Anbar au lieu de dire l’armée irakienne.
L’objectif est clair : attiser les sentiments confessionnels des peuples arabes à majorité sunnite, en montrant que le chiite Nouri el Maliki mène une guerre contre la communauté sunnite !
Tout comme dans les autres pays multiconfessionnels, à titre d’exemple à Bahrein, où les manifestants pacifiques sont toujours qualifiés de « chiites qui veulent renverser la dynastie sunnite », ou également au Liban, lorsqu’on rappelle toujours que le Hezbollah est « une milice chiite obéissant aux ordres du guide suprême en Iran » !
Et là aussi, le professeur universitaire Talal Atrissi rappelle les propos de l’ancienne secrétaire d’Etat américaine Condolezza Rice qui disait tout le temps en parlant de la région arabe : « Les pays arabes sunnites modérés »… dans le but de placer ces pays en face de l’Iran, ce pays chiite qui cherche à dominer la région arabe, à majorité sunnite !
Le mot… une arme non létale aussi
Quoi qu’il en soit, le véritable enjeu de cette guerre soft ou douce est d’ancrer dans le conscient collectif arabe ou international un mode de réflexion unique visant à présenter des prototypes sur l’islam qu’il faut confronter partout, et par la suite, justifier la politique belliqueuse occidentale contre le monde islamique, sous le prétexte de la lutte contre le « terrorisme islamique ». Pour parvenir à cette fin, on a recours à une autre forme d’arme non létale : le mot.