Cette décision survient alors que Washington affronte les critiques à travers la monde, dont celles de dirigeants étrangers, en raison des méthodes employées par l’agence de renseignement NSA.
Le gouvernement américain a annoncé qu'il était prêt à abandonner son rôle central dans l'attribution des noms de domaine sur internet au profit d'une gouvernance mondiale.
Le département du Commerce a indiqué dans un communiqué qu'il allait convoquer "les acteurs à travers le monde pour réfléchir à des pistes" qui permettront de retirer le rôle central du gouvernement américain dans la supervision de l'Icann, le régulateur mondial d'Internet chargé de valider les noms de domaines.
L'idée, a argué le département du Commerce, est "de soutenir et de renforcer le modèle de gouvernance globale d'internet".
"Le temps est venu de lancer un processus de transition", a déclaré le secrétaire adjoint au Commerce, Lawrence Strickling.
Créé en 1998, l'Icann délivre les noms de domaine sur internet, comme .com ou .gov. Il a son siège en Californie et relève à ce titre, en dernière instance, du département du Commerce américain.
Son président Fadi Chehadé a expliqué le mois dernier à l'AFP que son organisme souhaitait "arriver à un consensus sur un modèle de gouvernance globale d'internet" et regrettait qu'il soit encore vu comme une institution occidentale.
La présidente brésilienne Dilma Rousseff avait ainsi proposé un contrôle multilatéral de l'utilisation d'internet devant l'assemblée générale de l'ONU en septembre 2013.
Dans un communiqué vendredi, M. Chehadé a salué la décision américaine.
"Nous invitons les gouvernements, le secteur privé, la société civile et les organismes impliqués dans internet à travers le monde à nous rejoindre pour mettre en oeuvre cette phase de transition", a-t-il dit dans un communiqué.
"Toutes les parties prenantes méritent d'avoir voix au chapitre de façon égale dans la gestion et la gouvernance de cette ressource mondiale", a ajouté M. Chehadé.
Une conférence internationale sur internet doit se tenir au Brésil en avril, au cours de laquelle le patron de l'Icann a dit vouloir "atteindre un consensus sur un modèle de gouvernance globale de l'internet".
Pour l'heure, la démarche américaine ne devrait avoir aucun impact pour les internautes et l'Icann continuera de son côté à administrer les noms de domaines.
Risques de censure
Cette décision survient alors que Washington affronte les critiques à travers la monde, dont celles de dirigeants étrangers, en raison des méthodes employées par l'agence de renseignement NSA.
Et la décision américaine ne manque pas de poser des questions sur la gestion de l'Icann et d'internet sur le long terme.
Daniel Castro, analyste à la Fondation pour l'innovation et les technologies de l'information (ITIF), est d'ailleurs tout sauf optimiste.
"Le gouvernement américain lui-même est conscient que (sa décision) est négative. C'est bien pour cela qu'elle a été annoncée un vendredi après-midi", tonne-t-il lors d'une interview accordée à l'AFP.
A en croire M. Castro, le risque existe que des gouvernements mal intentionnés s'engouffrent dans la brèche ouverte par Washington et manipulent internet à des fins politiques.
"Etant donné que certains pays ont clairement dit qu'ils comptaient utiliser internet à des fins politiques, la stabilité à long terme des
fonctionnalités les plus rudimentaires d'internet est en péril", a-t-il ajouté.
En clair: "les internautes et les entreprises craignent que des pays comme la Russie ou la Chine ne manipulent l'Icann pour censurer des contenus hors de leurs frontières", a écrit M. Castro sur son blog.
"A l'heure actuelle, le gouvernement américain a un rôle dissuasif. Mais il est déraisonnable de s'attendre à ce que tous les gouvernements étrangers continuent à respecter les principes de l'Icann en l'absence de la supervision et de la protection des valeurs dont le gouvernement américain est le garant", a-t-il conclu.