Une somme qui pourrait permettre de scolariser des millions d’enfants,
L'Afrique perd chaque année près de 1,8 milliard de dollars à cause des frais élevés supportés par les Africains transférant de l'argent à leurs proches restés au pays, une somme qui pourrait permettre de scolariser des millions d'enfants, dénonce une ONG britannique.
"L'Afrique subsaharienne est la région la plus pauvre au monde mais elle essuie les frais de transfert les plus élevés. Les frais sont en moyenne de 12% sur les transferts de 200 dollars américains, ce qui équivaut quasiment au double de la moyenne mondiale", estime l'Overseas Development Institute (ODI), basé à Londres, dans un rapport publié mercredi.
Selon l'ONG, le continent perd ainsi entre 1,4 et 2,3 milliards de dollars par an en frais de transferts excessifs. L'ODI base ses calculs sur l'écart entre les frais de virement appliqués à l'Afrique et ceux en vigueur dans d'autres régions, ainsi que sur l'objectif international du G8 et G20 de réduire les frais à 5%.
L'ONG explique ces coûts élevés par le "manque de concurrence", puisque seules deux grandes sociétés de transfert de fonds - Western Union et MoneyGram - contrôlent le marché des virements à l'étranger.
Ces frais excessifs sont imposés alors que les transferts d'argent vers l'Afrique sont à la hausse et que certains pays ont désespérément besoin des envois de la diaspora - notamment provenant des travailleurs émigrés en Occident qui font parvenir de l'argent à leur famille.
C'est par exemple le cas en Somalie, pays sans véritables infrastructures où les transferts font vivre de nombreux habitants et financent 80% des nouvelles créations d'entreprises.
"Cette surtaxe sur les transferts détourne les ressources dont les familles ont besoin pour investir dans l'éducation, la santé et la construction d'un avenir meilleur. Elle fragilise un lien vital pour des centaines de milliers de familles africaines", estime Kevin Watkins, le directeur de l'ODI.
"Les Africains résidant à l'étranger font des sacrifices énormes pour soutenir leurs familles, et doivent encore faire face à des frais injustifiés", ajoute-t-il.
Education et eau potable pour des millions d'Africains
Le rapport de l'ODI calcule que l'alignement des frais pour les Africains sur la moyenne mondiale dégagerait suffisamment de revenus pour financer la scolarisation de quelques 14 millions d'enfants, soit presque la moitié des enfants non scolarisés en Afrique subsaharienne, et pour fournir de l'eau potable à 21 millions de personnes.
La Banque mondiale, qui estime que les envois de fonds vers l'ensemble des pays en développement devraient franchir la barre des 500 milliards de dollars d'ici 2016, avait déjà pointé du doigt des problèmes.
"Le coût élevé de l'envoi de fonds par des circuits formels continue d'entraver l'utilisation des rapatriements à des fins de développement, les particuliers privilégiant des moyens informels pour envoyer de l'argent chez eux", observait l'institution de Washington l'an dernier.
Sollicitée par l'AFP, Western Union a expliqué gagner en moyenne 5 à 6% sur les sommes envoyées à travers le monde. Mais l'entreprise a ajouté que ses prix variaient selon les pays à cause d'un certain nombre de facteurs comme les coûts de protection du consommateur, les taxes locales ou la volatilité des taux de changes.