Moscou a affirmé qu’une saisine de la CPI risquait de nuire aux maigres chances de relancer les pourparlers de paix.
La Russie et la Chine ont mis ce jeudi leur veto à un projet de résolution français à l'ONU qui prévoyait de saisir la Cour pénale internationale (CPI) des crimes commis en Syrie par les deux camps.
Il s'agit du quatrième blocage par les deux pays de résolutions occidentales depuis le début de la crise en Syrie il y a trois ans, le précédent datant du 19 juillet 2012.
Le texte, rédigé par la France, était co-parrainé par une soixantaine de pays, membres du Conseil ou non, dont les membres de l'Union européenne, le Japon et la Corée du Sud et des Etats africains (Côte d'Ivoire, Sénégal).
La Syrie n'ayant pas adhéré à la CPI, c'est le Conseil qui doit décider de saisir la Cour des crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis sur son territoire. Il l'a déjà fait pour le Darfour en 2005 et la Libye en 2011.
Avant le vote, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon avait appelé, dans un message lu par le vice-secrétaire général Jan Eliasson, le Conseil à adopter enfin une position commune sur la Syrie, affirmant que sinon "la crédibilité de cet organe continuerait d'en souffrir".
L'ambassadeur français Gérard Araud a prévenu juste avant le vote que si la résolution était bloquée "ce serait une insulte pour des millions de Syriens qui souffrent" et il a dénoncé d'avance "le soutien inconditionnel" de Moscou au régime syrien.
"On tue, on torture, on viole aujourd'hui en Syrie dans le cadre d'une politique délibérée pour terroriser et pour punir", a-t-il souligné, dénonçant "un déchainement de brutalité et de cruauté" de la part des deux camps.
"Nos petits-enfants nous demanderons dans de nombreuses années comment nous avons pu ne pas rendre justice à une population qui vit un enfer", a déclaré l'ambassadrice américaine Samantha Power.
Les Etats-Unis, non membres de la CPI, s'étaient ralliés au texte français après avoir obtenu que leurs soldats ne soient pas soumis à la CPI en cas d'opération autorisée par l'ONU en Syrie, et à condition de ne pas être obligés de payer.Le veto russe ne faisait aucun doute depuis plusieurs jours. Moscou a affirmé qu'une saisine de la CPI risquait de nuire aux maigres chances de relancer les pourparlers de paix.
La Chine "était embarrassée", selon des diplomates occidentaux, mais elle a choisi de ne pas mécontenter la Russie une nouvelle fois après s'être démarquée de Moscou le 15 mars lors du vote d'une résolution occidentale qui dénonçait le référendum séparatiste en Crimée. Moscou avait bloqué le texte mais Pékin s'était abstenu.
Malgré ce veto, les Occidentaux veulent maintenir la pression. Une des options est de faire adopter un texte par l'Assemblée générale de l'ONU où le veto n'existe pas.