Il leur a exprimé sa volonté d’oeuvrer pour leur retour au Liban
Le patriarche maronite Mgr Bechara Raï a bel et bien rencontré les anciens collaborateurs de l’ennemi israélien lors de sa visite en Palestine occupée.
« En Israël, le patriarche maronite célèbre une messe devant des bannis du Liban», est le titre de l'article de l'AFP sur la messe célébrée par le patriarche maronite ce mercredi dans l'église Saint-Pierre à Capharnaüm. Précisant que « la communauté libanaise est composée en quasi-totalité d'anciens membres d'une milice alliée à l'armée israélienne».
Le site d’information palestinien des territoires de 1948, "Arabs-48" a lui aussi rendu compte non seulement de la tenue de la messe, mais aussi d’une rencontre du chef spirituel des maronites avec ces collaborateurs, dans l’après-midi de ce mercredi.
Pour écouter leurs revendications: "rentrer au Liban".
« Nous avons évoqué à son éminence le sujet de notre retour au Liban et je crois que ses propos sont écoutés », a dit le porte-parole des Libanais en Israël Samir Issa, pour Arabs-48.
Il s’agirait de centaines de personnes venues du nord d'Israël, selon l’AFP, à la rencontre de la première visite d'un patriarche maronite depuis la création d'Israël en 1948.
L’agence rapporte le cas de Souleimane Nakhlé, originaire de Jezzine, au Liban Sud, qui a affirmé être "venu prier" mais ne pas attendre grand-chose de cette rencontre inédite avec le patriarche libanais.
"Nous n'avons jamais voulu quitter notre pays et le patriarche (Raï) le sait", a confié Henri al-Ghafry. "Israël n'est pas notre pays, je veux rentrer au Liban. Beaucoup de Libanais qui étaient avec nous nous ont reniés".
Au contraire, Victor Nader, ancien officier de l'Armée du Liban sud (ALS), milice collaboratrice, a assuré "ne pas vouloir retourner au Liban"
"Nous sommes très heureux ici et mon fils sert dans l'armée israélienne", a-t-il ajouté, tout en considérant que la visite de Mgr Raï apportait "du respect et un soutien au moral" de cette communauté de proscrits, considérés comme des "traîtres" par de nombreux Libanais.
Les collaborateurs de cette milice, fondée par un général ayant fait défection de l’armée libanaise Saad Haddad, puis relayé à sa mort par un autre général Antoine Lahed, avaient prêté main forte à l’armée israélienne dans l’occupation du sud Liban, et la soumission et la répression de ses habitants entre 1977 et 2000.
L’un d’entre eux, Charbel Touma, estime quant à lui, dans une discussion avec le correspondant d’Arabs-48 « n’avoir rien commis contre l’état libanais, ni contre la partie », et vouloir rentrer « avec des garanties ».
Selon Arabs-48, un jeune palestinien ayant rencontré un certain nombre de Libanais rapporte qu'ils lui ont confessé qu’ils étaient profondément déçus par Israël.
En échange, le patriarche libanais leur a exprimé qu’il œuvrera pour leur retour chez eux.
"Vous avez payé le prix d'un certain jeu international et régional. Et ce dont vous souffrez, nous nous en chargerons avec le autorités liabanaises", leur a-t-il également dit, selon l'agence arabophone Asia News. Minimisant la portée des crimes qu'ils ont commis à l'encontre des Libanais en général et de ceux du sud en particulier
Villageois chrétiens chassés
Avant la messe à Capharnaüm, le patriarche maronite s'était rendu dans un village chrétien vidé de sa population par l'armée israélienne lors de la "Nakba" (catastrophe, en arabe) que représente pour les Palestiniens l’usurpation de leur patrie lors de la création d'Israël en 1948.
"Ce qui est arrivé à votre village est une grande injustice", a dit Mgr Raï aux habitants chrétiens de Kafr Biram, évacués en novembre 1948, tout comme ceux d'Iqrit. La mesure devait être provisoire mais ils n'ont jamais été autorisés à rentrer.
Selon l'AFP, l'armée israélienne a rasé Iqrit en 1951, puis Kafr Biram deux ans plus tard, obligeant les villageois à s'installer définitivement dans les villes israéliennes de la région.
"Nous sommes avec vous et nous ferons notre possible pour vous aider", a déclaré le patriarche maronite, invoquant l'influence du pape François, à l'occasion du pèlerinage duquel il a décidé sa propre visite en Israël.
"Nous agirons par le biais du Vatican et ferons pression sur le pape jusqu'à ce que le monde entende votre situation", a-t-il assuré.