La guerre en Syrie ressemble de plus en plus à une guerre entre terroristes et non terroristes.
La politique internationale n’est pas régie par les principes. C’est un ensemble d’intérêts qui se rapprochent ou s’opposent. Ceci s’applique par excellence à la Syrie.
De ce fait, les sentiments de sympathie de certains envers le régime syrien et de haine d’autres restent inutiles dans le domaine des émotions. L’important est l’équilibre mondial qui contrôle désormais le déroulement des choses.
Dans cet équilibre, la moitié du monde n’hésitera pas à féliciter le président syrien Bachar el-Assad pour sa victoire certaine dans les élections. L’axe qui se montre prêt à le féliciter regroupe la Russie, la Chine, l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud, des pays membres du groupe des BRICS. A eux s’ajoutent plusieurs pays de l’Amérique du Sud, l’Iran, l’Irak, et un nombre de partis et forces arabes et internationales.
Si l’on mesure le taux de la population de ces pays, on obtiendra plus de la moitié du monde.
Si l’on mesure aussi leurs potentiels économiques, ces pays constituent des puissances économiques montantes, sont sur le point de remplacer les forces économiques précédentes. Deux de ces pays, la Russie et la Chine, ont déjà bloqué quatre fois des résolutions internationales contre la Syrie, et continueront de le faire.
Le chef des Forces libanaises au Liban Samir Geagea n’a pas fait attention à ce fait. Il avait dit dans son point de presse que seuls le Surinam, le Venezuela et un pays tierce féliciteront Assad. Il est de son droit de se prononcer ainsi, vu qu’il déteste le régime syrien. Mais en termes d’intérêts internationaux, pas de place à l’amour et à la haine.
Quoi de neuf ?
Ces quelques derniers jours, deux attentats terroristes très dangereux ont eu lieu. Ce genre de terrorisme incite à penser encore plus aux intérêts internationaux et réduit l’importance des principes et des sentiments. Une attaque a visé une synagogue à Bruxelles, un attentat perpétré par un français d’origine maghrébine. Et un attentat-suicide commis par un Américain pour la première fois à Idleb en Syrie, a surpris les Etats-Unis.
Au vu des intérêts internationaux, le sang syrien qui coule depuis trois ans n’a aucune importance. Plusieurs pays désiraient que les combats se prolongent pour longtemps. De même, c’est une guerre d’usure qui vise l’armée syrienne, tout comme le Hezbollah et l’Iran. A cela s’ajoute la division sectaire sunnite-chiite censée créer un front parfait entre les combattants du Hezbollah et les takfiris. Tout ceci aurait été réalisé sans le terrorisme.
Après l’attentat de Bruxelles et l’attentat du suicidaire américain, il s’avère impératif de faire autrement le calcul des intérêts. Il serait très difficile pour les pays désirant améliorer le niveau d’armement aux combattants de l’opposition de convaincre le Congrès, l’opinion publique et leurs trésoreries.
La guerre en Syrie ressemble de plus en plus à une guerre entre terroristes et non terroristes.
L’intérêt international nécessite actuellement de se tenir du côté opposé aux terroristes. Les détracteurs du régime syrien disent que ce dernier a encouragé le terrorisme depuis l’occupation américaine de l’Irak, et que c’est lui qui a libéré des terroristes alors qu’il le pratique. En termes d’intérêts internationaux, ces propos ne servent à rien.
La situation en Syrie ne peut rester telle quelle. Le terrorisme qui s’est infiltré en Syrie via des passages connus peut rentrer à travers ces mêmes passages. Ceci a eu lieu effectivement. Certains sont rentrés chez eux et constituent un danger. Seule l’armée syrienne, en coopération avec les armées des pays voisins peut empêcher ce retour.
Le président américain Barack Obama a fixé la ligne rouge. Pas d’intervention militaire de l’extérieur. L’Arabie saoudite a dressé une liste de noms d’organisations terroristes, dont l’EIIL, al-Nosra et les Frères musulmans. Les intérêts internationaux occidentaux et des pays du Golfe se rapprochent donc des intérêts russes, iraniens et syriens.
Il ne reste donc que trois options. Soit laisser la guerre en Syrie écraser ce qui reste d’hommes et de pierre. Ceci est impossible après l’accentuation du terrorisme. Soit s’aventurer en octroyant aux rebelles des armes sophistiquées anti-aériennes et autres. Ceci est encore difficile à cause de multiples lignes rouges, dont celles russes. Soit ouvrir des canaux de communication publiques pour coopérer avec l’armée syrienne, comme c’est le cas avec les deux armées irakienne et égyptienne. Cette option serait la plus facile malgré l’embarras.
Pourquoi donc parle-t-on d’embarras ?
Tout simplement, parce que le problème de l’Occident atlantique et de ses alliés n’est plus le maintien du régime syrien ou de son armée, mais comment traiter avec cette armée, suite à l’élection du président Assad pour un troisième mandat. Quant aux réformes et au changement du régime, ces slogans ne figurent plus au menu des intérêts internationaux.
Le problème de l’Occident atlantique est la source de la force de l’autre axe.
Féliciter Assad pour sa réélection à partir de jeudi fait partie d’une équation internationale réclamée par la Russie, l’Iran et leurs alliés. Celle-ci pousserait vers une entente quelque part. il faut une entente pour lutter contre le terrorisme tout en acceptant, bien qu’à contrecœur, le maintien d’Assad.
Quant aux miliciens les plus dangereux, ils poursuivront sine die leurs bombardements et explosions. Les attaques s’intensifieraient dans les deux prochains jours pour influencer le cours du processus électoral.
Une fois de plus, les intérêts internationaux sacrifient leurs alliés et abandonnent l’opposition au bord de la route, même si ils multiplient les paroles sur le soutien à cette opposition.
Le monde après l’attaque de Bruxelles et l’attentat-suicide américain n’est plus comme auparavant. La question n’est plus liée au sang syrien.
Traduit du site al-Akhbar
Ecrit en arabe par le journaliste Sami Kleib