Les forces kurdes se placent directement dans la ligne de feu.
L'offensive fulgurante de l’EIIL dans le nord et l'ouest de l'Irak a permis aux Kurdes de renforcer leur emprise sur des territoires disputés de longue date avec le pouvoir central à Bagdad.
Ces miliciens de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) ont pris le contrôle, depuis mardi, de l'ensemble de la province de Ninive et de sa capitale Mossoul --la deuxième ville d'Irak -- dans le nord de l'Irak et de zones des provinces de Salaheddine, Kirkouk et Diyala, plus au sud.
Les quatre provinces ont des territoires qui sont revendiqués à la fois par le gouvernement fédéral et par la région autonome du Kurdistan. Cette région est composée de trois provinces, qui ont des frontières avec le reste de l'Irak, des forces de sécurité et un gouvernement, mais qui dépend financièrement de Bagdad.
Avec la débandade des forces irakiennes qui ont abandonné leurs postes, les Peshmergas (forces kurdes) ont pour la première fois pris le contrôle de la ville pétrolière de Kirkouk, une ville au cœur de la bande de territoire que les Kurdes veulent intégrer à leur région en dépit des objections véhémentes de Bagdad.
"Nous avons resserré notre contrôle de Kirkouk et nous attendons l'ordre de se déplacer vers les zones qui sont contrôlées par L'EIIL", a déclaré le général de brigade Peshmergas, Shirko Rauf.
"Les Peshmergas ont le contrôle de la région du Kurdistan en dehors de l'administration" du gouvernement régional du Kurdistan, a indiqué plus tard le secrétaire général du ministère des Peshmergas Jabbar Yawar, en référence aux territoires disputés avec Bagdad.
Une division du pays ?
Le gouverneur de Kirkouk Najm al-Din Karim a indiqué que les Peshmergas avaient comblé le vide laissé par les soldats irakiens qui se sont retirés de leurs positions dans la province.
"Les forces armées ne sont plus présentes, comme cela est arrivé à Mossoul et Salaheddine", a déclaré M. Karim.
Les forces de sécurité irakiennes n'ont pas su résister aux miliciens de l’EIIL. Les soldats ont à maintes reprises abandonné uniformes et véhicules ainsi que leurs positions.
Pour Jabbar Yawar, les membres des forces de l'ordre fédérales sont "seulement intéressés par le versement de leur salaire".
Les dirigeants kurdes ont toujours voulu voir l'armée hors de la province de Kirkouk et s'opposent avec force à la création d'un commandement militaire fédéral incluant cette région.
Asos Hardi, journaliste et analyste, a estimé que l'entrée des forces kurdes dans les zones abandonnées par l'armée "leur donne un meilleur contrôle des zones disputées."
"Mais qu'est-ce qui va se passer après ? C'est ça le problème," a-t-il dit.
En contrôlant ces zones, les forces kurdes se placent directement dans la ligne de feu.
Ce risque a été démontré jeudi avec l'attentat contre Jaafar Mustafa, le ministre kurde responsable des Peshmergas. Le ministre a réchappé à l'attentat qui a eu lieu à l'ouest de Kirkouk mais un combattant peshmerga a été tué.
La présence de jihadistes dans les provinces voisines de la région autonome kurde comporte aussi des risques économiques.
"Le fait qu'une grande organisation islamiste soit présente à la porte (du Kurdistan) sera une source majeure de préoccupation pour les investisseurs potentiels et les résidents locaux", a noté M. Drake.
Si les jihadistes arrivent à contrôler les zones sunnites, "cela divisera l'Irak de facto en trois parties distinctes" (kurde, arabe sunnite et chiite), a relevé M. Hardi.
Ce sera "une situation très dangereuse, non seulement pour les Kurdes, mais aussi pour tout l'Irak", a-t-il dit.
Avec AFP