Il est tout à fait évident que l’extension de la crise en Ukraine fait augmenter la menace de déploiement des éléments du bouclier antimissile à la frontière de la Russie.
La crise en Ukraine et les sanctions contre la Russie ont tiré un trait sur les tentatives de Moscou pour s'entendre avec Washington à propos du problème d'ABM. Mais même avant le réfroidissement le dialogue n'était point productif.
L'impression est que les Etats-Unis n'avaient aucune intention de s'entendre sur quoi que ce soit et qu'ils ne faisaient qu'atermoyer pour moderniser leurs systèmes et se rapprocher des frontières russes aussi bien de l'Ouest que de l'Est.
Aucun changement n'est intervenu dans le dialogue entre la Russie et les Etats-Unis dans le domaine d'ABM. Pis encore, selon les explerts aucun accord en la matière n'est prévu dans un avenir prévisible.
Ces dernières années la Russie a fait plusieurs tentatives pour parvenir à un accord sur ce problème sensible pour les deux puissances nucléaires. Moscou a proposé à Washington de créer un système antimissile commun dans lequel les zones de responsabilité seraient partagées. La logique était simple : les missiles volant au-dessus de la Russie seraient abattus par les moyens russes et les missiles au-dessus de l'Europe, par les moyens américains. Cependant les Etats-Unis faisaient fi de toutes les initiatives russes et éloignaient Moscou de la construction d'un système de sécurité européen. Cette idée a été confirmée par la conférence annuelle sur les problèmes d'ABM organisée fin juin en Allemagne. Une délégation russe n'y a pas été invitée. Le général à la retraite Pavel Zolotarev, professeur de l'Académie des sciences militaires, estime que pendant tout ce temps le dialogue russo-américain n'était qu'une simple formalité :
« Les Américains ont mené les pourparlers avec la Russie pour préserver le décorum. Toutefois ils déclaraient nettement qu'ils feraient le système tel qu'il leur fallait. Indépendamment de savoir si cela nous plaisait ou non. Beaucoup se trompent quand ils disent que l'approche adaptée proclamée par Obama dans la construction du système de défense antimissile en Europe est, dans une certaine mesure, une réaction aux concessions de la Russie. Ce n'est pas vrai. Cela concerne aussi l'OTAN : toutes ces structures et entre autres le Conseil Russie-OTAN ne servent qu'à dissimuler le processus d'extension de l'OTAN qui ne s'arrête pas.
Dans le même temps les experts font état d'une progression continue des Etats-Unis dans le domaine d'ABM. Il s'agit notamment des tests d'intercepteurs basés au sol et de l'augmentation du groupe naval américain doté du système Aegis en Méditerranée. L'Ukraine présente aussi un intérêt pour l'Amérique en la matière. Si Kiev adhère à l'OTAN, les systèmes de défense antimissile pourraient être déployés sur le territoire ukrainien, note le directeur exécutif de l'Institut des études politiques Grigori Dobromelov :
« Il est tout à fait évident que l'extension de la crise en Ukraine fait augmenter la menace de déploiement des éléments du bouclier antimissile à la frontière de la Russie. Si le conflit ukrainien dans le sud-est s'achève par la victoire de Kiev, ses éléments seront immédiatement installés sur la frontière russe. Leur installation dans la proximité immédiate de la Russie signifie automatiquement que la menace de neutralisation d'une frappe nucléaire russe sera multipliée par plusieurs fois.
Mais les Américains ont décidé de ne pas s'arrêter là-dessus. Ils déploient leurs systèmes ABM non seulement en Europe, mais aussi en Asie. Le prétexte formel est l'aggravation de la situation en Corée du Nord. Cela bien que personne ne prenne au sérieux les menaces venant de Pyongyang. De cette façon les Etats-Unis appliquent sans relâche leur politique visant à entourer la Russie et la Chine de leurs systèmes antimissiles. Dans ce contexte la crise actuelle dans les relations entre nos deux pays était inévitable. S'il n'y avait pas d'Ukraine et de Crimée, les Américains trouveraient quelque chose d'autre.
La Voix de la Russie