Les opérations de l’Otan entrent dans "une nouvelle phase", avait alors fait valoir le Premier ministre britannique David Cameron
La France et la Grande-Bretagne ont déployé samedi pour la première fois leurs hélicoptères de combat contre les troupes du colonel Mouammar Kadhafi, une semaine après l'annonce par Londres d'une "deuxième phase" des frappes de l'Otan contre le régime libyen.Les appareils français Tigre et Gazelle, et britanniques Apache, ont conduit des frappes au sol dans la nuit contre des équipements et des forces de l'armée gouvernementale, a annoncé l'Otan.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a déploré que "consciemment ou inconsciemment", l'intervention de l'Alliance atlantique "dérape vers une opération terrestre". La résolution 1973 votée le 17 mars par le Conseil de sécurité de l'ONU exclut "une force étrangère d'occupation sous quelque forme que ce soit".
L'envoi de troupes au sol, exclu à de nombreuses reprises par l'Otan, "serait tout à fait déplorable", a déclaré M. Lavrov.
Au contraire, Moustapha Abdeljalil, président du Conseil national de transition (CNT) s'est félicité de l'envoi des hélicoptères, saluant "toute action qui puisse précipiter la fin du régime de Kadhafi".
Les Apache, des appareils très utilisés en Irak et en Afghanistan, ont détruit une installation radar et un poste de contrôle militaire situés près de Brega, ville côtière de l'Est libyen, a indiqué le ministère britannique de la Défense.
"Une vingtaine d'objectifs, dont une quinzaine de véhicules militaires, notamment des pick-up armés", ont été détruits, a dit par ailleurs à l'AFP le porte-parole de l'état-major français, le colonel Thierry Burkhard. Des structures de commandement de l'armée libyenne ont également été visées, a-t-il précisé.
Plusieurs hélicoptères ont dû riposter à des tirs d'armes légères en provenance du sol, mais aucun n'a été touché, a-t-il poursuivi.
Ils ont ensuite rejoint sans encombre leurs porte-hélicoptères respectifs déployés au large des côtes libyennes, le Bâtiment de projection et de commandement (BPC) français Tonnerre et le HMS Ocean britannique.
"Ce succès démontre les possibilités uniques offertes par le recours à des hélicoptères de combat", a estimé le général Charles Bouchard, commandant en chef de l'opération de l'Otan en Libye.
Ce recours permet à l'Alliance de disposer d'une "flexibilité supplémentaire pour repérer et s'attaquer aux forces pro-Kadhafi qui ciblent délibérément les civils et cherchent à se cacher dans des zones habitées", note l'Otan.
Pour le ministre britannique de la Défense, Liam Fox, l'engagement des hélicoptères "est le développement logique de ce que nous avons entrepris".
"Nous montrons très clairement au colonel Kadhafi qu'il y a un moyen très rapide d'arrêter les frappes de l'Otan: c'est de partir et d'arrêter de faire la guerre à son propre peuple", a-t-il déclaré à Singapour.
Le déploiement de ces appareils intervient plus de deux mois après le début de l'intervention internationale, sous mandat de l'ONU, visant à protéger les populations civiles de la répression du régime libyen.
Face à l'enlisement du conflit, et pour éviter les risques de toucher des populations lors de frappes en milieux urbains, Paris et Londres avaient annoncé la semaine dernière l'envoi d'une vingtaine de Tigre et de Gazelle français, et de quatre Apache britanniques. Les opérations de l'Otan entrent dans "une nouvelle phase", avait alors fait valoir le Premier ministre britannique David Cameron.
Sur le front diplomatique, la rébellion continuait à œuvrer pour être reconnue internationalement.
Pékin a annoncé vendredi que l'ambassadeur de Chine à Doha, Zhang Zhiliang, avait rencontré ces derniers jours le président du CNT, et à Moscou, l'envoyé spécial du président Dmitri Medvedev, Mikhaïl Marguelov, a annoncé samedi qu'il s'envolerait lundi soir pour la Libye afin "de rencontrer des représentants de l'opposition et d'autres forces politiques à Benghazi", fief de la rébellion.
Membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU avec droit de veto, la Chine et la Russie s'étaient abstenues lors du vote de la résolution 1973 autorisant les frappes aériennes.
Moscou s'est depuis résolue à réclamer comme les Occidentaux le départ du colonel Kadhafi, au pouvoir depuis près de 42 ans.
Selon la presse japonaise, le Japon a gelé 4,4 milliards de dollars des avoirs appartenant à M. Kadhafi et à son entourage.
Lancée à la mi-février, l'insurrection libyenne et sa répression ont fait entre "10.000 et 15.000 morts", et entraîné la fuite de 890.000 personnes, selon l'ONU.