Des milliers d’Américains demandent une enquête approfondie pour traduire en justice les auteurs du meurtre de l’adolescent de 18 ans à Ferguson.
Désordres, gaz lacrymogènes, garde nationale et cocktails Molotov, sont autant d’attributs du « Maïdan américain », le nom donné par certains médias pour décrire les événements à Ferguson.
La mort, le 9 août, d’un adolescent noir abattu par un policier, a vite fait de devenir une tragédie nationale.
Une vague d’actions de protestation a déferlé sur de nombreuses villes, y compris Washington. Et voilà qu’à peine deux semaines plus tard, l’arbitraire policier a fait une nouvelle victime dans le même État du Missouri. Les gardiens de l’ordre ont encore tué un Afro-américain qui, à en croire la version officielle des faits, se montrait trop agressif.
Washington reste fidèle à ses principes. La Maison-Blanche préfère appliquer la loi du plus fort pour résoudre tant les problèmes extérieurs qu’intérieurs.
La justice est quantité négligeable dans la démocratie américaine. C’est précisément la justice que réclament depuis près de deux semaines les Américains indignés.
Des milliers de personnes demandent une enquête approfondie pour traduire en justice les auteurs du meurtre de l’adolescent de 18 ans à Ferguson.
Les autorités ont joué les durs avec les habitants de Ferguson. Le gouverneur du Missouri Jay Nixon a même fait déployer en début de semaine la garde nationale. C’était peine perdue parce que les manifestants ont riposté par des cocktails Molotov.
Il a donc fallu faire usage de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogènes, et interpeller les plus récalcitrants, une cinquantaine au total, dont quelques journalistes qui, obéissant au devoir professionnel, se sont retrouvés au mauvais moment au mauvais endroit.
Parmi les journalistes interpellés, il y a avait même plusieurs Allemands de Deutsche Welle.
La tragédie de Ferguson n’a rien du hasard. Elle était bien prévisible et attendue depuis longtemps. Elle est le reflet des problèmes graves qui se sont accumulés depuis des années dans la société américaine. Cette situation ne pourra pas être réglée par le recours aux armes. Elle ne fera que s’exacerber avec le temps, estime Alexandre Goussev, directeur de l’Institut des prévisions stratégiques :
« Les problèmes internes dont sont perclus les États-Unis sont si graves qu’ils peuvent embrasser un très grand nombre de villes à prédominance de population de couleur. Ce problème n’a pas été définitivement résolu même dans les États de la partie centrale du pays. »
Les désordres à Ferguson ont pris des proportions planétaires. Le Secrétaire Général de l’ONU Ban Ki-moon a appelé Washington à assurer à la population le droit aux rassemblements pacifiques.
La MAE égyptien a vivement condamné l’usage de la force contre les manifestants, alors que dans leurs micro-blogs sur Twitter, les Palestiniens conseillent les manifestants sur la meilleure façon de réduire au minimum l’effet des gaz lacrymogènes.
La répression des protestations a été qualifiée de « manifestation du racisme » en Iran. De son côté, une agence cubaine s’est posé la question suivante : « Le Ku-Klux-Klan est-il de retour? »
La population de Ferguson est composée majoritairement de Noirs et fait à peine plus de 20 000 personnes. Selon le FBI, les policiers américains tuent tous les ans une centaine d’Afro-américains.
Un nouveau cas de débordements policiers ne s’est pas fait attendre. Un autre Noir s’est fait tuer à Saint-Louis au milieu de la semaine. Selon la version officielle, le jeune homme aurait pu être dangereux et l’usage de la force était justifié. Les désordres ont cependant continué.
80% des Noirs américains se sont déclarés solidaires avec les habitants de Ferguson. Même des parlementaires déclarent que les gens ont ras-le-bol des violences policières, note le politologue Vladimir Kozine :
« Aussi, la parlementaire Patricia Bynes, une Afro-américaine elle aussi, a qualifié les manifestations de masse de réaction au racisme et à la discrimination qui existent aux États-Unis au niveau officiel.
C’est une accusation très grave qui est confirmée par le fait que les actions de protestation se déroulent ces jours-ci dans presque 90 villes américaines dont Washington. »
La porte-parole du Département d’État américain Marie Harf a déclaré, malgré la critique virulente, que ces événements étaient une affaire intérieure des États-Unis, en demandant de ne pas faire de rapprochements avec ce qui se passe dans le reste du monde.
Comment ne pas se rappeler dans ce contexte les événements de l’hiver dernier en Ukraine.
Des milliers de personnes y sont également descendus dans la rue pour exprimer « pacifiquement » leur opinion, sauf que Washington était alors vivement opposé à la dispersion des manifestants par la force.
Maintenant, il fait lui-même la démonstration du modèle de l’authentique « pouvoir du peuple ».
Les habitants indignés n’ont pas été sensibles ni aux discours lénifiants du président, ni aux paroles de Marie Harf.
Il a fallu dépêcher sur place le procureur général des États-Unis Eric Holder qui est, soit dit au passage, le premier procureur général noir dans l’histoire des États-Unis.
Les autorités de l’État ont finalement décidé de faire contre mauvaise fortune bon cœur et ont retiré la garde nationale du Missouri. Quant aux policiers américains, ils porteront bientôt des caméras vidéo pour filmer les interpellations ou les tirs sur les suspects.
La pétition contenant cette proposition, mise en ligne sur le site de la Maison-Blanche, a recueilli plus de 100 000 signatures en l’espace de quelques jours.
L’administration doit maintenant l’examiner et donner sa réponse, qui peut d’ailleurs être aussi bien positive que négative.
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