Les principales puissances mondiales ont apporté jeudi un appui politique et financier à la rébellion libyenne, mais celle-ci s’est dit déçue du chiffre avancé.
Les rebelles ont enregistré une autre victoire diplomatique avec la visite à Benghazi du président sénégalais Abdoulaye Wade, premier chef d'Etat étranger à se rendre dans le fief de la rébellion, d'où il a demandé au colonel Kadhafi de quitter le pouvoir.Wade s'est adressé au colonel Kadhafi en affirmant: "plus tôt tu partiras, mieux ça vaudra. Tu es arrivé au pouvoir par un coup d'Etat il y a plus de 40 ans, tu n'as jamais fait d'élection, tu as prétendu parler au nom du peuple. Tout le monde sait que c'est une dictature que tu as établie (...). Je te regarde maintenant dans les yeux, il faut arrêter les dégâts", a-t-il ajouté.
A la réunion du Groupe de contact sur la Libye à Abou Dhabi, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a affirmé que les jours du régime de Kadhafi étaient "comptés". "Nous travaillons avec nos partenaires internationaux dans le cadre de l'ONU pour préparer l'inévitable: la Libye de l'après-Kadhafi", a dit Clinton.
Son homologue italien Franco Frattini a déclaré que le pouvoir du colonel libyen "touche à sa fin", estimant que les défections qui s'accélèrent dans son entourage étaient "une conséquence directe" des pressions internationales.
Clinton a qualifié le Conseil national de transition (CNT), représentant la rébellion, d'"interlocuteur légitime" du peuple libyen, alors que son homologue australien Kevin Rudd annonçait que son pays reconnaissait le CNT.
Elle a ensuite assuré devant la presse que des discussions dans l'entourage de Mouammar Kadhafi ont lieu sur une "possible transition" du pouvoir en Libye, appelant les puissances mondiales à "commencer le travail très difficile mais nécessaire avec (le CNT) et le régime de Kadhafi pour essayer d'aboutir au type de transition du pouvoir" dont la Libye a besoin.
Le groupe de contact a finalisé le mécanisme permettant au CNT de recevoir des fonds, provenant notamment d'avoirs bloqués du régime libyen à l'étranger.
L'Italie a annoncé une aide directe de 300 à 400 millions d'euros aux rebelles, sous forme de prêts et de carburant, et le Koweït s'est engagé à verser immédiatement 124 millions d'euros.
Le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé a annoncé pour sa part que Paris débloquerait environ 290 millions d'euros appartenant à la Banque centrale libyenne et qui avaient été gelés dans le cadre des sanctions financières contre le régime.
Déception de la rébellion:
Mais un responsable de la rébellion, Fathi al-Baaji, s'est déclaré déçu. "Nous espérions une aide financière plus importante", a-t-il dit à l'AFP.
Avant l'ouverture de la réunion, Abdel Hafidh Ghoga, vice-président du CNT, a averti que sa situation serait "très difficile" si la rencontre ne débouchait pas sur "des résultats rapides et concrets".
Le CNT, qui contrôle l'Est libyen affirme n'avoir reçu aucune aide depuis le déclenchement de la rébellion en février, a annoncé qu'il entendait compter aussi sur ses propres forces.
Le responsable du Pétrole et des Finances de la rébellion, Ali Tarhouni, a affirmé que la rébellion allait commencer à produire "bientôt" 100.000 barils par jour de brut pour alimenter ses caisses.
Des responsables américains ont indiqué que Washington devait demander aux monarchies arabes du Golfe d'apporter plus de fonds à la rébellion.
Des explosions secouent Tripoli et ses banlieues:
Sur le terrain, des explosions ont secoué jeudi soir Tripoli et ses banlieues, cibles de raids aériens quotidiens de l'Otan, a constaté un journaliste de l'AFP.
Dans son bilan quotidien, l'Alliance atlantique a annoncé jeudi avoir touché la veille plus d'une quinzaine de cibles dans la région de Misrata.
Conséquence des combats, quelque 6.000 nouveaux réfugiés ont ainsi franchi mercredi la frontière tunisienne, selon l'agence officielle tunisienne TAP.
Selon le procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno-Ocampo, qui a requis mi-mai des mandats d'arrêt pour crimes contre l'humanité contre Kadhafi, les enquêteurs ont des preuves qu'il a ordonné des viols en série et fait distribuer pour cela des stimulants sexuels à ses soldats.
Au Conseil des droits de l'Homme de l'ONU, le régime libyen a cependant nié avoir eu recours à la violence contre les civils, accusant en revanche l'Otan de violations des droits de l'Homme.