Près de la moitié des échanges bilatéraux entre la Russie et la Chine, pourraient être effectuées en yuans et en rouble.
La Russie et la Chine sont en train de discuter de la possibilité de créer un analogue du système SWIFT pour les transactions entre les deux pays, a indiqué le vice-premier ministre Igor Chouvalov à l’issue des entretiens à Pékin avec des représentants des entreprises dans le cadre d'une réunion de la commission russo-chinoise sur les investissements.
M. Chouvalov a souligné que le côté chinois avait soutenu l’initiative et les services compétents sont actuellement en train d'étudier la possibilité de sa mise en œuvre.
L'idée de créer un analogue du système SWIFT est survenue après les menaces formulées par les pays de l’UE d’évincer la Russie du système mondial des paiements interbancaires en guise de sanctions suite aux événements en Ukraine. Ce n’est pas sûr que cette menace puisse véritablement être mise en œuvre, car l'interdépendance économique entre la Russie et l’UE est trop grande. Ainsi, la part du gaz russe sur le marché européen a augmenté de 25% à 33% depuis 2010. Et l'Europe sera toujours obligée de régler la facture à la Russie pour le gaz. Donc bloquer l’accès à ce système de paiements internationaux poserait beaucoup de problèmes.
Ces appels de déconnecter le Russie du système SWIFT resteront plutôt des déclarations politiques. Mais un verrouillage d’essai pourrait bien être mis en œuvre. Par exemple, le Royaume-Uni propose de déconnecter la Russie du système SWIFT pendant deux semaines. Il est peu probable que l’exclusion intégrale de la Russie de ce système, comme ce fut le cas pour l’Iran, soit possible.
Toutefois ces « menaces de sanctions » créent un sentiment d’incertitude chez les hommes d’affaires et les investisseurs. Ils sont inquiets d’investir des fonds, alors que de nouvelles limitations pourraient suivre, provoquant le gel de toutes les transactions pendant un certain temps. Pour éviter d'éventuelles restrictions, la Russie a proposé de créer son propre système de sauvegarde des paiements interbancaires, explique l'économiste en chef de Sberbank CIB Evgueni Gavrilenkov.
« Cette idée est logique et réaliste. Il est possible de créer un système indépendant, car la technologie SWIFT n’est pas unique. Tout le processus pourrait prendre environ deux ans. Une autre question c'est à quel point un tel système sera demandé par le marché. Car SWIFT est un système mondial que tout le monde utilise. Ce n’est pas sûr que les banques étrangères qui utilisent activement le système SWIFT, rejoignent ce nouveau système ».
Selon Evgeny Gavrilenkov, la viabilité de ce nouveau système dépend principalement du nombre de banques qui seront intéressées à s’en servir. Mais les banques chinoises ont déjà évoqué leur intérêt dans la création de ce nouveau système. Une alternative au SWIFT est une perspective alléchante pour la Chine, car elle permettra de réduire la dépendance de la volonté politique des pays occidentaux dans le domaine commercial. Et en perspective, l’idée serait d’abandonner progressivement l’utilisation du dollar et renforcer le rôle du yuan chinois dans les transactions internationales.
Une alternative aux systèmes de paiement pour les particuliers
Si l'alternative au système SWIFT est destinée à garantir les paiements interbancaires, il y aura aussi une alternative aux paiements des particuliers russes, sans passer par les systèmes de paiement occidentaux. Il s’agit d’élargir la présence du système de paiement chinois Union Pay sur le marché russe. Pour l’instant ce système de paiement joue un rôle plutôt marginal en Russie avec seulement plusieurs dizaines de cartes du système de paiement chinois émises en Russie. Cependant, au cours des trois ans à venir, le nombre de cartes de Union Pay émises en Russie devrait atteindre deux millions, selon le porte-parole du système chinois Fan Riguang.
Le vice-premier ministre russe Igor Chouvalov a déclaré que le système Union Pay est prêt à coopérer pleinement avec la Russie pour créer un système national des cartes de paiement. La partie chinoise va proposer de se servir de son infrastructure pour les paiements et en yuans et en roubles.
Le système de paiement chinois ne va certes pas évincer du marché russe les systèmes Visa et Master Card. Tout comme nous ne risquons pas abandonner les transactions par le biais de SWIFT du jour au lendemain. Mais les perspectives de ces systèmes alternatifs sur les marchés nationaux et internationaux sont assez prometteuses. Surtout que près de la moitié des échanges bilatéraux entre la Russie et la Chine, pourraient être effectuées en yuans et en rouble, comme l'a déclaré le vice-ministre des Finances, Alexeï Moïsseïev.
Les chefs des deux Etats ont déclaré en mai de cette année à Shanghai leur volonté d’augmenter la part des transactions en yuans et en roubles entre les deux pays. Selon le vice-ministre des Finances de Russie Alexeï Moïsseïev, dans un avenir proche, les parties vont préparer un accord intergouvernemental sur la transition vers les transactions en monnaies nationales.