Les Turcs défendent l’idée d’établir une zone tampon en arguant les dangers imminents qui peuvent surgir dès le début des opérations militaires de la coalition internationale contre Daesh..
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a surpris tout le monde par sa décision de créer une zone tampon à la frontière avec la Syrie, ajoutant que la question a été renvoyée aux chefs d'état-major en vue d'examiner les options et les possibilités sans compter certains détails.
Bien que la décision ne soit pas encore définitive, mais, apparemment, la Turquie est très sérieuse quant à la création d'une zone tampon surtout avec l'escalade des tensions en Syrie. Sauf que la position américaine avait toujours découragé la Turquie à entreprendre une telle initiative. Les Etats-Unis appréhedent une aggravation de la situation qui les entraineraient dans une guerre contre la Syrie, à laquelle ils ne sont pas prêts, et de surcroit selon l’agenda turc .
D’où la Turquie s’est vue obligée à reporter l'idée de la zone tampon, en particulier en Syrie que Damas qualifie toujours de violation de la souveraineté syrienne.
Aujourd'hui, cette idée s'est de nouveau imposée au cours des négociations concernant la formation de la coalition internationale contre le terrorisme menée par les Etats-Unis.
Selon les informations du quotidien libanais asSafir , cette zone tampon se situera sur la frontière turque avec la Syrie et l'Irak, ce qui signifie qu'elle ne sera pas limitée à la frontière avec la Syrie.
Pis encore..
En fait elle se situera dans les territoires syriens et irakiens. On ne connait pas la superficie de cette zone que les Turcs ont pu déterminer car le gouvernement attend une réponse des chefs d'état-major.
Les Turcs défendent l'idée d'établir une zone tampon en arguant les dangers imminents qui peuvent surgir dès le début des opérations militaires de la coalition internationale contre Daesh, à leur tête l’afflux de milliers de réfugiés fuyant les combats depuis la frontière vers l'intérieur de la Turquie.
Or, la Turquie ne veut pas aggraver le problème des réfugiés syriens chez elle, et donc comme solution de rechange elle compte réinstaller ces réfugiés dans la zone tampon, tout en leur offrant toutes les nécessités de la vie : des maisons préfabriquées, des hôpitaux de campagne et autres moyens de survie.
Mais la création d'une telle zone nécessite une interdiction de survol, en particulier de la part de l’aviation syrienne. Ce qui d’ailleurs constitue l'un des objectifs de la Turquie à savoir : limiter le champ d'action de l'aviation syrienne, réduisant ainsi la marge de manœuvre de l’armée syrienne et donc influencer dans toutes les batailles qui pourraient avoir lieu sur la frontière turque.
Cela dit, la création de la zone tampon soulève plusieurs questions notamment qui interdira le survol des avions de chasse syriens de la zone tampon ?
Or, si cette mission sera uniquement remplie par l’aviation turque alors cela signifie que la Turquie a prémédité et planifié son implication dans la guerre syrienne car elle sait que la Syrie n'accepterait pas une telle interdiction de la part de la Turquie et encore plus la création d’une zone tampon...
Selon des sources de presse turques, citant des responsables militaires turcs, l’aviation turque ne veut pas assumer seule la demande d’une zone d'exclusion aérienne , ce serait aux forces de la coalition, dirigée par les Etats-Unis d’assurer une telle mission.
D’où des questions s’imposent : Est-ce-que les États-Unis ont donné leur approbation à cette zone tampon? Y a-t-il une coordination entre eux et la Turquie, en dépit du fait qu’Ankara s'oppose à toute implication militaire directe dans la guerre contre "Daesh"? Est-ce que l'idée d'une zone tampon, avec la participation de la Turquie, cachent des intentions pour déclencher une prochaine guerre américano- - turque contre le régime syrien? Est-ce que le refus turc de ne pas s’impliquer dans cette guerre est le prélude à un autre rôle à un stade ultérieur de la guerre contre le régime syrien?
Sachant que le vice-président du gouvernement turc , Noman Kortolmos a déclaré que l'éradication de "Daesh" n'apportera pas la paix et la stabilité à moins de déraciner les causes de l'émergence de l"Etat islamique" . Daesh n’est que le résultat et non la cause, le résultat de la marginalisation des sunnites en Irak et en Syrie, appelant à leur participation active au pouvoir dans les deux pays.
Même son de cloche chez le nouveau ministre des Affaires étrangères Chaoosh Ihsanoglu qui a pointé du doigt la domination chiite en Irak et en Syrie.
En outre, une telle zone tampon va inévitablement toucher les zones kurdes en Syrie, directement adjacentes à la frontière turque. Pour les Kurdes , il n’est pas question de permettre un retour de la domination de la Turquie, avec la création d’une zone tampon avoisinante, et donc l’occasion pour la Turquie de réaliser ce qu’elle a échoué de faire précédemment c’est-à-dire maîtriser les forces kurdes.
Alors que récemment on a assisté à un renforcement du rôle des forces kurdes armés du PKK de la Syrie dans la défense d'Arbil au point de combattre côte à côte avec le peshmergas contre "Daesh," sachant que la Turquie refusait de fournir une assistance militaire aux peshmergas? Cela pourrait conduire à une rupture dans les relations Ankara - Erbil, et permettre au PKK de garder ses armes pour la défense des Kurdes en Turquie et en Syrie, mais aussi en Irak, et donc sa transformation en une force puissante ayant un rôle régional, or, c'est ce qui inquiète la Turquie.
M. Erdogan a déclaré, lors d'une réunion de l'Assemblée générale de l'Union des artisans à Ankara, a déclaré que " le fait d’accuser la Turquie de soutenir le terrorisme et de fermer les yeux à des pratiques terroristes, n'est qu’une arrogance ", notant que certaines parties accusent la Turquie d'importer des hydrocarbures dans des zones qui sont sous le contrôle de "Daesh", et de fournir des armes et des services médicaux à d'autres moments.
«Nous avons assuré et nous soulignons que ce n'est pas possible du tout » a-t-il martelé.
En conclusion, il convient de se demander si la Turquie d'aujourd'hui réussira à établir une zone tampon, ou si cette question n’est qu’une implication voulue par les Américains de la Turquie, surtout qu’il existe une grande tension dans les relations entre eux suite aux accusations de Washington envers la Turquie de n'être plus un allié ni de respecter le pacte entre deux pays « otasians » ??
Traduit par notre site du journal asSafir