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Révélation : la coopération « discrète » de l’Europe avec l’industrie nucléaire

Révélation : la coopération « discrète » de l’Europe avec l’industrie nucléaire

Elle emploie les moyens les plus sournois

L’Union européenne coopère à la dérobée avec l’industrie nucléaire d’Israël depuis au moins six ans.

Un document interne que j’ai récemment obtenu établit qu’un accord a été signé entre l’UE et Israël en 2008, en vue « d’initiatives communes de coopération pour l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire ». « C’est un accord resté discret, qui n’a pas été dévoilé publiquement » ajoute le texte.

Le document a été rédigé en amont d’une visite en Israël d’Antonio Tajani, alors membre italien de la Commission européenne, en octobre 2013.

Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi l’Union souhaite que cette coopération reste « discrète ». L’accord a été conclu avec la Commission de l’énergie atomique d’Israël, l’opérateur du réacteur de Dimona, là où les armes nucléaires ont été développées.

Israël a introduit les armes nucléaires au Moyen-Orient et a refusé de signer le Traité de non-prolifération (TNP). Il a refusé une inspection internationale de ses activités nucléaires.

En 2006, Ehud Olmert, alors Premier ministre d’Israël, a reconnu qu’Israël possédait l’arme nucléaire. L’Agence de renseignements du Département américain de la défense estimait, en 1999, qu’Israël possédait entre 60 et 80 ogives nucléaires.

Hypocrisie

Ces éléments placent Israël dans une catégorie bien distincte de celle de l’Iran qui est supposé être une menace majeure pour la paix mondiale.

Contrairement à Israël, l’Iran n’a pas d’armes nucléaires. Le Conseil National du Renseignement – un groupe de conseil auprès du président des États Unis – a exprimé sa totale confiance sur le fait que l’Iran avait mis un terme au développement de son programme d’armes nucléaires il y a de cela plusieurs années.

En dépit de cette déclaration explicite, autant l’Europe que les États Unis ont pris des mesures punitives contre l’Iran (après que certaines d’entre elles aient été allégées, l’Amérique a imposé de nouvelles restrictions aux échanges économiques avec l’Iran la semaine dernière). L’argument officiel avancé pour justifier ces sanctions est qu’il faut tout faire pour empêcher l’Iran d’acquérir la bombe.

Pour autant, l’Union Européenne est satisfaite de coopérer avec Israël, une nation qui possède effectivement la bombe. Faut-il s’étonner que les officiels de Bruxelles ne tiennent pas à attirer l’attention sur cette hypocrisie ?

Des liens militaires

J’ai demandé au Centre de Recherche Commun (CRC) de l’UE – qui a pour mission de mettre en œuvre l’accord « discret » – pourquoi il coopère avec Israël qui est une menace bien connue pour la paix mondiale. Un porte-parole du CRC a tenté de présenter la «collaboration scientifique» impliquée dans l’accord comme quelque chose d’anodin.

Selon le porte-parole, la recherche menée avec Israël concerne «l’application médicale de radionucléides, la protection des radiations, de même que la sécurité nucléaire dans la détection et l’identification de matériaux nucléaires et radioactifs». « Elle ne concerne aucune activité de retraitement et d’enrichissement ».

J’ai demandé au porte-parole si des garanties avaient été fournies selon lesquelles Israël n’utiliserait pas le fruit des recherches menées avec l’Union pour des objectifs militaires. Sans surprise, je n’ai reçu aucune réponse à cette question.

Lorsque j’ai demandé quel montant avait été dépensé dans cette coopération nucléaire avec Israël, le CRC a seulement dit que la recherche en question ne bénéficie « pas de financement commun et que chaque institution pourvoit à ses propres activités ».

La Commission Israélienne pour l’Énergie Atomique, de même qu’elle supervise le développement des armes nucléaires, a des liens puissants avec l’industrie classique de l’armement.

En dehors de Dimona, la commission gère aussi le centre de recherche de Soreq. Le propre site internet de Soreq explique qu’il développe un type d’équipement qui a des applications en matière de sécurité intérieure – un euphémisme pour la technologie de la surveillance et l’armement. Quand des journalistes ont fait des visites guidées de ce centre, ses scientifiques se sont vantés d’inventer des lasers faits pour assister les snipers.

Le CRC – service scientifique interne de la Commission européenne – a également coopéré plus directement avec l’industrie de l’armement israélienne.

En décembre 2010, il a fait équipe avec Elbit, la société d’armement israélienne, sur ce qu’il a appelé « campagne de détection de petits bateaux » à Haïfa. Le but de cet exercice était de voir comment des drones pouvaient être utilisés pour la surveillance maritime, principalement pour empêcher les demandeurs d’asile d’entrer en Europe.

Elbit est l’un des premiers fournisseurs d’avions militaires pour l’armée israélienne. Cela signifie qu’il a fourni certains des instruments-clef utilisés par Israël cet été (et lors de précédentes attaques) pour infliger la destruction et la mort à Gaza. En accueillant l’exercice de « détection de bateaux », l’UE montre son empressement à déployer les instruments israéliens de meurtres de masse contre des réfugiés.

Écoblanchiment

Tout en essayant de maintenir cette « discrétion » autour de la recherche nucléaire, l’UE a ouvertement célébré des formes plus acceptables d’engagement avec Israël.

José Manuel Barroso, le président sortant de la Commission européenne, a posé aux côtés de Benjamin Netanyahou, lorsque les deux hommes ont signé un accord de coopération sur l’énergie et l’eau en 2012. Le CRC a tenté de vendre la qualité écologique de cet accord, en insistant sur le fait qu’il concernait de l’énergie renouvelable et la préservation de ressources.

Les militants écologistes ont un nom pour les tactiques conçues pour rebaptiser un coquin en amoureux des arbres : ils appellent ça de l’écoblanchiment (greeenwashing).

La coopération en énergie « propre » est d’un bien maigre réconfort pour les gens de Gaza dont la seule centrale électrique a été bombardée par Israël cet été. Il ne faudrait pas non plus oublier qu’Israël a attaqué un centre pour enfants autistes dont le toit était muni de panneaux solaires. Au temps pour l’engagement d’Israël en énergie renouvelable.

Israël est un État arrogant doté de l’arme nucléaire. Je suis sûr que bien des gens honnêtes seraient horrifiés d’apprendre que l’UE a des liens avec rien moins que les agences qui ont développé les armes nucléaires d’Israël – même si cette coopération est « discrète ».

 

David Cronin
David Cronin est un journaliste irlandais et militant politique, vivant en Belgique. Son nouveau livre est « Corporate Europe: Comment les grandes entreprises établissent des politiques sur l'alimentation, le climat et la guerre » (Pluton, 2013). Son précédent livre était : «  l'Alliance de l'Europe avec Israël: Aider l'Occupation » (Pluto, 2011).

Electronic intifada

Traduction : SF pour l’Agence Media Palestine