Les portes tournantes entre laïcs et djihadistes sont une réalité admise ou revendiquée par les chefs “modérés” eux-mêmes
Par la propriété transitive de l’alliance, si l’Otan et le Golfe aident la soi-disant Armée syrienne libre (les «modérés»), et si ce dernier est un allié d’Al Nosra, et si al Nosra fait partie d’Al-Qaïda, et si Al-Qaïda est en train de se remettre d’accord avec le soi-disant « Etat islamique » (EI), alors l’Otan / CCG sont des alliés de l’EI.
Surréaliste? Pas tellement, si on pense qu’ils l’ont créé, soit directement, soit par leurs guerres en Afghanistan, en Irak, la Libye et en Syrie, comme nous l’avons expliqué dans ce mini dossier ; et voilà – en anglais – une reconstitution précise.
Et si l’on s’est rendu compte d’avoir créé le monstre, et qu’on veut finalement le pourchasser comme le roman Frankenstein, alors pourquoi on cherche toujours à l’appuyer par l’intermédiaire des «modérés » syriens, en augmentant l’appui à ces derniers?
L’opposition syrienne « modérée » de la soi-disant Armée syrienne libre n’existe pratiquement plus (même le New York Times le dit); les portes tournantes entre laïcs et djihadistes sont une réalité admise ou revendiquée par les chefs “modérés” eux-mêmes: et de toutes façons qui se définit comme l’Armée syrienne libre (Asl) est allié sur place avec le Front al Nosra.
On le confirme dans une interview de La stampa du 22 Septembre (p 8.) à Abdel Basset Sayda, membre de la soi-disant Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution (Cnfor), connue aussi comme la Coalition nationale syrienne – le bras politique de l’ASL. L’homme, résidant depuis longtemps en Scandinavie et très apprécié en Occident, demande une zone d’exclusion aérienne au-dessus des territoires aux mains de l’opposition syrienne armés non-Isis (Daesh. Il explique: «L’Armée syrienne libre veut d’abord et avant tout une Syrie sans Assad (…) et nous sommes prêts à collaborer avec n’importe qui à cette fin». Le même chroniqueur a noté que la référence est au Front al Nosra, adhérent à Al-Qaïda, protagoniste d’une querelle sanglante avec l’Isis. Et d’ailleurs, en Jordanie, dit l’article, le gouvernement a recruté des imams d’al-Qaïda afin d’isoler l’Isis dans les mosquées.
Le Front al Nosra, allié de l’Asl, fait partie du réseau al-Qaïda d’Ayman al Zawahiri, comme le déclare son chef Abu Mohammed al-Jawlani. Du reste ses techniques, y compris les attaques suicides revendiquées, sont une marque de fabrique.
Le Front al Nosra partageait la ” boîte Al-Qaïda ” avec l’EI jusqu’à ce que ce dernier ait été désavoué. Mais il y a quelques jours, selon l’Observatoire syrien pour les droits de l’homme, à côté de l’opposition non qaïdiste, les «modérés» ont conclu un pacte de non-agression avec l’Isis en fonction anti-Assad.
Du reste, le sous-secrétaire italien Marco Minniti, sur la même page de La Stampa, répond à une question qu’entre Al-Qaïda et Isis «sont en cours des tentatives de convergence», « sur certains théâtres ils ne se combattent plus et ils ont recommencé à agir ensemble » (ils savent que si l’Isis est vaincu, ce sera négatif pour eux aussi). Et il y a plus : une déclaration commune des branches d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA), appelle les « frères » en Irak et en Syrie à unir leurs forces contre la menace des États-Unis, en arrêtant de se faire la guerre.
Marinella Correggia, Marco Palombo