Des diplomates américains ont martelé cette semaine que les Etats-Unis combattaient à la fois le groupe EI et le régime syrien
Les Etats-Unis ont mené pour la première fois des frappes samedi contre le groupe Etat islamique (EI) dans la province de Homs, dans le centre de la Syrie, pays où leurs opérations sont désormais effectuées "presque en continu".
Un responsable américain de la Défense a affirmé que des frappes avaient eu lieu en Syrie dans la nuit de vendredi à samedi, sans toutefois donner de détails sur leur nombre, les cibles visées ou la participation éventuelle d'autres pays de la coalition internationale.
Les raids dans ce pays, qui ont débuté mardi après des frappes similaires menées depuis août dans l'Irak voisin, sont menés maintenant "presque en continu", a souligné ce responsable sous couvert de l'anonymat.
Selon l'Observatoire syrien des Droits de l'Homme (OSDH), des raids ont visé pour la première fois la province d'Homs, alors qu'ils étaient jusqu'à présent principalement centrés sur l'est et le nord du pays où l'EI-Daesh contrôle de larges zones.
Les frappes ont eu lieu dans la partie désertique de la province, dans la zone d'Al-Hammad, à l'est de la cité antique de Palmyre, loin de la ligne de front avec les forces régulières qui contrôlent la ville de Homs, la troisième du pays.
Selon l'OSDH, d'autres raids ont été effectués contre des positions de l'EI à Minbej, une des rares villes tenues par les jihadistes dans la province d'Alep (nord), et dans la province de Raqqa (nord), considérée comme le fief du groupe extrémiste sunnite.
D'autres encore ont visé l'EI près de la ville kurde d'Aïn al-Arab (Kobané en kurde), à la frontière turque, une région d'où avaient fui récemment des dizaines de milliers de personnes face à l'avancée des jihadistes.
Le Royaume Uni frappera en Irak
L’ alliance anti Daesh a reçu un nouveau renfort vendredi avec la décision du Royaume Uni de se joindre aux frappes en Irak, où seuls les Etats-Unis et la France ont pour l'instant ciblé l'EI.
Le Danemark et la Belgique viennent également de décider de leur participation aux raids aériens en Irak, en déployant chacun des avions de combat F-16.
En Syrie, les Américains ont pour l'heure été aidés par cinq alliés arabes --Jordanie, Arabie saoudite, Emirats arabes unis, Qatar et Bahreïn-- mais la France n'exclurait plus de frapper aussi dans ce pays. La question est "posée", souligne une source au ministère de la Défense.
La coalition avait mené vendredi des frappes contre des installations pétrolières tenues par les jihadistes dans la province de Deir Ezzor (est de la Syrie), selon l'OSDH, qui avait précisé que l'EI avait arrêté le pompage dans six champs pétroliers par peur des bombardements.
L'EI, qui contrôle des raffineries en Irak et en Syrie, vend du pétrole en contrebande et en tirerait des bénéfices allant de 1 à 3 millions de dollars par jour, selon des experts.
Alors que les frappes en Syrie se tiennent éloignées des lignes de front entre les forces gouvernementales, le secrétaire d'Etat américain John Kerry a répété que la guerre contre l'EI ne contribuait en rien au maintien au pouvoir du président Bachar al-Assad dans un pays déchiré par une guerre civile qui a fait près de 200.000 morts depuis plus de trois ans.
Dempsey: une opération terrestre
Le chef d'état-major interarmées américain, le général Martin Dempsey a tenu ce samedi a rappeler que dans la lutte contre l'EI , les frappes aériennes ne suffisent pas.
"Les raids aériens de la coalition contre l'EI cette semaine en Syrie ont désorganisé les structures de commandement du groupe djihadiste et réduit ses capacités logistiques, mais cela ne suffit pas", a affirmé vendredi lors d'une conférence de presse au Pentagone le plus haut gradé américain cité samedi par la BBC .
Et d'ajouter que la force terrestre était nécessaire, mais qu'elle ne devait pas être une force américaine.
Selon le général Dempsey, les forces irakiennes, kurdes et syriennes sont plus adéquates dans la lutte contre l'EI sur le terrain. Il a indiqué que des conseillers américains travaillaient déjà avec les forces irakiennes et kurdes et que la formation et l'équipement de l'opposition modérée syrienne venaient de commencer.
Kerry: les USA n'aident pas Assad
La guerre que mènent les Etats-Unis contre le groupe Etat islamique (EI) ne contribuera en rien au maintien au pouvoir du président syrien Bachar al-Assad, a assuré vendredi le secrétaire d'Etat américain John Kerry.
Depuis qu'elle a lancé mardi ses premières frappes contre les jihadistes de l'EI en Syrie, l'administration américaine affirme qu'elle n'en a pas pour autant mis sous l'éteignoir la lutte contre le régime de Damas et le départ souhaité du président Assad.
"Dans cette campagne, il ne s'agit pas d'aider le président syrien Bachar al-Assad", a répondu John Kerry dans une tribune du journal Boston Globe.
"Nous ne sommes pas du même côté qu'Assad. Il est même l'aimant qui a attiré des combattants étrangers de dizaines de pays", venus se battre dans les rangs de l'EI, a argumenté le ministre américain actuellement à l'Assemblée générale de l'ONU à New York.
Il a répété que le président "Assad avait perdu depuis longtemps toute légitimité" pour rester au pouvoir.
Abadi: pas le pouvoir syrien
John Kerry réagissait à des propos du Premier ministre irakien Haïdar al-Abadi dans le New York Times selon lesquels Washington lui aurait assuré que les frappes en Syrie ne viseraient pas le pouvoir de Damas.
"Nous avons eu une longue conversation avec nos amis américains et ils ont souligné que leur objectif en Syrie n'était pas de déstabiliser la Syrie", mais bien de "réduire les capacités" du groupe EI, a déclaré M. Abadi, cité par le journal.
Des diplomates américains ont martelé cette semaine que les Etats-Unis combattaient à la fois le groupe EI et le régime syrien, et qu'ils avaient opté pour une "voie alternative": entraîner et équiper les rebelles syriens modérés qui se battent contre deux ennemis.
L'aide à l'opposition syrienne non jihadiste "renforcera les conditions d'un éventuel règlement négocié d'une fin de conflit", a insisté M. Kerry, qui n'a pas abandonné l'idée d'une solution politique en Syrie selon les contours du processus de Genève. La dernière conférence internationale dite Genève-2 en janvier en Suisse avait totalement échoué.
Lavrov: intérêt commun
La Russie, soutien indéfectible de la Syrie, avait affirmé mardi que les frappes devaient se faire avec l'accord de Damas, lors d'une conversation entre le président Vladimir Poutine et le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon.
Vendredi, le chef de la diplomatie Sergueï Lavrov a réaffirmé que la guerre anti-jihadistes devait se faire dans un cadre juridique international et "en coopération avec les autorités syriennes".
Le sujet a été abordé "en profondeur" cette semaine à l'ONU lors d'entretiens Lavrov-Kerry, a indiqué un responsable du département d'Etat. "Les Etats-Unis et la Russie ont un intérêt commun à vaincre le genre d'extrémisme violent qu'incarne l'EI", a confié ce diplomate, sans en dire plus sur la coopération américano-russe en la matière.
Avec AFP