23-11-2024 11:30 PM Jerusalem Timing

Bogdanov au Liban.. chez ses amis du Hezbollah.. l’Arabie veut renverser Assad

Bogdanov au Liban.. chez ses amis du Hezbollah.. l’Arabie veut renverser Assad

Le langage de la Russie devient "soviétique" sur le dossier syrien

Mikhaïl Bogdanov n’en est pas certes à sa première visite au Liban. Bien au contraire. Les visites du vice-ministre russe des affaires étrangères deviennent de plus en plus nombreuses pour la capitale libanaise. Cette fois-ci le motif est la commémoration de 70 années de relations diplomatiques avec le Liban.

Scrutant les avis de ceux qui l’ont rencontré vendredi, le chroniqueur du journal libanais al-Akhbar, Jean Aziz apporte ce constat : de plus en plus la Russie se comporte comme une super puissance.

Curieusement, pour le premier jour de sa visite, ce n’est pas le Liban qui était au menu des discussions de Bogdanov, mais la Syrie, la Palestine et l’Iran.

 

Du temps pour le nucléaire iranien

Sur ce dernier, il a expliqué les raisons pour lesquelles les négociations sur le nucléaire iranien ont buté avec les 5+1. «  Le seul nœud qui subsiste et qui a retardé la conclusion de l’accord est celle de l’intervalle temporaire entre la signature de l’accord et la levée des sanctions. Les Iraniens voulant une levée imminente alors que les Américains un laps de temps entre les deux », s’est-il contenté de révéler pour ses hôtes libanais. Ignorant les détails techniques litigieux : les proportions d’enrichissement, les quantités d’uranium admis, et le nombre concédé des centrifugeuses...

Sur les raisons réelles pour lesquelles il n’y a pas eu d’accord, Bogdanov est d’avis à croire qu’elles se trouvent loin de la table des négociations : dans le contentieux interne de chacun des deux protagonistes.
Obama et Kerry ne pouvant se permettre une telle initiative à un moment de rivalité électorale dans son Congrès. Rohani et Zarif ne pouvant accepter non plus de rentrer chez eux sans une suspension des sanctions. Cela aurait sapé le gouvernement!

La solution préconisée par Bogdanov se résume en un mot : le temps. Il devrait régler la question des trois niveaux des sanctions, européennes, onusiennes et américaines, par expiration des délais.
D’un ton rassurant, le diplomate assure que son pays fera en sorte que ce dossier parvienne à termes dans ses conclusions les plus positives.


La faute à Netanyahou

Sur la question palestinienne, toujours selon Jean Aziz, la rhétorique de Bogdanov prend au sérieux la soi-disant bonne volonté de l’administration américaine de parvenir à un accord et d’imputer au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou l’échec des négociations, voire d’avoir sapé le règlement basé sur les deux Etats israélien et palestinien.

Celui-ci aurait su acculer son allié américain, par sa proposition sur la Judaïté de l’Etat d’Israël, en la renvoyant à la résolution 181, laquelle parle d’un foyer juif...

Les Russes semblent adhérer à cette thèse.

Mais cela Bogdanov ne le dit pas. Il est clair que la cause palestinienne ne tient pas à cœur de la direction russe.

 

Aider les Syriens à réformer leur régime

Contrairement au dossier syrien. « Là, le langage syrien devient plus soviétique. L’approche du responsable russe n’est plus analytique mais relève de la prise de position », commente Aziz.   .

Il continue: « nous coordonnons avec Washington à propos de Damas, mais à la lumière de ce qui est possible et ne l’est pas en Syrie », a affirmé Bogdanov. Et de poursuivre : « Notre objectif est de réunir le pouvoir syrien et l’opposition pacifique autour de la table de dialogue... Nous avons accueilli de nombreuses fois des opposants à Moscou. Certains protagonistes régionaux ont tenté d’imposer des opposants, mais ils se sont avérés être des parties extrémistes et terroristes... Notre but est d’aider les Syriens à reformer leur régime, alors que les autres voudraient renverser des gens pour les remplacer par d’autres qui sont leurs partisans, quand bien même le pouvoir qui le remplacerait serait pire que l’actuel ».

Les Saoudiens veulent seulement renverser Assad

A ce stade, Bogdanov devient plus franc: «  Les Saoudiens sont venus nous voir pour demander de renverser le président Bachar al-Assad et rien d’autre. Ils ont dit franchement et clairement qu’ils n’ont aucun problème à ce qu’il soit remplacé par un autre alaouite, l’essentiel est qu’il parte. Ils ont dit qu’ils ont coexisté avec son père Hafez en tant qu’alaouite... Nous avons rejeté cette logique ».

Même son de cloche de la part des Occidentaux, poursuit Bogdanov, selon lequel ils demandent sans cesse à qu’Assad ne soit pas représenté dans l’équipe des négociateurs qui représentent le pouvoir.

«  Mais nous leur avons dit qu’Assad est le gouverneur réel de la Syrie, son président constitutionnel, et qu’il a été élu par le peuple syrien. Il est vrai qu’une partie des Syriens n’ont pas participé au vote, pour des raisons sécuritaires, mais ceci s’est passé en Ukraine lorsque des élections présidentielles se sont déroulées, sous le parrainage des occidentaux, et qui ont fait accéder Porochenko au pouvoir quoique toute la population des régions de l’Ukraine de l’Est n’avaient pas voté ».

Assad comme Porochenko

« Nous leur disons qu’Assad est aussi légitime en tant que président syrien que Porochenko l’est en Ukraine. Dans les deux cas, les règlements devraient passer par le dialogue et rien d’autre », a-t-il finalement conclu, toujours selon l’article d’Aziz.
Concernant le Liban, le diplomate russe s’est contenté de message de soutien devant ses hôtes officiels, dont le chef du parlement Nabih Berri, et le Premier ministre Tamam Salam, le chef de l’armée le général Jean Kahwaji, le ministre des affaires étrangères Gebrane Bassil.

Nos amis du Hezbollah

Curieusement, sa rencontre avec la délégation du Hezbollah s’est faite en premier, directement après avoir terminé les rencontres officielles. Il s’est rendu directement dans la banlieue sud pour rencontrer des dirigeants du Hezbollah, le responsables des relations internationale Ammar Moussaoui en présence de deux députés Hassan Fadlallah et Nawwar Sahili. Puis le chef du bloc parlementaire du Hezbollah Mohammad Raad.
Un ordre à ne pas négliger pour décrypter les messages de cette visite.
 

« Nous sommes toujours intéressés d’écouter l’analyse de nos amis du Hezbollah sur ce qui se passe au Liban et dans la région, sachant que la situation est dangereuse, et très compliquée », a-t-il dit en sortant de la rencontre, avec un arabe parfait.

Pour Moscou, la relation avec le Hezbollah ne relève pas seulement de  sa position au Liban mais aussi de ses alliances dans la région, lesquelles se recoupent avec les siennes.

Pour sa part, Raad a salué les efforts de la Russie en vus d’un règlement politique dans la région, tout en restant circonspect sur les intentions des autres protagonistes : « il y a certes des difficultés importantes qui entravent le processus de règlement. Nous serions mêmes enclins à dire qu’ils n’y a aucune bonne intention chez les acteurs (d’équilibre) pour parvenir à un règlement politique. Il semble qu’ils misent sur un changement des équilibres de force ... En tout cas le processus emprunté par la Russie sert les intérêts des peuples ».

Signe supplémentaire de l’intérêt exclusif accordé au Hezbollah, ce n’est que le lendemain que Bogdanov a rencontré les autres chefs de files des autres partis libanais : l’ancien président et chef des Kataëb Amine Gemayyel, le chef du Courant patriotique libre Michel Aoune, le chef des Maradas Sleïmane Frangiyeh, ainsi qu’une délégation du Parti syrien national social.

Étrangement, le chef du PSP, le leader druze Walid Joumblatt, ne figure pas sur sa liste. En revanche, il a rencontré un autre dirigeant druze, , Talal Arselane proche du 8-Mars, avant sa visite au Hezbollah !