Les Palestiniens menacent de recourir à la Cour pénale internationale. Moscou évoque une erreur stratégique et accuse Washington.
Le Conseil de sécurité des Nations unies a comme prévu rejeté mardi une résolution palestinienne portant sur la reconnaissance d’un mini Etat palestinien, au sujet de laquelle les Etats-Unis avaient exprimé leur opposition bien avant le vote.
La résolution a recueilli 8 voix pour, deux voix contre et cinq abstentions, alors qu'elle devait réunir 9 voix, sur les 15 du Conseil, pour être adoptée.
La France, la Chine et la Russie, tous trois membres permanents du Conseil, ont apporté leur soutien à la résolution. L'Australie et les Etats-Unis, proches alliés d'Israël, ont voté contre.
Cinq pays, dont le Royaume-Uni, se sont abstenus.
L'Argentine, le Tchad, le Chili, la Jordanie, le Luxembourg ont rejoint la France, la Chine et la Russie en faveur de la résolution.
La Lituanie, la Corée du Sud et le Rwanda se sont abstenus, comme le Royaume-Uni.
Le Nigeria, qui devait soutenir la résolution, a changé d'avis à la dernière minute et s'est abstenu, selon des sources diplomatiques.
Le texte prévoyait notamment un « accord de paix » d'ici douze mois et le retrait israélien des Territoires occupés avant fin 2017.
Les Palestiniens avaient apporté lundi des modifications à leur projet qui prévoit Jérusalem-Est, occupée et annexée, comme capitale d'un Etat palestinien, le règlement de la question des prisonniers palestiniens, l'arrêt de la colonisation israélienne et rappelle le caractère illégal du mur de séparation.
"Cette résolution encourage les divisions"
"Cette résolution encourage les divisions et non un compromis", a prétendu l'ambassadrice américaine à l'ONU Samantha Power.
Elle a défendu la position américaine qui est de favoriser des pourparlers directs, estimant que "la paix viendra de choix et de compromis difficiles atteints à une table de négociations".
Avant elle, lundi et mardi, Jeffrey Rathke, un porte-parole du département d'Etat, avait estimé que le calendrier fixé par le texte "posait des délais arbitraires" et souligné "l'inquiétude" des Etats-Unis au sujet de la sécurité d' « Israël ».
Urgence d'une reprise des négociations, selon l’UE
Depuis Bruxelles, la chef de la diplomatie de l'Union européenne Federica Mogherini a estimé que le résultat du vote soulignait "une fois de plus l'urgence d'une reprise de véritables négociations entre les parties et la nécessité pour la communauté internationale de se concentrer sur des résultats concrets" pour parvenir à un accord final.
L'objectif commun est de parvenir à un accord de paix global basé sur deux Etats "vivant côte à côte en paix, en sécurité, et en se reconnaissant mutuellement", a-t-elle déclaré dans un communiqué.
Avant le vote, l'ambassadeur britannique Mark Lyall Grant avait pointé des "difficultés" dans "des termes sur les délais, des nouveaux termes sur les réfugiés".
Tentant de rallier des pays à sa cause, le secrétaire d'Etat américain John Kerry avait téléphoné ces deux derniers jours aux responsables de 12 pays et au président palestinien Mahmoud Abbas.
On cherchera ailleurs l'obtention d'une reconnaissance de la Palestine
Le représentant palestinien à l'ONU Riyad Mansour a accusé le Conseil de n'avoir pas su prendre ses responsabilités et promis de chercher ailleurs l'obtention d'une reconnaissance de la Palestine.
"Les Palestiniens et le monde ne peuvent plus attendre. Ce message, en dépit de l'issue regrettable d'aujourd'hui, est tout à fait clair", a-t-il déclaré devant le Conseil.
Les responsables palestiniens se réuniront mercredi pour décider de la suite à donner au vote, a précisé M. Mansour.
Les Palestiniens avaient dit qu'en cas de rejet de leur résolution ils chercheraient notamment à rejoindre la Cour pénale internationale afin d'y mettre « Israël » en accusation pour crimes de guerre à Gaza.
"Israël" exhorte à mettre fin à la marche palestinienne vers la folie
Le représentant d' « Israël » a pour sa part exhorté à mettre fin à la démarche palestinienne.
"J'ai des informations pour les Palestiniens: vous ne pouvez pas vous diriger vers un Etat en vous agitant et en provoquant", a dit Israel Nitzan. "J'exhorte le Conseil à arrêter de se prêter au jeu des Palestiniens et à mettre fin à leur marche vers la folie".
Pour le ministre israélien des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, "l'échec de la résolution doit apprendre aux Palestiniens que les provocations et les tentatives d'imposer des mesures unilatérales à Israël ne les mèneront nulle part".
Pour un commentateur de la radio publique, "Israël a évité un fiasco, mais il ne s'agit que d'une victoire à court terme" car "les pressions internationales vont se poursuivre".
Moscou évoque une erreur stratégique
De son côté, la Russie a regretté l'échec de la résolution palestinienne.
"La Fédération de Russie regrette que le Conseil de sécurité de l'ONU n'a pas réussi à adopter le projet de résolution", a déclaré l'ambassadeur russe à l'ONU, Vitali Tchourkine pendant la séance du Conseil, d'après des images diffusées par la chaîne de télévision russe Rossiya 24.
"Nous considérons qu'il s'agit d'une erreur stratégique", a-t-il ajouté.
L'ambassadeur russe a également accusé Washington de "monopoliser" les négociations israélo-palestiniennes et de les mener "dans une impasse".