Joumblatt et ses pairs croient sincèrement que le Nosra et Cie vont contrôler la totalité du sud syrien d’ici la fin de l’an 2015, ainsi que la montagne al-Cheikh.
Un accord a été entériné entre le chef druze libanais, Walid Joumblatt d’une part et la branche d’Al-Qaïda en Syrie, le front al-Nosra, de l'autre, a révélé le journal libanais al-Akhbar. Au moment où Israël tente de pousser les Druzes syriens à renoncer à l’Etat syrien et à collaborer avec lui.
Dans les clauses de l’accord conclu avec le chef du Parti socialiste progressiste (PSP), sont concernés les Druzes du gouvernorat syrien d’Idleb où ils sont installés dans la montagne de Semmak qui comptent de nombreux villages.
En échange d’avoir la vie sauve, et d’échapper au diktat des préceptes de la «Sharia » dans ce gouvernorat dont la province est dans sa majorité contrôlée par la milice wahhabite d’Al-Qaïda, ils doivent annoncer leur conversion à l’islam wahhabite et détruire de leur propres mains les mausolées de leurs guides défunts.
Joumblatt a souvent flatté ce groupuscule aussi sanguinaire que son frère ennemi, Daesh (Etat islamique) : en le distinguant d’Al-Qaïda au début, puis en assurant ultérieurement qu’il constitue une partie intégrante du tissu syrien. Une autre fois, un membre de son bloc parlementaire, le ministre Wael Abou Faour avait trouvé bon de signaler qu’il compte dans ses rangs « des ingénieurs et des médecins ».
Pis encore : durant les pourparlers de Semmak, ces deux dernières semaines, Joumblatt s’employait à persuader les religieux et les notables druzes de garder le silence sur ce qui se passe à leurs coreligionnaires à Idleb. Arguant qu'ils sont les plus aptes à régler leur problèmes tous seuls.
L'histoire du Nosra et des Druzes d'Idleb
Tout a commencé depuis un mois et demi, lorsque l’émir du Nosra dans la montagne Semmak, un certain Abou Abdel Rahman al-Tunuci (un Tunisien d’après son sobriquet) a adressé un ultimatum aux Druzes, jusqu’au premier février, les sommant de détruire les mausolées de leurs guides spirituels et de répudier leur religion.
Sans broncher, les habitants druzes se sont pliés à ces sommations, et au diktat des religieux du Nosra, sans pour autant le satisfaire. Al-Tunuci s’est remis à les menacer de nouveau qu’ils seront soumis aux préceptes de la Sharia du Nosra.
Faire taire les Druzes
Durant cette période, aucun leader druze n’a soufflé mort, à l’exception du président de la Fondation Irfane, cheikh Ali Zeindeddine, au Liban.
Mais la colère se propageait dans les milieux des religieux druzes, et chez les parents de militaires druzes détenus entre les mains du Nosra et de Daesh. Ces derniers n’ont pas manqué de hausser le ton et de proférer des menaces devant Joumblatt au cas où il arrivait quoique ce soit à leurs fils.
Face à ces pressions, le chef druze s’est rendu en Turquie, pour obtenir des garanties pour les Druzes, sans obtenir gain de cause. Il avait fait la même chose avec l’Arabie saoudite, et obtenu la même réponse.
Raison pour laquelle il s’est finalement résolu à solliciter la médiation de la Coalition de l’opposition syrienne, qui entretient de bonnes relations avec la branche d'al-Qaïda. L’un de ses membres qui vit aux Emirats s’est rendu en personne à la montagne, en compagnie de l’un des juges de Nosra dans cette région, y a rencontré les notables druzes de ses villages et leur a décroché cet accord sur leur conversion.
Pas pour longtemps. Comme de coutume, le Nosra s’est rétracté et n’a pas tardé à menacer d’exécuter ses règles sur les Druzes. Le plus à craindre étant pour ces derniers d’obliger les filles druzes à épouser les hommes du Nosra.
Le Nosra tout au long de la frontière
Malgré ceci, Joumblatt ne cesse de faire la cour à cette milice d’Al-Qaïda, chaque fois qu’il est question des militaires libanais qui se trouvent entre ses mains.
« C’est une directive qui lui a été faite par des Saoudiens et certaines figures du courant du Futur et qui vise à le transformer (le Nosra) en un protagoniste sur la scène libanaise », assure un ami du leader druze, proche du 8-mars, relate al-Akhbar. Selon ce dernier, Joumblatt et ses pairs croient sincèrement que le Nosra et Cie vont contrôler la totalité du sud syrien d’ici la fin de l’an 2015, ainsi que la montagne al-Cheikh.
Abou Faour avait lui aussi fait part de cette prévision, durant un déjeuner avec des chefs des services de sécurité de la région de Rachayya, le mois de décembre dernier. De ce fait, le Nosra « sera déployé tout au long de la frontière avec la Bekaa centrale et occidentale, Rachayya et Hasbayya », a dit le ministre druze.
De l'aide en dessous de la table
Or au lieu de se préparer à combattre le Nosra, Abou Faour a donné l’ordre d’éliminer les ports d’armes aux membres du parti socialiste progressiste (PSP-parti de Joumblatt) à Rachayya et à ceux des Comités populaires qui ont commencé à se former dans les régions de la province sud-ouest de Damas, au motif que « rien n’est inquiétant ».
Il semble aussi que la relation entre le PSP et le Nosra et Cie soit bien plus profonde.
Et pour preuve : l’affaire de Mohammad Naamani, le chef d’une milice syrienne takfiriste, Ahrar al-Cham, (qui tourne dans la sphère d’Al-Qaïda) et qui a été enlevé en décembre dernier par des membres libanais du parti Baas dans la Bekaa, avant d’être livré aux autorités syriennes : Il était parvenu à rentrer dans les territoires libanais, en passant par Rachayya, et grâce à des membres du PSP.
Selon des sources sécuritaires syriennes, Naamani a avoué s’être rendu au Liban dans le but de former dans la Békaa centrale et occidentale des cellules pour entrer en action en parallèle aux miliciens dans les régions syriennes de Zabadane afin d’ouvrir des brèches au Liban et attaquer les positions de l’armée libanaise et syrienne des deux côtés de la frontière.
Les tentatives d'Israël, et l'aide jordanienne
Toujours selon le journal al-Akhbar, citant le chef du Parlement libanais Nabih Berri, il est question de tentatives assidues déployées par Israël pour pousser les Druzes syriens à collaborer avec eux et instaurer le soi-disant mur de bonté au nord du Golan , sous prétexte de les protéger des terroristes du Nosra , lequel jouit de son soutien aussi. Berri assure en avoir parlé avec Joumblatt lequel a dit vouloir se rendre en Jordanie pour s’enquérir de l’affaire.
Justement, du côté jordanien, assure al-Akhbar, ce sont les services de renseignements de ce royaume qui parrainent les rencontres entre un certain nombre de religieux druzes de Syrie (et du Liban) avec des druzes israéliens qui collaborent avec l’entité sioniste pour les pousser à renoncer à l’Etat syrien, et surtout à ne pas rejoindre les cellules de résistance qui sont en train de se former dans cette région hautement stratégique et sensible.