Décidément, le mauvais sort s’acharne sur l’acien patron du FMI et candidat favori aux élections présidentielles françaises.
Le parquet de Paris a déclenché vendredi la première étape de la procédure judiciaire visant Dominique Strauss-Kahn pour tentative de viol, en ouvrant une enquête préliminaire à la suite d'une plainte déposée par la journaliste et écrivaine Tristane Banon.
Cette décision des procureurs français complique encore un peu plus l'équation personnelle et politique de celui qui, avant son arrestation à la mi-mai à New York, était le grand favori de l'élection présidentielle du printemps 2012 en France.
A New York, Dominique Strauss-Kahn, 62 ans, a certes été libéré de son assignation à résidence, l'accusation de tentative de viol d'une femme de chambre a été fragilisée, mais le procureur de Manhattan a décidé de maintenir les poursuites. Une nouvelle audience est prévue le 18 juillet.
A Paris, sur le deuxième front judiciaire ouvert par la plainte de Tristane Banon, déposée mardi dernier, l'enquête préliminaire vise à vérifier les allégations de la jeune femme.
Confiée à la police, cette enquête est placée sous l'autorité du parquet.
Si elle se révèle concluante, il peut alors décider de confier l'affaire à un juge d'instruction, qui pourrait inculper l'ex-directeur du FMI.
L'ouverture de l'enquête est "tout à fait conforme à ce à quoi nous nous attendions", a déclaré à l'AFPTV l'avocat de la journaliste, Me David Koubbi, ajoutant que "les éléments qui sont à l'appui de la plainte seront mis à la disposition de la justice".
Cette plainte concerne des faits qui remonteraient à février 2003, lors d'une rencontre entre DSK et la journaliste dans un appartement du centre de Paris, pour un entretien réalisé dans le cadre de la préparation d'un livre.
Pour DSK, la scène que Tristane Banon a racontée lors d'une émission télévisée en 2007 puis dans un entretien au site internet AgoraVox en 2008, est "imaginaire". Ses avocats ont prévenu qu'une procédure pour dénonciation calomnieuse serait engagée quand ils auront pris connaissance de la plainte.
Dans un entretien publié cette semaine par l'hebdomadaire L'Express, la jeune femme revient en détails sur ses accusations, évoquant notamment les mains intrusives de DSK après qu'il lui eut "fait sauter le jean et le soutien-gorge".
Me Koubbi avait déjà expliqué que la plainte de la jeune femme reposait sur des éléments matériels et ne se résumera pas à un "parole contre parole".
"Nous disposons d'éléments matériels, des textos ont été envoyés et il existe des attestations", avait déjà dit à l'AFP l'avocat, sans préciser la teneur de ces attestations. "De nombreuses personnes se tiennent à la disposition de la justice pour témoigner", avait-il ajouté.
Passible de quinze ans de réclusion, la tentative de viol est un crime prescrit au bout de dix ans. L'agression sexuelle est en revanche un délit prescrit trois ans après les faits. Le temps écoulé interdisait donc à la jeune femme de porter plainte aujourd'hui pour agression sexuelle.
Ce nouvel épisode judiciaire intervient alors que plusieurs dirigeants socialistes ont fustigé la plainte de Tristane Banon, qu'ils ont vue comme une manoeuvre politique.
Mais surtout, ils cherchent à prendre leurs distances à l'égard de ces affaires qui empoisonnent le climat politique, alors que leur parti vient de lancer des primaires pour désigner son candidat à l'élection présidentielle.
Manuel Valls, l'un des candidats à la candidature, a ainsi dénoncé un "torrent de boue (...) un torrent de merde", et le patron des députés socialistes Jean-Marc Ayrault un "feuilleton nauséabond".
Un moment envisagé par certains de ses amis, un retour rapide de DSK sur la scène politique nationale n'est plus guère évoqué, laissant la voie libre à un duel entre les deux favoris: l'actuelle patronne du PS, Martine Aubry, et son prédécesseur, le député François Hollande. Les sympathisants de gauche voteront les 9 et 16 octobre pour cette primaire.