Comment les médias suisses (entre autre) manipulent leur opinion publique sur la crise syrienne (entre autre)
« Il n’y a pas un acte délibéré du gouvernement Assad pour faire souffrir la population. Il n’a aucun intérêt à ce que son peuple souffre. » [Nabil Antaki]
Les nouvelles consacrées par la Radio télévision suisse (RTS) à la Syrie mettent systématiquement en accusation le gouvernement de Damas.
Ainsi le président Bachar el-Assad est immanquablement présenté comme l’unique – ou le principal – responsable des souffrances qu’endurent les Syriens depuis 4 ans. Comme si l’armée régulière syrienne massacrait délibérément son propre peuple, comme si la Syrie n’était pas menacée par des bandes armées de barbares venues de Tunisie, de Libye, de Tchétchénie, etc.
Depuis le début du conflit on a entendu Darius Rochebin, présentateur vedette de la chaîne, qualifier constamment Bachar el-Assad de «dictateur sanguinaire».
A notre connaissance – nous ne regardons pas toujours le TJ de la RTS – jamais les présentateurs du TJ n’ont relaté et commenté les faits de manière rigoureuse et équilibrée pour décrire ce qui se passe en Syrie. Jamais nous ne les avons vus donner la parole aux Syriens qui, faut-il le rappeler, soutiennent en leur grande majorité l’armée régulière et considèrent le président Assad comme un rempart face à la barbarie des groupes jihadistes qui sévissent depuis 2011.
Depuis le début du conflit en Syrie, la RTS a diffusé - comme si elles émanaient d’une source crédible – des vidéos de propagande mises en circulation par les groupes armés. Des vidéos ponctuées par les cris «Allah hou Akbar », signature des groupes jihadistes.
Ainsi les présentateurs de la RTS ont montré au public durant de longs mois des vidéos diffusées à des fins de propagande contre Damas par ces mêmes groupes armés qui terrorisaient Homs, tout en les accompagnant de commentaires anti-Assad, dénaturant la réalité sur le terrain en escamotant l’essentiel : l’intervention des groupes terroristes soutenus par l’Occident dans un pays souverain.
Jamais les informations qui se sont révélées inexactes n’ont été rectifiées. Comme on l’a constaté avec la diffusion d’images de la manifestation à Hama, images truquées à des fins de propagande anti-Assad par les groupes jihadistes [1].
Cette manière unilatérale de présenter les événements bafoue le droit du public à connaître la vérité. Elle ne lui permet pas de se forger sa propre opinion.
Deux exemples récents illustrent ce parti pris à sens unique de la RTS concernant la Syrie.
Téléjournal de la RTS – 15 mars 2015 | 19.30
Revenant sur les quatre années écoulées de la crise syrienne, la présentatrice de la RTS aborde le sujet par un plan fixe sur le visage bouleversant d’un enfant ensanglanté, avec ce commentaire :
« Tel est le visage de la crise syrienne aujourd’hui. Celui de cet enfant blessé ce vendredi encore par les frappes du régime d’Assad. Tout est là. Un bilan humanitaire dramatique. Un régime toujours plus brutal. Une communauté internationale comme pétrifiée. Car rien n’est fini. Pas la guerre ni même la longue liste des souffrances du peuple syrien qui chaque jour ne cesse de s’allonger. En 4 ans de conflit, la crise a fait 220 000 morts dont plus de 10 800 enfants … » [2]
Toute l’émission se poursuit sur cette lancée ; la présence sur le plateau de Tawfik Chaama, un Syrien naturalisé suisse, n’y apportera pas la moindre nuance. Et, bien sûr, la responsabilité des groupes jihadistes qui terrorisent la population et mettent le pays à feu et à sang – causant de nombreuses pertes y compris dans l’armée de défense régulière – n’est même pas évoquée.
Téléjournal de la RTS – 6 mars 2015 | 19.30
Après un commentaire du journaliste Jean-Philippe Schaller, qui renvoie l’Etat islamique et Bachar el-Assad dos à dos, la parole est donnée à Jean-Pierre Filiu, un agent d’influence connu pour son biais en faveur des groupes armés dès lors qu’il défend la version anti-Assad du gouvernement français. Le montage est totalement orienté. Schaller intercale dans les propos de Filiu ce commentaire :
« Assad continue à bombarder les civils d’Alep plutôt que les jihadistes. Hier un baril d’explosif a fait 18 morts »…
Jean-Pierre Filiu ensuite enchaîne sur sa propagande anti-Assad comme de coutume. [3]
Sur quels éléments objectifs J.P. Schaller se fonde-t-il pour affirmer qu’«Assad continue à bombarder les civils d’Alep plutôt que les jihadistes» et pour insinuer que cet homme rationnel s’ingénie à se tirer des balles dans le pied, au lieu de tirer sur les jihadistes qui, depuis 4 ans, menacent son pouvoir ? Et sur quelle source se fonde-t-il pour affirmer que c’est le « régime » Assad – et non pas les groupes armés – qui a bombardé avec des « barils d’explosifs », le 5 mars, des civils à Alep ?
Sur quels éléments de preuves la télévision RTS s’appuie-t-elle pour induire que le « régime syrien » massacre délibérément son propre peuple ?
Nous avons demandé au Dr. Nabil Antaki [4] qui vit à Alep – un médecin qui a décidé de rester en Syrie malgré la menace que font peser les «opposants » terroristes – si la version des faits rapportée par la RTS correspondait bien à la réalité telle que vécue sur le terrain, selon lui. (Voir vidéo)
Voici sa réponse :
« Depuis juillet 2012, date du début des combats à Alep, la ville est divisée en deux cercles concentriques ; le cercle externe est aux mains des groupes armés et le cercle interne est aux mains de l’armée syrienne. Nous habitons dans le cercle interne ainsi que la majorité des habitants d’Alep en plus des centaines de milliers de déplacés qui ont fui les quartiers tenus par les groupes armés. Dans le cercle externe, occupé par les groupes armés il ne reste plus qu’environ 300.000 personnes.
Depuis juillet 2012, l’armée syrienne bombarde le cercle externe et les groupes armés bombardent le cercle interne. Il y a donc quotidiennement des tués et des blessés des deux côtés.
Qu’il y ait eu, à la suite d’un bombardement, 18 tués, c’est possible, comme il y a tous les jours des tués de notre côté. Personne ne peut vérifier ce qui se passe de l’autre côté sauf ceux qui y sont.
Ce que je sais, c’est que l’armée syrienne ne bombarde pas délibérément les civils pour les tuer mais, comme les groupes armés sont éparpillés parmi les civils, il se peut qu’un bombardement visant ces groupes puisse aussi atteindre des civils.
L’armée américaine, avec tous les moyens sophistiqués à sa disposition, a fait de nombreuses victimes collatérales durant ses guerres en Afghanistan et en Irak. Par contre, les groupes armés envoient leurs barils d’explosifs et leurs mortiers délibérément sur les quartiers habités par les civils. »
Ces propos du Dr. Nabil Antaki montrent tout l’arbitraire des accusations sans fondement de la RTS. Sur quelle source fiable J.P. Schaller s’est-il fondé pour affirmer qu’Assad avait continué de bombarder des civils ce jour là ?
Malheureusement, la désinformation pratiquée par la RTS sur la Syrie, si blessante pour les victimes des groupes terroristes contre lesquels l’armée régulière syrienne se bat au prix de lourdes pertes, ne fait généralement l’objet d’aucune contestation.
Mais toute règle a ses exceptions, comme le montre le texte publié officiellement, le 14 février 2014, par l’ « Autorité indépendante d’examen des plaintes en matière de radio-télévision » (AIEP) que nous reproduisons ci-dessous [5].
Silvia Cattori
Source : Arrêt sur Info